Ambient japonaise, années 1980
Publié le 02/01/2025 à 00:27
- 7 min -
Modifié le 08/01/2025
par
La COGIP
Ils sont compositeurs, sound designers, artistes conceptuels, et ont écrit au début des années 80 les premières pages d'une histoire discrète : celle de l'ambient japonaise. A la recherche de l'harmonie entre frénésie industrielle et nature apaisante.
Nous vous parlions il y a quelques années dans un article intitulé “Wamono” de certains courants musicaux qui ont traversé le Japon à la fin du XXè siècle, et notamment du “Kankyo ongaku“. Cette esthétique “environnementale” est née du contexte particulier du début des années 1980 : un pays en plein boom économique et dont les marques (JVC, Sanyo, Seiko, Muji) vont jusqu’à subventionner les artistes pour associer une identité musicale éthérée et élégante à leurs produits.
Aujourd’hui tout est redécouvert, digéré et retranscrit de manière plus ou moins fidèle, mais une chose est sûre, le mouvement ambient japonais des années 1980 est désormais richement documenté et ses classiques tendent à s’imposer sur la scène internationale au-delà de leur japanité.
Nous vous en proposons un petit tour d’horizon, basé sur les nombreuses discographies glanées sur l’intèrouebe.
On trouve la plupart du temps au sommet des classements :
Hiroshi Yoshimura

En huit mouvement tout en retenue, l’album Green (1986) s’installe insidieusement dans votre esprit et vous apaise. Pour l’anecdote, la magie des cristallins synthétiseurs et orgues se mêle dans certaines versions du disque (pour le marché américain) aux enregistrements de terrain réalisés par Hiroshi Yoshimura (eau, oiseaux…)
Comment sonne l’espace domestique ? Ou plutôt comment devrait-il sonner ? C’est la question à la base du travail sur “Surround” (1986). Commissionné par Hiroyoshi Shiokawa, du bureau de design sonore de la société de construction Misawa Home, le concept de composition pour un lieu est poussé à son maximum. Cet album deviendra le premier de la série des “Soundscapes”. Il faut peut-être un peu d’imagination pour apprécier à plein la réussite du concept, mais heureusement c’est accessoire. Car comme dit JJG : “quand la musique est bonne…”
Composée à l’origine pour accompagner la déambulation des spectateurs du Hara Museum of Contemporary Art, la suite électro-acoustique “Music for nine post cards” (1982) a été réalisée avec claviers et piano électrique Fender Rhodes, et la superposition d’enregistrements de la nature. Au-delà de cette description factuelle, difficile de caractériser ce premier album ‘musical’ du jusqu’alors artiste / sound designer. Il a son petit univers.
Cet album est aussi le premier de la série “Wave Notation”. Suivons ce fil, il nous mènera à :
Satoshi Ashikawa
“Still Way” (1982) est le deuxième volet de la série “Wave Notation”. Cette série a été pensée et créée par Satoshi Ashikawa, musicien, disquaire, et à l’origine du label “Sound Process”.
Dans cet album, il est accompagné entre autres de sa femme Masami Ashikawa à la flute, et de Midori Takada au vibraphone. On y entend également une harpe. Il tisse une toile destinée selon son lui (et fidèlement à l’approche Brian Eno-ienne de l’ambient) à être écoutée comme un paysage sonore et à se glisser dans son environnement telle de la fumée.
https://pen-online.com/fr/culture/satoshi-ashikawa-parrain-de-la-kankyo-ongaku
Satsuki Shibano
Après avoir plongé dans Satie en 1977 suite à un concert organisé par Satoshi Ashikawa, elle l’étudie en France, et enregistre à son retour ce qui deviendra la troisième pierre à l’édifice Wave Notation, et propose une relecture des “musiques d’ameublement”. L’interprétation ample, laissant résonner longuement les notes, ancre ce récital dans le concept initié par Satie et prolongé par Eno puis Ashikawa.
Ce disque de Satsuki Shibano sera aussi le dernier de la serie Wave Notation, et sortira en 1982, peu de temps après la disparition de Satoshi Ashikawa.
Haruomi Hosono
Le fondateur et leader du groupe synthpop Yellow Magic Orchestra a aussi en solo une carrière riche en propositions expérimentales.
Réalisée en 1983 pour sonoriser les magasins Muji, cette bande très originale vous caresse l’oreille sans vous endormir. Un tour de force de douceur en quelque sorte. “Watering a flower” est très introspectif, et pourtant très accessible.
A lire : “Haruomi Hosono : Walking on the moon” sur Rockyrama.com
A lire : “Haruomi Hosono, le pionnier : son oeuvre solo” sur Janis-media.com
Mais aussi :
Inoyama Land
Cet album du duo composé par Makoto Inoue et Yasushi Yamashita (produit par Haruomi Hosono) mélange à merveille les influences bucoliques et industrielles. Synthétiseurs et flûtes s’y croisent à la faveur d’une balade en forêt qui vire volontiers à l’urbex.
Joe Hisaishi
On connaît Joe Hisashi pour son travail sur les films de Hayao Miyazaki et Takeshi Kitano entre autres. Ses albums synthétiques minimalistes du début des 1980s témoignent d’un goût certain pour les arpèges, comme sur ce “Islander” (sur l’album “Information” de 1982, avec Wonder City Orchestra).
Akira Ito
Album immersif s’il en est, “Marine flowers” (1986) est la bande son d’un documentaire sur la faune sous-marine, commissionné par Pioneer pour promouvoir le Laser-Disc (souvenez vous). L’ambition d’Akira Ito est d’offrir une musique qui guérit.
Fumio Miyashita
Tout comme Akira Ito, Fumio Miyashita fût acteur avant de produire de la musique ambient. Lui c’était plutôt les arts martiaux. Les deux hommes furent membres dans le milieu des années 1970 du Far East Family Band (avec le renommé Kitaro). En solo, Fumio Miyashita se consacrera à la production de musique à visée thérapeutique.
Interior
Lui aussi produit par Haruomi Hosono et datant de 1982, cet album du groupe Interior est hors du temps. Album volontiers compagnon de rêveries au sens le plus positif du terme, il se paie le luxe d’avoir la classe malgré ses sonorités (volontairement) lisses. Troublant.
Takashi Kokubo
Ce qu’en dit wikipédia.fr est réducteur : “Ses œuvres les plus connues incluent l’alerte pour séisme sur les téléphones portables japonais et le son de confirmation des paiements par carte de crédit.” Sound designer, Takashi Kokubo est aussi compositeur de nombreux albums de musique ambient incorporant des sons de la nature, captés à l’aide d’un microphone binaural “cyberphonic”.
Et encore une fois :
Midori Takada – through the looking glass (1983)
Kankyo ongaku : japanese ambient, environmental & new age music 1980-1990
Haruomi Hosono – Cochin moon (1978)
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