Label lyonnais
Ultimae ou la fabrique de l’ambient
Publié le 02/03/2024 à 16:07 - 6 min - par Alfons Col
Le label lyonnais fêtera ses 25 ans cette année. S’ il est peu connu du grand public français, il a acquis une renommée internationale et il est considéré à l'heure actuelle comme un label de référence dans les sphères ambient.
Tout commence entre deux producteurs lyonnais, passionnés de musique ambient et de trance. Charles Farewell et Vincent Villuis forment en 1996 le duo Asura qui sera rejoint deux ans plus tard par Christopher Maze. Le groupe compose un premier album “code eternity” et le propose à plusieurs labels qui trainent les pieds. Accompagné par Sandrine Gryson (cofondatrice et manageur du label) ils créent Infinium records, qui deviendra deux ans plus tard Ultimae records.
Le label produira plus d’une centaine d’albums avec des compositeurs de tous pays. Sous le terme générique d’ambient, les différentes productions explorent toutes les facettes des musiques électroniques d’alors : techno minimale, trance, psytrance, progressive techno mais aussi world-music ou néo-classique.
Bien que chaque artiste ait son identité propre, Vincent Villuis et Sandrine Gryson s’attachent corps et âme à construire une unité, conférant à Ultimae un son et un design immédiatement reconnaissables.
Avant toute chose, il faut qu’ils soient ému par la musique qu’on leur présente et que l’artiste partage les mêmes valeurs humaines. Ils proposent alors un vrai travail d’artisan intervenant dans toutes les étapes de la production : les choix artistiques et esthétiques, l’artwork, l’enregistrement ou le mastering. Le label accompagne l’artiste sur tout le processus de production, à l’image des grands labels indépendants du passé (Motown ou Factory).
Depuis quelques années Sandrine s’occupe aussi du volet édition d’Ultimae, permettant aux artistes d’intégrer d’autres médias (films, publicités, jeux vidéos).
Voici quelques artistes et quelques disques pour appréhender l’univers Ultimae.
Les compilations
Dès le début le label alterne album et compilation, permettant une plus grande publicité sur le travail de leurs artistes.
Le premier volume de la série Fahrenheit project, (qui en compte sept) sort en avril 2001, compilation mixée qui propose de découvrir sur le même disque des conceptions différentes de l’ambient à travers des artistes du label mais aussi des compositeurs de musiques électroniques et du monde.
Sous le pseudonyme de Mahiane, Sandrine Gryson donne son propre ressenti en construisant des mix plus chill out dans la série de compilations Oxycanta (3 volumes).
Asura
Duo puis trio et enfin solo, Charles Farewell est depuis seul maître à bord du projet Asura, ce qui ne l’empêche pas de rester dans la flotte Ultimae. A base de machines et d’instruments acoustiques il explore l’electro-world, comme l’Asie dans l’album “360” (2010), mais aussi construit une multitude de paysages sonores très cinématographiques, issus de sa culture musicale très ouverte.
Bien que pas directement produit par Ultimae, dans son dernier album “le Renaissance” (2023) il adjoint des nappes symphoniques à une psytrance complétement ouverte.
Aes Dana
Libéré d’Asura, Vincent Villius peut se consacrer pleinement à son projet solo : Aes Dana. Compositeur prolifique avec dix albums depuis 2001 et plusieurs collaborations, son travail de composition ne cesse de s’élargir et chacun de ses albums reçoit des critiques enthousiastes.
Même si l’ensemble de sa discographie mérite le détour, nous citerons ici “Pollen” (2012), plusieurs fois réédité et le plus acclamé par la critique. Ici le compositeur intègre le concept de pollinisation à sa musique, partant de paysages croisés dans sa vie, retranscrits musicalement, et qui se reproduisent en boucle.
Parallèlement il gère intégralement le travail de studio (enregistrements 24 pistes, mastering…) soit pour les artistes du label soit pour des compositeurs indépendants
En 2024 se prépare une quatrième collaboration entre Aes Dana et le producteur grec Miktek (Mihalis Aikaterinis), le duo ayant déjà produit trois E.P. pour Ultimae.
Solar fields
Sous le pseudonyme de Solar Fields se cache le compositeur suédois Magnus Birgersson, qui se lance dans les musiques électroniques à la fin des années 1990. Il sort son premier album «Reflective Frequencies » chez Ultimae en 2001 et leur restera fidèle en sortant dix autres albums sur le label lyonnais. Il est considéré comme l’un des plus productifs et créatifs de la scène musicale électronique scandinave.
Parallèlement il collabore avec Aes Dana sous un nouveau projet H.U.V.A. Network, un duo downtempo faisant se rencontrer les ambiances sonores du sud et du nord de l’Europe. Chacun compose dans son propre studio, Magnus à Göteborg (Studio Jupiter) et Vincent à Lyon.
En 2008 Solar Fields compose la très remarquée B.O. du jeu vidéo « Mirror’s Edge ».
Carbon based lifeforms
Voisin de Magnus Birgersson, le duo Carbon based lifeforms (Daniel Vadestrid et Johannes Hedberg) basé aussi à Göteborg se forme en 1996. Ils produiront cinq albums pour Ultimae entre 2003 et 2011 dont le premier “Hydroponic garden” est cité dans l’Anthologie de l’ambient.
Martin Nonstatic
Né aux Pays Bas mais ayant grandi à Cologne (Allemagne), Martin Nonstatic vit depuis dix ans en Autriche et chacun de ces lieux lui inspirent des paysages sonores différents. Il commence sa carrière surtout en live avant de s’immerger dans un travail studio. Il fait partie déjà d’une deuxième génération de compositeurs sur le label lyonnais. Depuis 2015 Il a produit 4 albums et plusieurs maxis devenant le plus prolifique de l’écurie.
Son dernier opus “Pulsatille” (2023) consolide sa place de producteur exigeant, mêlant sans complexe ambient, dub techno, IDM et acid dans une osmose déconcertante.
Nous aurions aussi pu vous parlez du compositeur français Alex Scheffer, plus connu sous le nom de Cell, qui alterne albums live et studio ou encore de l’anglais James Murray, musicien autodidacte qui a fournit trois albums et un EP au très fringant label lyonnais.
Vous trouverez la plupart du catalogue d’Ultimae dans le fonds patrimonial “Mémoire des musiques lyonnaises” en consultation à la Bibliothèque de la Part Dieu ou sur Numelyo, dans l’enceinte des bibliothèques du réseau.
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