Le cœur battant de l'usine à succès
James Jamerson
Publié le 02/12/2020 à 08:42
- 6 min -
Modifié le 31/05/2023
par
Eric
Tout le monde connait le label de soul music Tamla Motown, et ses gloires mondiales : Michael Jackson, Stevie Wonder, Diana Ross, Lionel Richie, les Temptations, Marvin Gaye… Mais peu connaissent les musiciens qui œuvraient derrière.
Le label de soul music Tamla Motown est un des labels les plus connus et reconnus. Il eut une grande influence sur la musique populaire américaine et mondiale. Fondé par Berry Gordy à la fin des années 50. Ce label régna sur les années 60 et début 70, en établissant un nouveau son et de nouvelles règles. Il permit la découverte de Stevie Wonder, les Jackson 5, Smokey Robinson, Diana Ross, Lionel Richie, les Temptations, Marvin Gaye…. Le succès de ce label est impressionnant, puisque plus de 180 chansons se retrouvèrent n° 1 dans le monde, soit plus de hits que les Beatles, les Rolling Stones, les Beach Boys et Elvis Presley réunis. Et cette influence se fait encore sentir aujourd’hui.
Mais derrière cette gloire artistique et économique, se cache une tout autre réalité.
Basé au 2648 West Grand Boulevard, Détroit (Michigan) et surnommé Hitsville USA le studio d’enregistrement est en fait une cave, ouverte 22 heures sur 24. Berry Gordy règne ici en maitre, organisant, contrôlant, régissant. Pour propager la bonne parole soul pop, il engage les meilleurs musiciens de jazz de Detroit. Ces musiciens surdoués connus mondialement sous le nom de Funk Brothers travaillent sans relâche à établir et à maintenir le son Motown. Mais leurs noms restent inconnus du grand public. Et malgré leur haut niveau de créativité et de participation à l’élaboration des hits ils sont payés au plus bas.
Reach out (I’ll be there) – Four Tops
Parmi eux le bassiste James Jamerson. D’abord contrebassiste de jazz et de Blues, il commence très jeune a joué dans les clubs de Detroit. Et malgré son jeune âge, il a une excellente réputation. Il accompagne régulièrement les jazzmen du coin comme Kenny Burrell, Yusef Lateef, Hank Jones… Il a 23 ans lorsque Berry Gordy l’embauche pour accompagner les stars Motown…
Ain’t No Lountain High – Marvin Gaye et Tammi Terrell
Il devient ainsi un membre fondateur et éminent des Funk Brothers. Il passe de la contrebasse à la basse électrique (Fender Precision) qu’il baptise The Funk Machine. Et au fur et à mesure des enregistrements James Jamerson développe un jeu de basse mélodique et originale, qui va marquer la plupart des hits de la Motown. Il est d’ailleurs si important que des sessions d’enregistrement sont décalées en son absence. Et de Paul McCartney à Jaco Pastorius, de Robert Trujillo (Metallica) à John Entwistle (The Who) ou encore à John Paul Jones (Led Zeppelin) la plupart des bassistes reconnaissent son aura et son apport.
What’s going on – Mavin Gaye (avec James Jamerson à la basse)
C’est Marvin Gaye qui apporte un début de reconnaissance public au Funk Brothers. Puisqu’il est le premier à les créditer sur la pochette de son album : “What’s going on“. Et citant en particulier : “avec l’incomparable James Jamerson“. Pourtant l’enregistrement de la chanson titre de Marvin Gaye avait mal commencé. Désespéré de l’absence de James Jamerson qu’il prévoit pour la session d’enregistrement. Marvin Gaye le cherche à travers toute la ville de Detroit. Il le trouve ivre mort dans un club de jazz, et le ramène au studio. Mais Jamerson est incapable de se tenir debout ou assis sur son tabouret. Finalement Jamerson s’allonge sur le sol et improvise en une seule prise la ligne de basse de la chanson titre.
Une des raisons qui pousse Marvin Gaye à nommer les musiciens, c’est : avant d’être un chanteur phare de la Motown, Marvin Gaye commence sa carrière en tant que batteur au sein des Funk Brothers. Et il a du lui aussi affronter le dirigisme de Berry Gordy avant de se libérer de l’emprise de celui-ci.
Inner City Blues – Marvin Gaye
James Jamerson était alcoolique depuis son adolescence. Et son addiction devient si grave qu’il est viré de la Motown en 1973. 10 ans plus tard, il décède d’une cirrhose et d’une déficience cardiaque. Il a 47 ans. Son fils James Jamerson Jr reprend le flambeau et participe en tant que bassiste à de nombreux enregistrements.
En 2000, James Jamerson est intronisé à titre posthume au Rock and Roll Hall of Fame.
Et en 2004 le groupe The Funk Brothers reçoit un Grammy.
Papa was a rolling stone – The temptations
A l’origine de cette reconnaissance, l’auteur Allan Slutsky (aka Dr Licks). Ce dernier commence en 1986 à rédiger une partition sur les lignes de basse des morceaux de la Motown. Avant de basculer vers un ouvrage consacré au seul James Jamerson, avec des témoignages de nombreux bassistes qui acceptent de reprendre les lignes de basse de Jamerson et de commenter leurs interventions. Et parmi ceux ci on trouve : Paul McCartney, Marcus Miller, Pino Palladino, Chuck Rainey, Jack Bruce, Willie Weeks…
La partition dans notre catalogue.

Cet ouvrage-partition est à l’origine du documentaire : Standing in the shadow of Motown (Motown la véritable histoire) (2002) qui retrace le parcours musical des Funk Brothers et de James Jamerson.
Le DVD du film dans notre catalogue
Standing in the Shadows of Motown
The Funk Brothers : James Jamerson (basse) ; Earl Van Dyke (piano) ; William Benny Benjamin et Richard Pistol Allen (batterie) ; Robert White, Eddie Willis et Joe Messina (guitare) ; Jack Ashford et Eddie “Bongo” Brown (percussions) ; Jack Brokensha (vibes, marimba) ; Dennis Coffey (guitare) ; Melvin “Wah-Wah Watson” Ragin (guitare) ; Bob Babbitt (basse)…
La liste complète des musiciens sur Wikipédia
Le site Music radar propose (en anglais) : James Jamerson: 11 iconic basslines dont des extractions des lignes de basse de Jamerson dans certaines chansons.
Partager cet article