De l’ombre à la lumière, le paysage des Archives
Publié le 17/09/2014 à 23:00 - 29 min - Modifié le 03/04/2018 par Tarteàlacrème
Le nouveau bâtiment des Archives départementales du Rhône est ouvert ! Au cœur de la Part-Dieu, il matérialise une rupture éclatante avec les clichés traditionnels qui enveloppent les archives : austérité, poussière, inutilité...
Auparavant réputées difficiles d’accès, elles n’attendent plus que patience et curiosité pour révéler leurs trésors. Les Archives départementales forment un réseau de services dont l’intérêt culturel est de plus en plus valorisé. Mais, archives départementales, archives municipales, centres d’archivage intercommunaux… pourquoi tant de lieux ? Il est parfois difficile de comprendre vers qui se diriger, où entamer ses recherches. Poussons les portes de ces lieux de patrimoine imprégnés de valeurs citoyennes, au croisement de la grande Histoire, du quotidien de tous et de la transmission “ad vitam aeternam”.
- L’effervescente intercommunalité
- Rhône-Alpes, une région mosaïque
- Les contours du Rhône
- La Ville de Lyon, une histoire ancienne
3. Un écrin pour les Archives du Rhône
Drôle de programme architectural…
Un signal dans la ville
- Le support des archives
- La collecte, un fleuve toujours alimenté
- Le classement, respecter les sources
5. Des paysages variés d’archives
Plonger dans les archives…
– départementales
– municipales
- Des pages d’histoire des familles
- Des empreintes d’histoire économique et sociale
- Les traces d’un bâtiment, d’un paysage
1. Archives, écrit et société
Les archives préservent la mémoire collective et individuelle mais permettent avant tout de faire valoir des preuves. Comme les bibliothèques, elles garantissent l’accès public au savoir. Dans la tradition française, ces deux institutions fortement liées à la culture de l’écrit cultivent pourtant des différences. Les bibliothèques conservent classiquement les documents de nature éditoriale : ce qui est porté à la connaissance de tous. Les Archives conservent au contraire les traces involontaires de l’existence des hommes par leurs activités (travail, état civil, justice…). Ce sont les sources premières de notre histoire. Cette divergence n’est pas question de période, mais de nature de documents : l’archiviste et le bibliothécaire n’exercent pas le même métier. Enfin, la logique archivistique est à rebours de la documentation, elle ne regroupe pas les documents par sujets, mais par institutions productrices d’archives.
Les notions de conservation d’actes, de preuves, sont au fondement de l’archive. La culture de l’écrit à valeur authentique provient d’Italie, pays de droit écrit. Pendant le haut Moyen âge en France, seuls les puissants font noter leurs droits fonciers et leurs privilèges. La fonction de notaire apparaît autour du 11e siècle en Italie et parvient dans le sud de la France vers le 13e s. Les hommes de pouvoir politique et/ou économique sont longtemps les seuls à posséder des archives, gardées dans des coffres. Elles sont alors un bien précieux et mobile, qui déménage en même temps que les hommes.
Lorsque l’organisation politique et administrative de la France se met en place, les archives deviennent indispensables à la légitimité du pouvoir. Au cœur de la société, elles suivent les mutations administratives nationales et locales. C’est pourquoi l’histoire des archives est inséparable de l’histoire des institutions politiques et administratives. Leur complexité est le reflet de l’histoire de notre administration. Elles ne fonctionnent pas en doublons mais en réseau calqué sur les territoires.
La consécration des archives comme bien public arrive après le souci de la conservation des actes. Leur consultation libre et organisée est plus tardive encore mais devient nécessaire à l’exercice de la démocratie. Enfin, lorsque des lieux de conservation seront prévus à leur endroit, l’espace restant disponible deviendra alors l’éternelle question.
2. Identités et territoire
Tel un objet archéologique, l’archive doit rester dans son contexte historique pour conserver sa valeur de témoignage. Par le principe de respect des fonds et grâce à l’inventaire (qui contient cote et description), elle reste attachée à l’organisation du service qui l’a produite.
Les archives sont le fruit de l’histoire des territoires et de leurs compétences. Dans leur ensemble, elles forment donc l’identité du territoire et des personnes qui y sont liées.
Chaque administration a un fonctionnement et des compétences qui lui sont propre. Les différents centres d’archives respectent donc un cadre de classement particulier, grandes lignes issues de leur administration. Pour faire des recherches en archives, il faut d’abord s’interroger sur l’administration qui a laissé les traces de l’activité recherchée. Plusieurs administrations peuvent se préoccuper d’une même activité, avec des responsabilités différentes.
Depuis 2007, deux réformes majeures ont conduit à de grands changements de gouvernance publique. La Révision Générale des Politiques Publiques (RGPP), commencée en 2007 est poursuivie depuis 2012 par la Modernisation de l’Action Publique (MAP).
Les Archives sont donc au cœur d’un paysage en plein bouleversement.
Dégageons les strates administratives de Rhône-Alpes, creusons l’identité de nos territoires…
« Les évolutions institutionnelles et conséquences sur le réseau des services d’archives français », La Gazette des Archives, n°229 2013-1, Geneviève Etienne
L’effervescente intercommunalité
La Courly, le Grand Lyon
En région lyonnaise, à la fin des années 1960, un syndicat à vocations multiples est créé : le S.I.V.M.A.L. (Syndicat Intercommunal à Vocation Multiple de l’Agglomération Lyonnaise). Il se préoccupe de l’eau, l’assainissement, les transports en commun, la voirie…
En 1966, la catastrophe pétrochimique de Feyzin démontre l’impératif besoin de s’organiser en intercommunalité. La COURLY naît le 1er janvier 1969 pour faire face aux risques et piloter des aménagements lourds (évacuation des déchets, inondations…). Certaines de ses communes sont retranchées des départements de l’Ain et de l’Isère.
La COURLY devient une réelle instance politique et non plus seulement administrative seulement dans les années 80. Les lois de décentralisations de 1982 donnent de la consistance aux agglomérations. En 1991, la COURLY prend le nom plus familier de Grand Lyon. Les vagues d’élargissement s’étalent dans les années 1960 et 2000.
…et Lyon Métropole
La réflexion autour de la métropole lyonnaise émerge d’abord sous le nom de « Lyon 2020 ». Avec 59 communes aujourd’hui, le Grand Lyon, qui devient Lyon Métropole au 1er janvier 2015, voit la commune de Quincieux entrer en 2014.
La loi « métropoles » (27 janvier 2014) distingue Lyon Métropole (tout comme celle de Marseille) des neuf autres (article 38). Il ne s’agit pas d’un EPCI (Etablissement Public de Coopération Intercommunal), mais d’une nouvelle collectivité. Lyon Métropole bénéficie d’une « clause de compétence générale ». Administrée par une assemblée élue au suffrage universel direct, elle prend sur son territoire les compétences jusqu’alors dévolues au Conseil général du Rhône. La répartition des budgets entre ces deux collectivités est en cours, sous l’égide de la Chambre régionale des Comptes.
Le secteur culturel, dont les archives font partie, est un secteur particulier de l’action publique. Il est très justement reconnu comme l’endroit d’une marge d’initiative des plus valorisantes. Elle demeure donc une compétence d’attribution partagée, que toutes les collectivités peuvent exercer, à condition de s’arranger contractuellement entre elles (notion de « chef de file »). Les services des archives de Lyon Métropole et des Archives départementales sont donc en cours d’évolution. Les archives historiques devraient être conservées aux Archives départementales.
Certaines collectivités ont commencé l’expérience de la mutualisation concernant leurs services d’archives. Au
Mans et Strasbourg, les partenariats sont établis entre des villes et des intercommunalités.
Parfois, il s’agit de mutualisation Archives / Bibliothèque autour de projets socioculturels, comme à Villeurbanne, avec Le Rize.
Sur l’échelle historique, les archives du Grand Lyon sont récentes, car elles commencent leur histoire en 1969. Leur richesse est pourtant très importante et complémentaire des fonds conservés aux Archives municipales : les débuts des TCL (alors OTL -compagnie des Omnibus et Tramways de Lyon-), la construction de la Part-Dieu, les grands projets comme le périphérique Nord…
Lire et relire la ville : colloque sur les archives de l’urbanisme organisé par le Grand Lyon, 2012
“Les archives départementales : une maison ouverte à tous”, Le Progrès, 12/09/2014
A propos de Lyon :
Points d’actu : Lyon Métropole et Histoire du Grand Lyon
Les modifications budgétaires :
Acteurs de l’Economie
La Gazette des communes, « Le Grand Lyon et le Rhône face au casse-tête financier de la métropole », 4 juillet 2014
Atlas historique du Grand Lyon : formes urbaines et paysages au fil du temps
De la COURLY au Grand Lyon
Pour aller plus loin :
La loi Métropoles sur “Vie publique”
Les 9 principales mesures de la loi métropoles, La Gazette des communes
Comprendre la loi Métropole avec l’Union Nationale des Acteurs et structures du DEveloppement Local (UNADEL
Rhône-Alpes, une région mosaïque
Savoie, Dauphiné, Lyonnais, autant d’anciennes provinces… Vivarais, Bugey, Bresse, Forez, autant de « pays » aux limites anciennes… En créant les départements, la Révolution française cherche à éliminer toute trace des territoires d’Ancien régime. L’histoire de la Région Rhône-Alpes commence seulement en 1972, sous la forme d’un Etablissement Public.
Le Dauphiné est rattaché à la France en 1349 par le traité de Romans et jusqu’en 1457, il conserve une forme d’indépendance.
En 1601 (traité de Lyon), Henri IV échange avec la Savoie le Marquisat de Saluces contre les Pays de l’Ain (Bugey, Bresse, Valromey, pays de Gex). C’est la fin des guerres entre France et Savoie et ces territoires sont alors rattachés à la généralité de Bourgogne. C’est pourquoi certaines archives médiévales (comptes de châtellenies) sont conservées à Dijon. La petite principauté de Dombes entre en France seulement en 1762. Les documents qui s’y rattachent sont conservés aux Archives Nationales (famille des Bourbons).
La particularité géographique de l’« enclave des Papes » est d’avoir été rattachée au Vaucluse et non à la Drôme, par le choix de ses habitants à la création des départements.
A la suite d’un plébiscite, la Savoie est annexée à la France en 1860 par Napoléon III. Celle-ci est partagée en deux départements : Savoie et Haute-Savoie.
Les départements de Rhône-Alpes sont enfin dessinés.
Les archives des Etats de Savoie concernant les départements français ont été rapatriées en 1957 d’Italie aux Archives départementales de Savoie. Mais les archives du fonctionnement de l’Etat savoyard demeurent à Turin.
Les lois de 1982-1983 sur la décentralisation transforment la Région en collectivité territoriale. Elle devient propriétaire et responsable de ses archives. Son assemblée délibérante est élue au suffrage universel direct à partir de 1986.
Malgré ce long patchwork, il existe une forme d’unité culturelle sur ce territoire si varié. En témoigne le franco-provençal, une langue régionale au sens plein… Aujourd’hui, la carte des régions est à nouveau en évolution. L’Auvergne est en passe de rejoindre Rhône-Alpes pour ne former qu’une super-région.
Les archives régionales conservent beaucoup de documents techniques, économiques et financiers. Elles sont peu connues du grand public car elles ne concernent pas directement l’histoire des familles.
Pour aller plus loin :
Les Rhônalpins et leurs langues : du latin de Lugdunum au français parlé aujourd’hui
La réforme de la région Rhône-Alpes vue par Rue89
Les contours du Rhône
Comme la plupart des départements français, le Rhône-et-Loire est créé en 1790. En revanche, il conserve presque la forme de la généralité de Lyon (Lyonnais, Beaujolais, Forez). Mais le 12 août 1793, à la suite du soulèvement de la ville de Lyon contre la Convention nationale, le département est partagé. L’objectif est de réduire l’influence de Lyon (la « contre-révolutionnaire ») sur les districts de Montbrison, Roanne et Saint-Etienne. Pour la même raison, la commune de la Guillotière est retirée du Rhône et rattachée à l’Isère. Le Rhône est réduit au Lyonnais et à la moitié Est du Beaujolais.
Au 19ème siècle, la commune de Villeurbanne souhaite être rattachée au Rhône (mais sans l’être à la commune de Lyon). De nombreux projets visent à agrandir le département qui semble trop petit pour l’importance de la ville de Lyon. Mais les projets échouent car ils visent à emporter bon nombre de communes de l’Isère. En 1852, l’empereur Napoléon III rattache la Guillotière, Villeurbanne, Vénissieux et Vaulx-en-Velin au Rhône.
Enfin, bien plus récemment, la commune de Colombier-Saugnieu est rattachée au Rhône (1971), en vue d’accueillir l’aéroport d’importance internationale (alors Satolas).
Histoire du Conseil général du Rhône (1945-1982) : de la Libération à la décentralisation
Histoire de Lyon et du Lyonnais, Jean-Pierre Gutton, 2000
Point d’actu : L’éphémère Rhône-et-Loire
La Ville de Lyon, une histoire ancienne
Jusqu’au 13ème siècle, la principauté de Lyon fait partie du Saint-Empire Romain-Germanique et est gouvernée par l’archevêque. Le roi de France Philippe le Bel se saisit des discordes entre les bourgeois et l’archevêque pour gagner le rattachement de la Ville de Lyon au Royaume en 1312.
Les bourgeois de Lyon ont soif de faire valoir leur poids économique et politique. Ce privilège ne leur sera donné que tardivement. Le poids du Roi de France oblige l’archevêque Pierre II de Savoie à consentir une charte de franchises aux lyonnais en 1320, la « Charte sapaudine » (de Sabaudia, Savoie). Ce document fonde l’existence de la commune de Lyon et amorce la capacité des bourgeois à gérer les affaires communes : c’est le début du Consulat. Dans cette charte, les consuls obtiennent le droit de conserver leurs archives. La charte est conservée aux Archives départementales du Rhône, suite à la confiscation des titres de l’archevêché à la Révolution.
Histoire de Lyon : des origines à nos jours
3. Un écrin pour les Archives du Rhône
Un bâtiment d’archives doit concilier deux missions contradictoires : conserver les documents de la manière la plus sécurisée possible et néanmoins inciter les lecteurs à passer la porte.
Sur la majeure partie du bâtiment, les fenêtres sont bannies. Curieux programme pour un architecte !
Pour la première fois de leur histoire, les Archives départementales du Rhône sont installées dans un grand bâtiment qui leur est dédié.
De nouveaux bâtiments d’archives modernistes ont déjà renouvelé l’image de l’institution. Le bâtiment de stockage des Archives nationales à Pierrefitte-sur-Seine (Massimiliano Fuksas) est recouvert d’aluminium, tandis que l’inox enveloppe le bâtiment des Archives départementales du Nord.
Drôle de programme architectural…
Aujourd’hui, les archivistes se situent à une transition majeure de leur profession, entre documents sur parchemin ou papier, supports magnétiques et numériques. Les documents peuvent être de petites ou grandes dimensions (cartes, plans…). Il faut prendre en compte la conservation de documents très hétérogènes.
Les changements d’environnement entraînent des altérations mécaniques, chimiques et biologiques. Les matériaux organiques réagissent en fonction de la température ambiante en absorbant ou en rejetant de l’humidité ; ils absorbent également les polluants. Le bâtiment doit donc réguler l’atmosphère interne par rapport aux variations extérieures.
Les collections elles-mêmes libèrent des polluants acides ou soufrés : papiers en fibre de bois produits entre 1860 et 1960, certains conditionnements (cartons classiques), collections photographiques et audiovisuelles. Ceci implique un renouvellement de l’air pour évacuer les particules.
Le Service Interministériel des Archives de France (SIAF) émet des préconisations concernant les bâtiments d’archives, afin de faciliter l’établissement des programmes de construction. Pendant longtemps, les conditions demandées étaient drastiques. L’atmosphère optimale ne pouvait être atteinte qu’avec des systèmes de climatisations (température : 18° + ou – 2° / hygrométrie 55 % + ou – 5 %). Mais le coût et la maintenance de ce type d’installations se sont révélés contraignants et les résultats parfois même néfastes pour les archives.
Le SIAF préconise aujourd’hui une atmosphère contrôlée, dont les variations peuvent être plus importantes, mais lentes et contenues dans des extrêmes (température 16° à 23°/ hygrométrie 45 % à 55%). Les variations maximales doivent être de 2° par semaine et d’1° par 24 heures ; 5% d’humidité relative par 24 heures. Le système de double-peau sans climatisation (deux enveloppes autour des magasins de stockage) est conseillé, sauf pour les fonds très spécifiques (photographies, fonds audiovisuels et numériques).
Le renouvellement de l’air est fondamental : 25% du volume par heure, le plus souvent réduit à 10% en période normale et modulable si nécessaire. L’air ambiant doit être brassé à environ trois volumes par heure.
Le SIAF souligne aujourd’hui le besoin d’organisation des circuits strictement séparés. On distingue ainsi :
les circuits des personnels : arrivée et traitement des documents (collecte, classement, conservation) ;
le circuit du public, constitué par la dernière mission des services d’archives : la communication. Il ne doit en aucun cas croiser les circuits précédents.
Un signal dans la ville
Le concours d’architectes est remporté en 2008 par l’architecte Bruno Dumétier (Dumetier Design) et Gautier+Conquet. L’agence toulousaine Séquences fait également partie du projet.
L’enveloppe interne qui abrite les magasins est une structure porteuse en béton dont les portées retombent tous les 10 mètres. La deuxième enveloppe est constituée de caissons d’acier doublés d’isolant et revêtus d’un bardage métallique. Entre les deux, un vide sanitaire d’une largeur de 70 cm (donc visitable) permet d’amener les flux nécessaires à l’aération des magasins et d’assurer une barrière thermique.
10% du volume de l’air ambiant est renouvelé par heure, de manière homogène. L’air passe dans le vide sanitaire pour éviter la condensation puis est filtré avant d’entrer dans les magasins. Un brassage par ventilation mécanique dans chaque magasin se fait à hauteur de trois volumes par heure.
Le bâtiment est ordonnancé selon les critères classiques : base, corps de bâtiment et étage d’attique. La base a été élevée en granit de Mongolie.
Sans fenêtre, les étages de magasins auraient pu sembler tristes et monotones, mais ont été traités de manière très subtile. Aucun décrochement, mais un parement de plaques métalliques embouties en alliage aluminium/cuivre vient donner jeu de lumière et relief. L’aspect lumineux ne ternira pas dans le temps.
Un double attique en verre, qui s’illumine la nuit, coiffe l’ensemble du bâtiment. Il abrite les bureaux, salles de tri et logements de fonction. La qualité d’environnement de travail est assurée.
Une salle destinée au stockage des archives numériques a été ménagée.
Un volume en retrait dédié à l’accueil et à la salle de lecture s’affranchit des contraintes de conservation des magasins. La luminosité naturelle est préservée dans cette partie.
Au final, la place du bâtiment dans la ville, sa sobriété formelle conjuguée à sa grande visibilité renouvellent fortement l’image de l’institution.
Pour aller plus loin :
Description technique du bâtiment
Le blog du déménagement des Archives départementales du Rhône
Le Courrier de l’Architecte
« Dorées sur tranche : les nouvelles archives départementales du Rhône à Lyon », Archistorm : l’architecture, l’art… de a à z, 1/07/2014
« Actualité », inArchiscopie, 21/06/2014
Le Projet Part-Dieu
4. Sur un socle commun
A la fois administratif et culturel, il s’agit donc d’un lieu où se « fabrique » le patrimoine, mais où tout ne le devient pas nécessairement.
Malgré de grandes disparités, les missions des services d’archives sont cependant toujours les mêmes : collecter, classer, conserver et communiquer les archives.
Le support des archives
On distingue deux types d’archives par leurs modes d’entrée. Les archives publiques collectées auprès des organismes publics, dénommés « versements ». Ceux-ci accroissent chaque année le kilométrage conservé de manière significative.
Les archives privées, que peuvent donner ou déposer les propriétaires privés, sans aucun caractère obligatoire. Elles sont collectées par les Archives départementales et municipales, en fonction de l’intérêt historique du fonds : entreprises, associations, syndicat…
Toutes les circulaires concernant la législation des archives émanent du Service Interministériel des Archives de France (Direction du Patrimoine, Ministère de la Culture).
Les premières lois de décentralisations (1983) transfèrent la gestion des archives départementales aux Conseils généraux et régionaux. Cette fonction demeurant régalienne par la même loi, l’Etat exerce le Contrôle Scientifique et Technique par la personne du directeur des Archives départementales. Celui-ci est placé sous l’autorité du Préfet et est couramment un conservateur d’Etat. Son contrôle s’exerce sur toutes les archives publiques produites dans le département :
administrations de l’État (préfecture et sous-préfectures, directions déconcentrées, administration judiciaire et pénitentiaire) ;
collectivités territoriales (conseil régional si département chef-lieu, conseil général, communes) ;
établissements publics ;
personnes privées chargées d’une mission de service public, officiers publics et ministériels (notaires…).
En pratique, cela signifie que le directeur des Archives départementales appose ou non son visa sur les bordereaux de versements et d’élimination de l’ensemble de ces services. Il peut également organiser une inspection destinée à vérifier la gestion des archives.
Il exerce une responsabilité majeure : la qualité des versements d’archives est un travail de tous les jours auprès des services (sensibilisation, assistance, confiance). De ces versements et du respect de la loi découle la qualité des sources des historiens de demain.
Pour aller plus loin : Code du Patrimoine
La collecte, un fleuve toujours alimenté
Aujourd’hui, la masse des documents produits est telle que la gestion des archives débute bien avant leur arrivée. Un archiviste est un professionnel de l’information, qui sait en évaluer la nature. Il apprend aux services à gérer les archives en amont de leur collecte, notamment pour garantir leur conservation selon les délais légaux. Ces derniers sont notamment fixés selon les circulaires du SIAF. Les versements s’accompagnent de bordereaux détaillant les documents. Ces inventaires sommaires sont mis à disposition des chercheurs en salle de lecture.
Les archives courantes désignent les documents conservés dans les bureaux des administrations, utiles au quotidien.
Les archives intermédiaires sont celles qui attendent leur sort, déterminé par la Durée d’Utilité Administrative (DUA). Certaines archives éliminées, d’autres sont échantillonnés, en respectant le cadre légal du SIAF. Aucun document permettant la justification d’un droit n’est éliminé.
Enfin, les archives historiques (définitives) sont les documents versés aux archives départementales, dont le tri a déjà été fait et conservés ad vitam aeternam.
Le classement : respecter les sources
Les Archives départementales et les Archives municipales ne reçoivent pas les mêmes documents. Leurs cadres de classement sont distincts l’un de l’autre, mais sont les mêmes dans toutes les villes et départements de France. Les deux cadres de classement utilisent les lettres de l’alphabet et ont été mis en place au cours des 19e et 20e siècles.
En Archives municipales, les lettres de l’alphabet distinguent les compétences qu’assure l’administration communale.
Les Archives départementales conservent des documents très hétérogènes, issus de l’Etat comme du département et d’autres institutions. Les lettres de l’alphabet regroupent donc de grandes familles de services publics.
En dessous de ces cadres de classement (lettre de l’alphabet), les plans de classement des fonds d’archives reflètent l’organisation de chaque administration (justice, etc…).
5. Des paysages variés d’archives
Plonger dans les archives…
Toutes les archives sont communiquées selon les délais fixées par la loi du 15 juillet 2008, déterminés afin de protéger la vie privée des personnes et la sûreté de l’Etat.
Les archives départementales et municipales sont sans doute les plus familières, car elles conservent une bonne part des sources utiles à l’histoire locale et des personnes. Elles sont bien souvent complémentaires, par les compétences différentes qui sont exercées sur leur territoire.
Les archives départementales
Les fonds conservés reflètent la géographie locale, fruit de l’histoire : rattachement plus ou moins tardif au Royaume de France, provinces anciennes…
Pendant la Grande Peur (été 1789), des archives seigneuriales sont volées, détruites.
Puis un mouvement de confiscation et nationalisation se fait jour : les documents sont rassemblés dans des dépôts. Les documents sont « triés » pour conserver les actes probatoires, les témoignages de l’histoire mais aussi détruire les vestiges monarchiques et de la féodalité.
Finalement, la loi du 5 Brumaire an V (26 octobre 1796) institue les Archives départementales, six ans après les Archives nationales. Elle ordonne le regroupement au chef-lieu du département des archives des administrations, tribunaux et organismes de l’Ancien Régime (missions régaliennes). On veut organiser la gestion des preuves et leur publicité.
Par la suite, au 19ème siècle, le développement de l’administration française les enrichit considérablement. Il s’agit des documents provenant des assemblées, administrations et établissements publics départementaux (Conseil général) et ceux provenant des services de l’État (juridictions, etc…) dans le département. S’ajoutent à cela les minutes, répertoires des notaires (officiers publics) et les dépôts de certaines communes.
A cette époque, seuls quelques archivistes classent les masses déjà considérables de documents. Dans le Rhône, des archivistes érudits, hauts fonctionnaires, Jean Prosper Gauthier, puis Marie-Claude Guigue travaillent à la mise en ordre des documents les plus anciens. C’est le début du sauvetage et de la prise de conscience des archives.
Mémoire en tous lieux : collections des Archives départementales du Rhône, 2002, Florence Beaume
Les archives municipales
Les Archives municipales ont également souvent subi des déménagements. Elles rassemblent les sources de toute l’activité municipale, de la vie quotidienne de ses habitants. Elles ne sont pas issues de confiscations et ne rassemblent donc pas des documents aussi hétérogènes que les archives départementales.
A Lyon, le plus ancien document conservé produit par l’administration municipale est le procès-verbal de l’élection des consuls, établi en 1294 pour l’année 1295. Les bourgeois manifestent par là déjà leur volonté de s’organiser, avant même 1320.
L’un des documents symboliques est bien sûr le registre de délibérations, dont le plus ancien conservé date de 1416.
Le fonds des Hospices civils de Lyon, conservés aux Archives municipales permet par exemple de rechercher les enfants abandonnés à la Charité de Lyon.
Aux Archives de Lyon, on peut également consulter les registres matricules des écoles élémentaires de Lyon, suite à un accord avec les Archives départementales du Rhône (car documents de l’Education Nationale).
Des archives et des hommes. Exposition, Lyon, Archives municipales, 2001, Céline Cadieu-Dumont
…et y puiser…
Des pages d’histoire des familles
Registres paroissiaux et d’état civil : jusqu’à 1667 (code Louis), les registres paroissiaux ne sont tenus qu’en un seul exemplaire. Les archives municipales conservent l’exemplaire original.
A partir de 1667, un double des registres paroissiaux est tenu au greffe du tribunal ; cet exemplaire est versé aux archives départementales (Série E). Tous les doubles des registres des communes sont rassemblés aux archives départementales. La recherche généalogique est facilitée dans le cas de mariages dans les communes alentour.
Certains registres uniques antérieurs à 1667 sont déposés par les communes aux Archives départementales (communes de moins de 2000 habitants).
Convois funéraires (Archives municipales de Lyon)
Archives notariales (archives départementales, série E) : contrats de mariage (mobilier des époux), contrats d’apprentissage, testaments…
Recensements de population (archives départementales série M puis W), organisés tous les 5 ans de 1861 à 1975 : composition des familles, métiers, mobilité des individus.
Registres matricules militaire (Archives départementales, Série R) : suivi du soldat à partir de sa conscription (instruction, batailles, médaille…) et Archives de l’Office National des Anciens Combattants.
Archives hospitalières : peuvent être versées en Archives départementales et municipales. Les archives des Hospices Civils de Lyon sont conservées aux archives municipales de Lyon. Les Archives départementales conservent celles des hôpitaux de Condrieu, L’Arbresle…
Pour aller plus loin :
Point d’Actu : sur les pas de nos ancêtres
Des empreintes d’histoire économique et sociale
Archives municipales : séries CC, DD, HH, F, G, L, M, N
Inventaires après décès (Archives départementales, Série E – archives notariales -) : recensement mobilier des foyers où décès laisse un enfant mineur ;
Baux (Archives départementales, Série E – archives notariales -) : exploitation agricole ;
Listes électorales (Archives départementales, série M) : en France, les femmes n’obtiennent ce droit qu’en 1944 ;
Justice (Archives départementales série B puis série U) ;
Registres du commerce (Archives départementales série U) : dépôt des marques de fabrique…
Les traces d’un bâtiment, d’un paysage
Plans parcellaires (Archives municipales de Lyon) : plan détaillés pour voirie et bâti ;
Permis de construire (Archives municipales, Série T ou 1 O) : documents qui apparaissent à partir de 1940 ;
Contrats de construction ou prix-fait (Archives départementales, Série E –Archives notariales-) : contrat entre maître d’œuvre et maître d’ouvrage, détails des matériaux et de leur mise en œuvre ;
Plans et matrices cadastrales (Série P) : levés dans chaque commune à partir de 1807 : toponymie, urbanisme, parcellaire, nature et exploitation des terres. Plan napoléonien, puis dit “rénové” ;
Travaux publics, transport, ouvrages d’art (Série S -Ponts-et-Chaussées puis W) : ponts, voies de chemin de fer, tramway, route, navigation
Eaux et Forêts (Archives départementales, séries M, P et W)
Et encore bien d’autres archives…
Les Chambres de Commerce et d’Industrie
Ces institutions sont des Etablissements Publics à Intérêt Industriel et Commercial (EPIC) : leurs archives relèvent du domaine public. Certaines chambres ont obtenu l’autonomie de gestion de leurs archives. Les archives départementales continuent cependant d’exercer le Contrôle Scientifique et Technique sur elles.
La Chambre de Commerce et d’Industrie de Lyon, créée en 1702, a son propre service d’archives. En justifiant d’une recherche, on peut y trouver des documents irremplaçables concernant l’histoire économique.
Les archives audiovisuelles
La délégation INA Centre-Est est en charge de la collecte et de la valorisation des fonds régionaux de l’audiovisuel public (antenne locale pour les régions Auvergne, Bourgogne, Franche-Comté et Rhône-Alpes, Lyon).
Site collaboratif de la Région Rhône-Alpes et de l’INA Centre-Est : Lumières sur Rhône-Alpes.
Pour aller plus loin
Arlette Farge, Le goût de l’archive, 1997
Sophie Coeuré, Les archives, 2011
Association des Archivistes Français, Abrégé d’archivistique : principes et pratiques du métier d’archiviste, 2012
“Sous la poussière”, la veille et les flux des Archiveilleurs
L’Association des Archivistes Français
Les questions posées sur le Guichet du Savoir
Enfants des Hospices civils ou de la Charité
Faire une recherche dans le cadastre
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