Année Ingres 2006 : l'oeuvre revisitée
Publié le 15/09/2006 à 23:00
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8 min -
Modifié le 30/09/2022
par
Admin linflux
L’année Ingres 2006 fut marquée par trois expositions apportant un regard nouveau sur l’oeuvre d’Ingres. Les catalogues suivants ont été publiés pour chacune d’entre elles.

- Ingres
La Grande Baigneuse (détail), 1808 - (Musée du Louvre)
Ingres : 1780-1867 : exposition présentée à Paris au Musée du Louvre du 24 février au 15 mai 2006, commissaires Vincent POMAREDE, Stéphane GUEGAN, Louis-Antoine PRAT…, Musée du Louvre, 2006.
– Pour cette exposition phare, les 180 œuvres réunies, dont certaines inédites, proviennent de collections privées et publiques du monde entier. Aussi, l’ouvrage présente l’avantage de posséder des illustrations de très grande qualité et en grand nombre.
Le propos de l’exposition dépasse l’idée d’un artiste reclus dans son rêve de beauté pour nous le faire découvrir extrêment attentif au contexte politique et artistique contemporain.
Génie de la couleur, virtuose des teintes acides et raffinées, il est aussi un géant du dessin, à tel point que les auteurs le hissent au rang de Dürer, Holbein ou Raphaël. Ce catalogue se pose comme un des principaux ouvrages de référence sur Ingres, idéal pour découvir l’artiste et son oeuvre dans son ensemble.

- « Ingres antique »
- (Actes Sud)
Ingres et l’Antique : l’illusion grecque : expositions, Montauban, Musée Ingres, 15 juin-15 septembre 2006 ; Arles, Musée de l’Arles et de la Provence antiques, 2 octobre 2006 au 2 janvier 2007, par Pascale PICARD-CAJAN, Florence VIGUIER, Actes Sud, 2006.
– Exposition au concept novateur : il s’agit de présenter au public « physiquement » les vases grecs et les sculptures romaines qu’Ingres a possédés, a vu dans les musées ou connus grâce aux publications de l’époque, avec les dessins, esquisses et peintures définitives qu’il en a donné. Cette confrontation permet de restituer les rapports d’Ingres à l’art antique, essence même de son processus créatif. Deux années ont été nécessaires pour mettre en commun les recherches menées par le Louvre, le Musée de Montauban et le Musée d’Arles et de la Provence antiques. 400 pages aux illustrations remarquables pour rentrer dans l’intimité des modèles antiques d’Ingres.

- « Ingres : collages »
- (Le Passage)
Ingres collages : dessins d’Ingres du musée de Montauban : exposition présentée à Montauban au musée Ingres du 16 décembre 2005 au 2 avril 2006 ; à Strasbourg au musée des Beaux-Arts du 18 mai au 21 août 2006, commissaire Adrien GOETZ, Le Passage.
– Pour mettre en valeur la colossale collection des 4500 dessins d’Ingres du Musée de Montauban, celui-ci inaugure avec cet ouvrage une collection « carte blanche » : donner la parole à un auteur philosophe, écrivain, artiste, historien d’art, pour écrire un texte personnel sur cette œuvre dessinée. Adrien Goetz a choisi de s’intéresser à un aspect étonnant et jamais mis en valeur dans ce fonds : les collages, c’est-à-dire les œuvres graphiques composées de calques rapportés, de collages d’études sur d’autres études ou de rapprochements d’images en apparence disparates.
Outre l’originalité du sujet, cet ouvrage séduit par un ton plus sensible que celui d’un catalogue traditionnel d’exposition parfois un peu scientifique, sans pour autant perdre en rigueur d’analyse.
En complément de ces catalogues, deux ouvrages sont à signaler, tant pour mesurer l’influence d’Ingres sur ses successeurs, que pour découvrir une dimension de son œuvre jusqu’à présent très peu étudiée et pourtant si présente : l’érotisme.

- « Ingres
regards croisés » - (Réunion des
Musées Nationaux)
Ingres : regards croisés par Jean-Pierre CUZIN, Dimitri SALMON, Réunion des Musées Nationaux.
– Cet ouvrage permet de mesurer le caractère révolutionnaire de l’oeuvre d’Ingres puisque son influence sur les artistes de son temps et jusqu’à nos jours fut immense. Des peintres illustres comme Edgar Degas (1834-1917) ou encore Martial Raysse (1936-..) jusqu’aux photographes Man Ray (1890-1976) et Cindy Sherman (1954-..) lui ont rendu hommage. Sa postérité reste intacte : il est surprenant de constater le nombre d’artistes qui ont été inspirés par Ingres ; 400 pages ont été nécessaires pour les rassembler. Il y eut divers types d’influences sur ces successeurs : analogies, transpositions, clins d’oeil, copies ou hommages. Cette approche ambitieuse est très richement illustrée et constuite sur un propos de qualité tout en étant accessible à tout un chacun.

- « Ingres érotique »
- (Flammarion)
Ingres érotique par Stéphane GUEGAN, Flammarion.
– Etude sur la dimension érotique de l’oeuvre peinte et dessinée d’Ingres.
En 1967, José Cabanis publie et commente pour la première fois un fonds d’une quinzaine de dessins érotiques d’Ingres jusqu’alors qualifiés de « secret » puisque confiné dans les réserves du musée Montauban. C’est sur cette partie « cachée » de l’œuvre du peintre que Baudelaire désignait comme un « libertinage sérieux et plein de conviction » que Stéphane Guégan, commissaire de l’exposition Ingres au Louvre en 2006, revient dans cet ouvrage. On y découvre des images peu ou pas montrées, sur un papier velours, ce qui donne au sujet un charme supplémentaire. Ingres, c’est aussi un amour voluptueux pour la chair, miraculeusement à l’abri des aléas de l’existence, du temps, de l’histoire.
Pour aborder l’oeuvre d’Ingres sous d’autres latitudes, voici un roman et un recueil d’écrits de l’artiste parus en 2006.

- « Caroline
et Monsieur Ingres » - (Le Cri)
Caroline et Monsieur Ingres par Gaston COMPERE, Le Cri.
– Caroline Murat est la sœur de Napoléon. En 1814, Ingres fut appelé à la cour de Naples pour faire le portrait de cette femme à la personnalité affirmée, entière. C’est cette personnalité que le peintre a su retranscrire dans son œuvre, après avoir passé du temps en compagnie de son modèle. Dans cet ouvrage, l’auteur Gaston Compère fait vivre cette rencontre, réinvente les déambulations des deux êtres, des pentes du Vésuve aux rues de Paris. Pour cela, il a choisi deux narrateurs, deux regards : Henri Mazois, ami du peintre, puis Ingres en personne. Délicate, cette histoire inventée renvoie subtilement à l’intime et au processus de création d’Ingres.

- « Ecrits et propos
sur l’art - (Hermann)
Ecrits et propos sur l’art par Jean Auguste Dominique INGRES, Hermann.
-Ces écrits sont de précieux outils pour comprendre et envisager l’œuvre d’Ingres dans toute sa dynamique moderne comme il l’avoue dans la Lettre à Jean Forestier « Oui, l’art aurait bien besoin qu’on le réforme et je voudrais bien être ce révolutionnaire-là. Mais, patience, je ferai des pieds et des dents, que cela sera peut être un jour et j’y mets toute mon ambition » [1]. Il est toujours émouvant de pouvoir lire les mots d’un artiste, véritables sésames de la forme plastique. Un glossaire apporte un éclairage bienvenu pour saisir les détails du propos.
[1] *Lettre à Jean Forestier Rome, 23 novembre 1806, citée par H. Lapauze, « Le Roman d’amour de M. Ingres », Paris, 1910.
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