Willem, rire du pire

Image à la loupe

Episode 2 : Hara-Kiri 1968

- temps de lecture approximatif de 1 minutes 1 min - Modifié le 06/01/2024 par Gadji

Un dessin réussi, « c’est comme un bon coup de poing dans la gueule » disait Cavanna . Mais pour en saisir toute la « substantifique moelle », il faut aussi prendre le temps de l’observer pour comprendre les motivations de son auteur, le contexte de sa réalisation, pour en dénicher les messages cachés, pour savourer le trait et ainsi mieux l’apprécier dans sa globalité. Dans le cadre de l’exposition Willem, rire du pire que vous pouvez visiter à la Bibliothèque de la Part Dieu jusqu’au 3 février 2024, nous proposons le décryptage d’une sélection de dessins, de Willem ou en résonnance avec son œuvre.

Dessin de Willem publié dans le Hara Kiri de septembre 1968

Ce dessin a été publié dans le journal Hara-Kiri en 1968. Réalisé à l’encre noire dans un style gravure à la plume, il représente trois avions de type militaire larguant par une trappe située dans le ventre de l’engin, une précieuse cargaison.

De longs et gigantesques seins pendent en dessous de l’avion, ballotant au vent.

Poursuivis par les bras levés suppliants d’un personnage sans traits vraisemblablement resté au sol, il est accompagné de deux silhouettes noires tout aussi faméliques que lui, l’une représentant un enfant titubant, l’autre un adulte rampant.

Sans pouvoir réellement contextualiser ce dessin ou savoir s’il évoquait un évènement particulier en ces années mouvementées, la revue étant mensuelle et s’intéressant très peu à des questions de faits d’actualité, on retrouve comme souvent en ces débuts de carrière de Willem en France, un dessin teinté de surréalisme graphiquement puissant, intemporel et éminemment politique, qui le démarque par sa sensibilité, sa violence et sa poésie, de ses camarades de la revue bête et méchante.

Cette illustration pourrait très bien s’appliquer à n’importe quelle guerre d’hier et d’aujourd’hui, détruisant les peuples, à dépeindre les convois humanitaires venant des pays même qui s’attachent à appauvrir les plus démunis tout en s’enrichissant des ventes d’armes, elle peut s’appliquer à n’importe quel pouvoir impérial ou colonial dont le sein nourricier est le même qui aliène et affame.

Par Iana-Lysandra Trombetta

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