Balade entre les deux rives du fleuve Congo
Publié le 18/06/2014 à 23:00 - 15 min - Modifié le 06/06/2016 par Département Musique
La RDC - Congo belge jusqu'en 1960, Zaïre de 1971 à 1997, connue depuis comme République Démocratique du Congo - est l'un des plus grands pays africains. Sa capitale est Kinshasa (ancienne Léopoldville, du nom du roi des Belges d'alors). Située en face, de l'autre côté du fleuve Congo, est Brazzaville, l'autre capitale, celle du Congo Brazzaville ou République du Congo, ancienne colonie française indépendante depuis 1960. Deux pays, deux rives du fleuve, une même musique en constante évolution depuis près d'un siècle...
Aux débuts du vingtième siècle
« Au début du siècle, sur les chantiers coloniaux d’Afrique Centrale, débarquent des Caribéens, descendants d’esclaves. Leurs guitares et accordéons accompagnent les premières émissions de Radio-Léopoldville dès la fin des années 30 ».
C’est avec leur danse, la nkumba, une danse du nombril, qui prend sa source en Afrique centrale , que les esclaves noirs africains débarquèrent à Cuba. Elle fut alors appelée “rumba”.
Des années plus tard, « Les rythmes et les mélodies d’antan, après avoir voyagé aux Amériques et s’être mélangées aux sons européens (mazurka, polka et autres danses de salon), reviennent sur leur terreau natal » . Là les artistes se les réapproprient et créent de nouveaux sons, croisement des différentes musiques traditionnelles. ( voir l’article de RFI)
De plus « dans les années 1930, les “Coastmen” , marchands et marins originaires du Dahomey, du Ghana et du Nigeria font danser Léopoldville et Brazzaville aux accents du highlife ghanéen. »
Entre les deux rives du fleuve Congo nait la rumba congolaise, qui « occupe une place de premier plan depuis un demi siècle, devenue même par son audience la musique “panafricaine” » … « Elle a en outre influé sur bien d’autres styles urbains, aussi divers que le benga kenyan, le chimurenga zimbabwéen, la juju nigériane, le makossa camerounais ou le ziglibithy ivoirien. » (extrait du livre “Musiques de toutes les Afriques”)
En 1942, Paul Kamba avec son orchestre Victoria Brazza fait danser les habitants des deux rives et popularise la rumba. Son succès est tel que Wendo Kolosoy fonde à Léopoldville en 1948 un groupe au nom similaire : « Victoria Kin »…
Wendo Kolosoy
- wendo-kolosoy
« Originaire de Kisangani (Congo-Kinshasa), poète populaire, batelier, chanteur, guitariste, Antoine Kolosoy … opère la première fusion acoustique entre rythme traditionnel zebola, rumba cubaine et style matiniqué, fortement influencé par la mazurka et la cadence, jetant ainsi les bases de la rumba congo-zaïroise. » (voir l’article “Congo Kinshasa de Afrisson).
En 1948 il enregistre « Marie-Louise », un succès.
« Cette pure merveille … va devenir le prototype de la plupart des chefs-d’œuvre de la rumba congolaise. En plein milieu , Bowane interrompt Wendo en criant “Yoka sebene” (écoute le sebene), il joue un long solo et , … ce sebene – partie instrumentale improvisée destinée aux danseurs – sera désormais le cœur de toute la musique congolaise. “Marie-Louise” est aussi un modèle par la manière dont les musiciens entrecoupent leur chanson avec de multiples commentaires détachés, ironiques, sur la musique et ses instruments. » (extraits de “Musiques de toutes les Afriques de G. Arnaud et H. Lecomte.)
Quelques disques :
Amba (Marabi)
Marie-Louise (Label Bleu) 1999
Un DVD :
On the Rumba River D.V.D. Jacques Sarasin filme des témoignages, des rencontres, des retrouvailles entre Wendo et ses anciens musiciens, et des tranches de vie quotidiennes, familiales
https://www.youtube.com/watch?v=XLC4ygLI5HU
« On retrouve dans cette musique congolaise naissante l’Influence du son cubain, des guitares espagnoles, des bouzoukis grecs, des cantiques catholiques, des mandolines ou de l’accordéon mêlée au folklore local ou à l’utilisation du piano à pouces likembé.
La rumba congolaise qui prend forme sur les deux rives du fleuve utilise souvent le montuno (refrain) cubain auquel s’agrègent des couplets chantés en lingala. Influences du jazz, des musiques européennes, cubaines. »
( extrait du livre de Florent Mazzoleni, L’épopée de la musique africaine, le chapitre : “Congo au cœur de la danse” p 126)
Les années 50-60 : plusieurs orchestres animent la scène musicale des deux Congos.
L’AFRICAN JAZZ.
En 1953, Joseph Kabasélé alias le Grand Kallé crée l’un des premiers groupes modernes du pays, l’AFRICAN JAZZ. Nom justifié par la place privilégiée accordée aux solos de cuivres, à la clarinette , aux saxophones ; Mais la guitare électrique domine avec le guitariste Nicolas Kasanda dit « Dr Nico » qui électrifie la rumba congo-zaïroise.
L’African Jazz puise dans le répertoire des danses cubaines (cha cha cha, mambo, charanga, bolero …)
“Il synthétise cette fusion cubaine et africaine”.
« Sous l’impulsion de l’African Jazz et des premiers orchestres amplifiés, les guitares en spirale, les rythmiques déhanchées et les cuivres euphoriques propulsent rapidement la rumba congolaise comme style musical le plus important d’Afrique. » (p 127 “Congo au cœur de la danse”)
« Parafifi », une des premières rumbas : cuivres guitares hawaiennes, une musique de danse.
Kabasélé introduit aussi des instruments typiques, le grand tambour tetela, la clochette yombe, .. le xylophone kuba.
« Ambiance Kallé Catho » est un succès.
Dans les années 50, danse et euphorie, rythmées par ces orchestres, règnent toute la nuit.
En 1960 lors des négociations pour l’indépendance à Bruxelles, des musiciens de l’African Jazz sont invités à participer à l’ évènement. (Nico et Kabasélé sont présents).. L’African Jazz entre dans l’histoire de la musique africaine en enregistrant « Indépendance cha cha » qui fera le tour de l’Afrique. Ils enregistrent aussi « Table ronde » ….
L’orchestre sera omniprésent au Congo , avec ses scissions, dissolutions, et émanations diverses jusqu’à la mort de Grand Kallé en 1983.
(Pour un exposé détaillé de l’histoire de l’African Jazz, voir le livre Afro Pop L’âge d’or des grands orchestres africains de Florent Mazzoleni)
Disques à écouter :
Grand Kallé his life his music Joseph Kabasele and the creation of modern congolese music. 1951-1962. 1964-1970. Disque compact sur le label Stern’s
“Dr Nico et l’african fiesta 1969” : Nico Kasanda est le guitariste de l’African Jazz qui fera sécession.
« Canshita »
La légendaire formation, associée au guitariste Franco (François Lwambo), voit officiellement le jour en juin 1956. Des centaines de morceaux sont enregistrés de 1956 à 1989.
« Mbongo na ngai » (on entend la clarinette de Jean-Serge Essous)
« L’OK Jazz fonctionne comme un véritable mixeur musical et social, fidèle à la devise du Grand Maître “On entre OK, on sort KO”. Il reflète l’énergie qui anime le Kinshasa des années 60 et du début des années 70 » (voir Afro Pop – L’âge d’or des grands orchestres africains) de Florent Mazzoleni.
Le bolero « Mbanda ozui kizungu zungu » un des sommets de sa carrière
A écouter :
Franco : Classic Titles (2007 Cantos)
En deux CD et près de 2h30, le volume de la collection Classic Titles qui lui est consacré offre un aperçu tout à fait représentatif de la longue carrière label : Cantos/Pias parution : 2007
Francophonic (Stern’s) / Franco et le T.P. OK Jazz
A Brazza, naissent aussi des orchestres, notamment “Les Bantous de la Capitale”.
Après avoir quitté l’African Jazz, il fonde l’ African Fiesta National, renommé plus tard AFRISA INTERNATIONAL. Ce grand chanteur et compositeur, qui triompha à l’Olympia, est mort en fin d’année 2013.
A écouter :
Le seigneur Rochereau & l’Afrisa International (Syllart) à l’Olympia
The voice of lightness volume 02 (Sterns 2007) double disque , résumé de sa carrière (années 60 et 70)
A écouter : un disque enregistré plus récemment
Cantos de esperança / Sam Mangwana (2003 Sono )
Autres disques échos des années 50-60 : Congo Rumba on the river (2006) (African Pearls) .
Années 1954-1967. : African Jazz, OK Jazz, les Deux grandes écoles de la musique congolaise à l’indépendance. Roots of Rumba rock Congo classics 1953-1955 (Crammed 2006). Les origines de la rumba congolaise
Les années 70-80
Discographie
Afro latin via Kinshasa fusions musiques cubaines et africaines.(2011)
Franco, Tabu Ley ..les meilleurs orchestres congolais des années 60 et 70.
Congo 70 rumba rock (2008)
Suite du travail de réédition du label Syllart, album consacré à la rumba des années 70, quand arrive “l’électricité” et ce son qui envahira les pistes de danse de l’Afrique.
Franco et l’OK Jazz, Zaiko Langa Langa , les bantous de la Capitale ….. (à lire le texte du livret de F. Mazzoleni)
Compilations orchestres congolo zairois 1967 1968 1970 1974 (Sonodisc 1993)
Compilation orchestres zaïro congolais 1968 1976 (Sonodisc) (1993)
Compilation musique congolaise 1962-1973 (1998)
Les années 80-90
Variation de la rumba initiale, la danse soukouss (la secousse) impose ses déhanchements syncopés et le soukouss devient un terme qui définit la musique congolaise à partir des années 80 .
C’est le règne de “Papa Wemba”, très belle voix de falsetto, qui débute en 1972 dans l’Orchestre Belguid qui deviendra Zaïko Langa langa, “pépinière d’une seconde génération de la rumba qui abandonne les cuivres pour se concentrer sur les guitares…”. Plusieurs groupes comme Grand Zaïko Wawa, Langa Langa Stars. Puis en 76, il forme son orchestre “Viva la musica”. Il fonde Aussi la SAPE (Société des Ambianceurs et des Personnes Elégantes), et les concerts deviennent des concours d’élégance.
A écouter :
Papa wemba & viva la musica 1977 1997 (Stern’s)
La naissance de l’orchestre Viva La Musica et Papa Wemba
Et aussi :
La chanteur brazzavillois, Zao .
Pépé Kallé et son Empire Bakuba
Wenge Musica (années 90)
« Dans les années 2000, la rumba à l’ancienne connaît un regain d’intérêt grâce à des ensembles comme Kekele ou le Rumbanella Band. »
…et Koffi Olomidé…
Dans ces années 80-90 Koffi Olomidé à la voix langoureuse est une vedette. Il forme son orchestre Quartier latin.
A écouter :
Koffi
Toute la musique de Koffi Olomidé est sur 1d-touch
Quelques sites, livres et coffrets d’anthologie
Des sites
Un blog consacré aux musiques africaines et tropicales, de Stefan wedekker , en anglais. Sa page facebook actualisée.
une radio pour écouter pendant des heures des podcast des émissions radio.
Le site de Frank Bessem destiné à la promotion de la musique africaine, les pages sur la musique du Congo.
Biographies, et discographies complètes d’artistes et de groupes.
Afromix . Liste des artistes, brèves présentation et discographies.
Une structure « Univers Rumba congolaise » qui favorise des rencontres entre artistes, organise des expositions. Sur le site on trouve des biographies et des discographies.
Des livres
- L’épopée de la musique africaine
L’épopée de la musique africaine : / Florent Mazzoleni , les pages sur le Congo
Afro pop, l’âge d’or des grands orchestres africainsde Florent Mazzoleni :
les chapitres consacrés à l’ African jazz 1953-1983 à l’ OK jazz 1956-1989 et aux Bantous de la capitale Brazza 1959-2009
Musiques de toutes les Afriques de Gérald Arnaud et Henri Lecomte : le chapitre “Rumba & soukouss” (p. 336 à 360)
Cinquante ans de musique du Congo Zaïre 1920 1970 / Sylvain Bemba (1984)
La chanson congolaise / Pie Aubin Mabika (2009)
La musique africaine contemporaine » de Wolfgang Bender, le chapitre 2 : les pistes francophones p58 à 83
Histoire de la musique congolaise de Clément Ossinondé
Des Coffrets, anthologies, compilations
Afrique 50 ans de musique. Trois cd sont consacrés à l’Afrique centrale / et de grands succès sont ici rassemblés :
Grand Kalle – Independance Cha cha 1955
Tabu Ley – Mokoloko.nakokufa 1967
Docteur Nico – Tu m’as déçu chouchou 1968
Les Bantous de la capitale – makombo mibale 1968
Zaiko Langa Langa – Fievre mondo 1970 …
Franco – Mario (RDC) 1985 …
Sam Mangwana -Transberos 1989 …
Papa Wemba – Maman (RDC) 1995
Koffi Olomide – Loi (RDC) 1996 …..
Golden Afrique 02 highlights and rarities from the golden era of African pop music (1956-1982) the great days of rumba congolaise and early soukous (2005).
Volume consacré aux Congo, pour danser et revivre l’ambiance de la musique congolaise.
Kinshasa one two (2011)
« Les innombrables styles chorégraphiques et rythmiques qui ont enrichi la rumba depuis ses débuts sont le plus souvent des emprunts à la tradition ». (Kazadi wa Mukuna).
A découvrir aussi : les musiques traditionnelles
Le bassin du fleuve Congo-Zaïre est profondément marqué par les polyphonies pygmées
(« Aka » ou « Baka » du Nord, « Twa » de la Haute Sangha ou « M’Benga » du Sud).
Au nord du Congo-Brazza, la musique des Kaka, un peuple bantou, se rapproche de celle des Pygmées.
Les Batéké du Sud-ouest pratiquent la sanza tandis que les Bangala jouent du tambour mokoto.
A lire :
Musiques de toutes les Afriques de Gérald Arnaud et Henri Lecomte : le chapitre Les Congos (p 250-270, avec bibliographie et discographie)
un article-survol sur congo forum
Quelques disques :
Polyphonies Mongo. Ocora
Petites musiques du Zaïre. Buda records
Pygmées du haut Zaïre Kango Efe Asua. Fonti Musicali fmd
Cérémonie du Bobé musique des pygmées
Sikiliza rythmes et chants de la forêt Zaïre
A explorer :
Une « Anthologie de la musique congolaise (RDC) », en 11 volumes/ Henri Lecomte,. Chez Fonti Musicali fmd .
Voir l’article dans les Cahiers d’ethnomusicologie , 22 | 2009, 295-299.
[ Musique des Lunda du Katanga. Vol. 2. Songs of the Okapi Forest. Mbuti, Nande and Pakombe. Vol. 3. Musiques du pays des Mangbetu. Vol. 4. Musique des Salampasu Vol. 5. Musique des Tshokwe du Bandundu. Vol. 6. Musique des Kwese. Vol. 7. Musique des Kongo-Mbata. Vol. 8. Musique des Tetela. Présent dans notre catalogue Vol. 9. Musique des Leele Vol. 10. Musique de l’Ubangui. Vol. 11. Musique des Nkundo ]
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Super votre page de musique Africaine.
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