Exposition Yohji Yamamoto : « Toucher, essayer… SVP »

D’ordinaire dans un musée, toucher avec les yeux est le maître mot de la bonne conduite lors d’une visite. Pour l’exposition consacrée à l’un des couturiers les plus révolutionnaires de la mode contemporaine, présentée au Musée de la Mode d’Anvers (MoMU), cette consigne n’est pas d’usage : les visiteurs sont non seulement autorisés à toucher les vêtements du couturier mais également invités à les essayer. Une approche plus que tactile donc : quasi sensuelle. Intitulée « Dream Shop », cette exposition est le troisième et dernier volet d’un triptyque dont les deux premières parties furent présentées à Paris au Musée de la Mode et du Textile sous le titre « Juste des Vêtements » et à Florence au Palais Pitti. Parmi les 80 modèles présentés, des années 80 nos jours, une vingtaine peuvent donc être essayés… dans toutes les tailles. Démarche pour le moins déconcertante au départ pour le visiteur qui se risque timidement à toucher les vêtements. Puis, très vite, poussé par la magie du principe, les mains effleurent, ouvrent, déplient, tandis que les oreilles s’étonnent des bruissements du tissu. Mise en scène par Masao Nihei (metteur en scène des défilés de Yamamoto), cette approche donne au visiteur l’occasion de toucher, au sens propre comme figuré, au cœur du travail de Yojhi Yamamoto : la matière. Elle domine le reste si bien que la couleur est la plupart du temps absente de ses créations : le noir suffit. La matière avant tout, donc. Sa matière révélée, enfin. Enfin, puisque jusqu’à présent le créateur refusait les expositions car elles ne correspondaient pas à son principe du rapport au vêtement, « qu’il veut très direct et vivant » comme l’explique Nathalie Ours, coordinatrice des trois expositions. Toucher, essayer les vêtements de Yamamoto est également une véritable innovation scénographique dans l’histoire de la muséographie de la mode puisque jusqu’à présent le vêtement exposé était figé, distant, muet, inerte, aux antipodes de son usage premier.