Pensée faible et déconstruction

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Gianni Vattimo, mort le 17 septembre 2023, était un des promoteurs de ce qu’il a appelé la « pensée faible ».

Gianni Vattimo
Gianni Vattimo

Ce philosophe italien engagé dans la vie de son temps, (homosexuel, chrétien, député européen, professeur, directeur de revues …) est aussi l’auteur d’une œuvre prolixe (dont plusieurs titres sont à découvrir à la BML), et controversée. Il y développe le concept de « pensée faible », prônant une philosophie ouverte, sortie de la métaphysique et des grands dogmes et privilégiant l’herméneutique. Ce qui n’est pas sans rappeler bien sûr la déconstruction, au cœur de nombreuses polémiques actuelles.

« En effet, la «pensée faible» s’exerce dans le creux laissé par la dissolution du «comité central» de la Raison, capable de rendre totalement compte de la réalité, l’éclipse des principes fondateurs intangibles, des valeurs absolues, des lois inéluctables de l’histoire, et devient l’apanage de l’homme postmoderne qui se doit de lire le monde sans arrogance ou agressivité, avec modestie, «crainte et tremblement», dirait Kierkegaard, parce que le monde est événement, mixte de langages historiques différents, dont il faut recueillir la trace par cette attitude d’accueil que Vattimo nomme pietas. De cette thématique, issue de l’héritage de Nietzsche et Heidegger, on retrouve évidemment les échos chez Lyotard, Ricoeur, Rorty ou Derrida. »

C’est à ne pas croire, Libération 4/03/2004, R. Maggiori

« Faisant jouer Nietzsche et Heidegger, et bien souvent l’un contre l’autre, Gianni Vattimo, avec Pier Aldo Rovatti, sera à l’origine d’un mouvement qui, en Italie, aura de profonds retentissements sur les débats intellectuels au cours des années 1980, et qui reprendra le titre d’un ouvrage collectif paru en 1983 : Il Pensiero debole (La Pensée faible). Les auteurs partent d’un constat : l’heure n’est plus aux « fondements » (la Vérité, l’être, Dieu, l’Homme…), il nous faut sortir de la modernité, c’est-à-dire tenter de « dépasser la métaphysique », afin de préparer les conditions d’une entrée dans une nouvelle époque, « postmoderne », encore à venir. »

Article Gianni Vattimo, Universalis

Voir aussi La pensée végétale : une philosophie de la vie des plantes, Michael Marder dont il signe l’avant-propos avec Santiago Zabala. Il y réactualise le concept en soulignant sa pertinence face à la crise environnementale.

Laurent de Sutter dans son nouveau livre Superfaible. Penser au XXIe siècle se revendique de cette pensée pour un dépassement de la critique.

Il  explique sa démarche dans Diacritik (23/09/2023) : Laurent de Sutter : « Qui n’est pas critique ne pense pas : cette maxime est encore la nôtre », ou sur le podcast Café philo du 22/09/2023.

Pour aller plus loin, quelques titres cités dans l’article ci-dessus :

Why Has Critique Run out of Steam? From Matters of Fact to Matters of Concern, Bruno Latour

Postcritique, sous la direction de Laurent de Sutter

Le règne de la critique, Reinhart Koselleck  (Recension dans le Publictionnaire)

L’art de la cuisine simple, Alice Waters

Et pour rebondir sur le débat autour de la déconstruction :

Le « wokisme », déconstruction d’une obsession française, par Nicolas Truong, un article du Monde (23/06/2023) consultable sur Europresse sur le site de la bibliothèque.

Mais qu’est-ce que la déconstruction ?, podcast Avec philosophie, France Culture

Le désert de la critique : déconstruction et politique, Renaud Garcia

Après la déconstruction : l’université au défi des idéologies : actes du colloque organisé en Sorbonne les 7 et 8 janvier 2022

Déconstruire, reconstruire : la querelle du woke, Philippe Forest

Qui a peur de la déconstruction ?, sous la direction d’Isabelle Alfandary, Anne-Emmanuelle Berger, Jacob Rogozinski.

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