Femmes dans le monde arabe

- temps de lecture approximatif de 17 minutes 17 min - Modifié le 30/09/2022 par Admin linflux

Il y a d'abord eu Aliaa Magda Elmahdy, cette jeune bloggeuse égyptienne qui avait publié une photo d'elle nue en 2011 pour dénoncer l'hypocrisie autour de l'image de la femme dans le monde arabe. Elle est aujourd'hui réfugiée politique en Suède. Toujours en 2011, au moment des effervescences place Tahrir, la reporter Lara Logan de la CBS est violée sur la place par une foule d'hommes survoltés. Elle tiendra à témoigner pour sensibiliser l'opinion publique sur les violences subies par les femmes. Et puis, il y a Amina Sboui, lycéenne tunisienne de 19 ans, menacée de mort pour avoir posté des photos d'elle seins nus et arrêtée pour avoir écrit « Femen » sur le mur d'un cimetière.

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Les grandes perdantes de la révolution ?

Parce qu’elles étaient les plus émancipées du monde arabe, les femmes tunisiennes étaient au cœur des évènements de 2011. Aujourd’hui, leur mobilisation se maintient et pour cause : autrefois les plus libres du Maghreb, elles sont celles qui ont le plus à perdre.

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Le récit poignant de Meriem Ben Mohamed dans Coupable d’avoir été violée est à ce titre révélateur. Fin 2012, le viol d’une jeune tunisienne – surprise en compagnie de son fiancé dans une banlieue de Tunis – par trois policiers émeut tout le pays et la communauté internationale. A l’aide de la reporter Ava Djamshidi, l’auteur raconte le calvaire qu’elle a vécu et son combat pour obtenir justice alors même qu’elle se retrouve mise en accusation pour attentat à la pudeur ! Comment une femme victime devient-elle coupable aux yeux de l’État (la police), de la société (qui prend parti, et souvent pour les violeurs, arguant du fait qu’elle n’avait pas à être dehors tard le soir) et presque de sa propre famille ? Un témoignage révoltant.

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L’automne des femmes arabes, Djemila Benhabib
Cet ouvrage nous rappelle les deux batailles en cours pour l’avènement de véritables démocraties dans le monde arabe et musulman : la liberté des femmes et la séparation des pouvoirs politiques et religieux. Au printemps 2012, Djemila Benhabib fait plusieurs séjours au Caire et à Tunis. En Tunisie comme en Égypte, elle constate que les victoires électorales de l’islamisme politique mettent en péril des acquis laïques et progressistes obtenus de haute lutte par le passé. Pour l’auteur, il n’y a pas de doute : le statut des femmes est l’enjeu majeur des révolutions arabes.

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Les Arabes, les femmes, la liberté, Sophie Bessis
Peut-on être femme et libre dans le monde arabe ? Pourquoi les femmes y sont-elles astreintes à subir les effets d’une réclusion identitaire dans laquelle a sombré l’héritage réformiste de la première partie du siècle dernier ? Où sont passés les héritiers des réformateurs égyptiens du début du XXe siècle, ou d’un Bourguiba qui promulguait en 1956 une loi libérant les Tunisiennes ? On ne peut répondre à ces questions sans analyser les profondes mutations qu’ont connues depuis cinquante ans les sociétés arabes, et les désillusions provoquées par une modernisation mal engagée. Sans comprendre également les causes de la montée des islamismes, mouvements modernes mais qui proposent comme idéal à leurs sociétés le retour à une identité fondée sur la seule norme religieuse. Sophie Bessis, agrégée d’histoire, spécialiste des rapports Nord-Sud et de la question des femmes au Maghreb, analyse dans cet essai clair et concis les contradictions et les paradoxes du monde arabe, en particulier la condition des femmes.

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L’image de la femme au Maghreb, sous la direction de Khadija Mahsen-Finan
La femme est un prisme éloquent pour parler des sociétés du Maghreb, mais ce prisme est trop souvent déformant. L’image qui est construite par les médias au Maroc, par le cinéma en Tunisie, ou par la presse écrite en Algérie mérite qu’on l’interroge pour tenter d’y voir plus clair et comprendre ce qui se joue véritablement autour de la place des femmes dans ces pays et de la question taboue de la lutte des sexes dans la famille patriarcale. La question religieuse – celle du voile ou du terrorisme – a eu trop tendance à saturer le regard. Loin des approximations et des lieux communs, cet ouvrage va au plus près afin de décrypter comment les femmes vivent au Maghreb et quels sont les récits et les légendes qui fabriquent nos représentations.

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Femmes du Maghreb, une écriture à soi, Christine Détrez
Cet essai traite des conditions sociales des femmes écrivains au Maghreb. Dénonçant les injustices qu’elles rencontrent et qui restreignent leur rôle dans la société, l’auteur raconte leur résistance à travers une enquête sociologique ponctuée de nombreux entretiens et témoignages.

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Les algériennes contre le code de la famille, Feriel Lalami
Le Code de la famille symbolise en Algérie la discrimination à l’égard des femmes. Ce livre raconte la mobilisation des femmes pour l’égalité des sexes et la façon dont s’est structuré leur combat en fonction des bouleversements du pays : époque coloniale, lutte pour l’indépendance, régime autoritaire, et cycle de violences des années 1990. Un récit au plus près de la lutte des algériennes pour le changement de leur statut.

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Hakima Mounir, dans Entre ici et là-bas : le pouvoir des femmes dans les familles maghrébines, revient sur la représentation unitaire de la femme du Maghreb qui serait largement dépassée. Aujourd’hui, plusieurs sortes de femmes se côtoient : voilée ou non, laïques ou croyantes, instruites ou pas… L’auteure a mené 80 entretiens avec des femmes pour moitié salariées, et pour l’autre moitié, femmes au foyer. Elle aborde plusieurs questions : Comment ces femmes construisent-elles leur pouvoir au sein de la famille dans un système patriarcal ? Quelle en est sa nature et son étendue ? Quelles peuvent être les résistances ? Quels changements sont amenés par la modernité et la migration ? Une enquête échappant aux perspectives culturalistes qui témoignent de la lutte de pouvoir des femmes dans la sphère familiale.

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Il est clair pour la plupart de ces auteurs que l’émancipation de la femme dans le monde arabe n’est possible que s’il y a séparation de l’Église et de l’État. A l’image de Joumana Haddad qui désigne, dans Superman est arabe : de Dieu, du mariage, des machos et autres désastreuses inventions, l’islam et plus largement les trois religions monothéistes, comme responsables de l’oppression de la femme dans le monde arabe. « Même dédoublement de la personnalité, même prétention à incarner le sauveur, mêmes attitudes de macho, même illusion d’être invincible. » Voilà pourquoi Superman est arabe. Mêlant confidences, réflexions, traits d’humour et échappées poétiques, l’auteure, écrivaine et journaliste libanaise, dénonce avec verve et dérision le machisme institutionnalisé et sacralisé régnant dans les sociétés arabes. Un beau manifeste contre la culture patriarcale par une militante des droits des femmes et de la laïcité. Joumana Haddad anime une conférence-débat le vendredi 4 octobre à 18h30 à la Bibliothèque de la Part-dieu. Elle est fondatrice de Jasad, première revue érotique arabophone, et contribue à Rukh, mook trimestriel dédié au nouveau monde arabe.

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Toutefois, il ne faudrait pas croire que tous ceux qui se battent pour l’égalité des sexes partagent l’idée que « l’islam = oppression de la femme ». Il existe des féministes qui se battent pour les droits des femmes mais qui rejettent cette approche séculaire et universaliste. Loin des idées reçues sur la place de la femme dans l’islam, ces féministes islamiques prônent une lutte pour l’émancipation des femmes à l’intérieur du cadre de l’islam. Ces militants remettent en cause la grille de lecture patriarcale des textes religieux et vont se baser sur les notions de justice et d’égalité contenues dans les textes sacrés pour combattre les inégalités dont les femmes sont victimes.

Féminisme et islam

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Le statut des femmes dans le monde musulman a, ces dernières années, fait l’objet de multiples études et controverses, déchaînant les passions, exacerbant les fantasmes, consolidant des stéréotypes souvent déconnectés d’une réalité bien plus complexe.

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Existe-t-il un féminisme musulman ?, de la revue Islam et Laïcité, veut rendre compte d’une réalité moins connue : l’émergence de mouvements et de courants de pensée qui, tout en se battant pour l’égalité entre les sexes, se revendique, d’une manière ou d’une autre, de l’islam. Ce mouvement, très divers, que l’on appelle « féminisme musulman » a des ramifications internationales, des Etats-Unis à l’Afrique du Sud, de l’Europe à l’Asie. Il se mobilise contre le patriarcat et toutes les inégalités de genre, à partir de références musulmanes, mais aussi comme partie du mouvement mondial pour les droits des femmes. La question du rapport entre les religions, les femmes et le patriarcat n’est pas circonscrite à l’islam. Plusieurs textes abordent les raisons pour lesquelles les interprétations patriarcales ont souvent triomphé dans l’histoire religieuse et aussi la manière dont, dans le christianisme comme dans le judaïsme, d’autres points de vue se font jour.

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Compte tenu des dispositions du Coran, est-ce qu’il y a place pour l’égalité entre hommes et femmes dans l’islam ? Oui, selon le réformiste soudanais Mahmoud Mohamed Taha qui a consacré sa vie à promouvoir cette égalité non pas malgré le Coran, mais en raison même d’une compréhension renouvelée du Coran et de l’islam. Dans Egalité : hommes et femmes dans le Coran, Jean René Milot explore la pensée et l’action de ce théologien et homme politique qui se situe, pour l’auteur, dans la lignée des Gandhi et des Martin Luther King : ces défenseurs de la dignité humaine inspirés par une vision religieuse. L’œuvre de Taha est située dans le contexte global des relations entre islam, modernité et droits de la personne pour faire ressortir le caractère original et audacieux de son approche réformiste, d’abord présentée de façon globale dans ses principes de base et ensuite dans son application au cas spécifique de l’égalité entre hommes et femmes.

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Asma Lamrabet, dans Femmes et hommes dans le Coran : quelle égalité ?, rappelle également que ce n’est pas l’islam en tant que message spirituel qui opprime les femmes, mais bien les différentes interprétations et dispositions juridiques entérinées depuis des siècles par des idéologies savantes, qui, faute d’avoir été réformées, ont fini par supplanter le texte sacré, et se transformer en des lois religieuses immuables. Ce livre invite à un exercice de réflexion sur l’éthique relationnelle entre hommes et femmes, telle qu’elle est conçue par les sources scripturaires de l’islam. Il se veut une tentative de « déchiffrage » et de « discernement » de certains concepts coraniques en faveur de l’égalité entre hommes et femmes. Tout en se référant essentiellement à la dimension coranique, mais aussi à l’exemple prophétique, cette analyse ne perd jamais de vue l’ensemble des autres données sociopolitiques et culturelles en cours à ce moment de l’histoire. Il s’agit de revenir à l’essentiel du message spirituel de l’islam concernant les relations humaines, et de réfléchir sur les innombrables passages qui soulignent l’importance de la responsabilité partagée, du soutien mutuel, du respect convergent entre l’homme et la femme.
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Recueil d’articles et d’entretiens, Féminismes islamiques, de Zahra Ali, est un titre qui en fera sursauter beaucoup, y compris parmi celles et ceux qui se pensent à l’abri de tout préjugé. Ce livre montre que dans les pays où l’islam est la religion dominante, des croyantes peuvent lutter pour l’égalité, retourner les textes sacrés contre le patriarcat, et s’élever contre les autorités politiques et religieuses qui bafouent les droits des femmes. De l’Egypte à l’Iran, du Maroc à la Syrie, en France, aux États-Unis et jusqu’en Malaisie, des intellectuelles, des chercheuses et des militantes sont engagées dans une démarche féministe à l’intérieur du monde religieux musulman. Zahra Ali nous fait entendre leurs voix et propose ainsi de décoloniser le féminisme hégémonique. Inspirée du black feminism des États-Unis qui mettait l’accent sur les spécificités de la domination subie par les femmes afro-américaines, l’auteure rejette le modèle féministe occidental qui s’est imposé comme unique modèle d’émancipation. Mettant en avant le caractère « blanc et bourgeois du féminisme radical », elle milite pour une critique féministe postcoloniale qui tiendrait compte des spécificités culturelles.
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Les enjeux de la conciliation entre l’affirmation de valeurs universelles et le respect de la diversité culturelle font écho à certains débats récents en France. Dans Le féminisme change-t-il nos vies ?, Iulia Hasdeu revient sur l’affaire du voile en France lorsque des féministes françaises se sont érigées contre l’oppression des femmes musulmanes par la tradition patriarcale islamique. Accusées d’être indifférentes aux existences concrètes des immigrées ou descendants d’immigrés et d’inventer une figure stéréotypée de la femme victime ignorante, pauvre, inculte et soumise aux lois patriarcales et la religion, ces féministes se sont dès lors trouvées en situation de complicité avec le néocolonialisme. Un tel rapport paternaliste aurait laissé chez certaines femmes le sentiment de ne pas être prises en considération par les féministes blanches. Faut-il dès lors renoncer à un féminisme universaliste au profit d’une reconnaissance de la différence des cultures ?
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Dans Féminisme et multiculturalisme, Gily Coene et Chia Longman creusent d’avantage la question en revenant sur des thèmes tels que le foulard, les migrations par mariage, la répudiation, la polygamie, les mutilations génitales, les opérations de reconstruction de l’hymen ou les crimes d’honneur qui ne manquent généralement pas d’alimenter de grands débats sociétaux. Ce livre entend apporter une contribution critique aux controverses sociétales actuelles en cernant les problèmes que pose la conciliation des droits des femmes et du respect des traditions culturelles et religieuses. Il présente une sélection d’articles d’actualité qui illustrent les paradoxes du débat sur le féminisme et le multiculturalisme dans le contexte de l’Europe occidentale. Issus de disciplines différentes, les auteurs plaideront pour une attitude pragmatique et sensible au contexte, qui accorde une place centrale à la concertation et à la négociation interculturelle.
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Ce paradoxe est également abordé par Wassyla Tamzali dans Une femme en colère : lettre d’Alger aux Européens désabusés. Cette avocate, militante féministe algérienne, raconte la lutte des femmes de son pays dans les années 1960 lorsque tous les espoirs semblaient permis. Elle fait le point sur l’actualité du féminisme au Maghreb et en France et constate qu’aujourd’hui, au nom de la liberté individuelle, il est accepté d’aller à l’encontre des principes même du féminisme car s’attaquer aux formes d’oppression visant les femmes, c’est s’exposer à l’accusation de racisme. Sous couvert de tolérance et de diversité culturelle, les droits à la religion seraient ainsi favorisés au détriment des droits fondamentaux des femmes. Ardente partisane d’un féminisme laïc et universaliste, elle déplore l’image de la féministe rabat-joie antilibérale que les médias tentent de peindre et finit sur une note provocatrice : « Il est plus facile de se faire voir comme femme voilée que comme femme laïque et féministe. »
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La religion a donc décidément le don de fâcher, et à cet égard, l’ouvrage de l’historien Emmanuel Todd, Allah n’y est pour rien, constitue une analyse remarquable. Adoptant une lecture démographique et anthropologique de l’évolution des sociétés arabes (taux d’alphabétisation, baisse de fécondité, structure familiale…), l’auteur apporte un autre éclairage sur le sujet et permet d’analyser la situation des femmes en s’affranchissant du carcan religieux.
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En définitive, s’il est évident que la condition des femmes représente un enjeu majeur des révolutions arabes, la lutte pour l’égalité hommes-femmes participe d’un même élan universel. Le mensuel Alternatives économiques le souligne et consacre son hors série Le temps des femmes à dresser un état des lieux de la situation des femmes à travers le monde. Du combat pour la parité salariale en France jusqu’au phénomène de la sélection prénatale en Asie, les inégalités sont tenaces et les injustices nombreuses. Récemment, le viol collectif et l’assassinat d’une étudiante par quatre hommes en Inde n’ont pas manqué de soulever une vague d’indignation dans le monde entier. L’actualité est ainsi là pour nous rappeler l’universalité de ce combat.

A voir

  • Les femmes du bus 678, de Mohamed Diab.
    Fayza, Seba et Nelly, trois femmes d’aujourd’hui, de milieux différents, s’unissent pour combattre le machisme agressif et impuni qui sévit au Caire dans les rues, dans les bus et dans leurs maisons. Déterminées, elles vont dorénavant humilier ceux qui les humilient. Devant l’ampleur du mouvement, l’atypique inspecteur Essam mène l’enquête. Qui sont ces mystérieuses femmes qui ébranlent une société basée sur la suprématie de l’homme ?
  • Laïcité, inch’Allah ! de Nadia El Fani.
    Août 2010, en plein Ramadan sous Ben Ali et malgré la chape de plomb de la censure, Nadia El Fani filme une Tunisie qui semble ouverte au principe de liberté de conscience et à son rapport à l’Islam… Trois mois plus tard, la Révolution tunisienne éclate, Nadia est sur le terrain. Tandis que le Monde Arabe aborde une phase de changement radical, la Tunisie, ayant insufflé le vent de révolte, est à nouveau le pays laboratoire quant à sa vision de la religion. Et si pour une fois, par la volonté du peuple, un pays musulman optait pour une constitution laïque ? Alors, les Tunisiens auraient vraiment fait « La Révolution ». Un coup médiatique passionant et osé qui a valu à la réalisatrice, exilée pendant longtemps en France, une fatwa. Elle récidivera avec Même pas mal où elle racontera son combat contre les islamistes en pleine révolution tunisienne. Nadia El Fani a également réalisé avec Caroline Fourest Nos seins, Nos armes, un documentaire retraçant l’histoire du mouvement Femen.
  • Les femmes s’entêtent : féminisme, colonialisme, postcolonialisme et postmodernisme, conférence en deux parties donnée le 27 novembre 2010 à la Bibliothèque municipale de Lyon :

1ère partie : Afrique du nord, les représentations en situation coloniale et postcoloniale, avec Christelle Taraud, Sophie Bessis, Christine Detrez, et Nacira Guenif Souilamas.
La question du statut des femmes est un enjeu de société tout à fait central dans le débat sur la modernité politique et la postmodernité. C’est le cas en Occident mais aussi au Maghreb, au Machrek, en Iran… Cette question se pose-t-elle exactement de la même manière de part et d’autre de la Méditerranée ? Quelle est la part de l’histoire propre des différents pays, de la colonisation, la décolonisation, de la globalisation, de la permanence du projet hégémonique occidental, des réactions à ce projet ? Quelles conséquences peut-on retrouver dans le domaine des représentations ? Dans le contexte colonial, le corps indigène a été sexualisé et racialisé : dévirilisation, bestialisation pour les hommes ; érotisation pour les femmes ; c’est le temps de l’orientalisme. On est passé de l’idée du voilement à l’idée du dévoilement, du nu. Le corps masculin est aussi très présent. La figure du « prédateur sexuel » domine avec son pendant le « pédéraste efféminé ». Quels sont les prolongements postcoloniaux de ces questions et leurs enjeux ? Aujourd’hui, on voit émerger une reconstitution moderne de l’orientalisme au travers de l’image de la « beurette », terme connoté sexuellement négativement et on retrouve les stéréotypes avec la mise en avant des débats autour du port du voile et du machisme des garçons issus de l’immigration postcoloniale.

2ème partie : Etre féministe à l’époque du postcolonialisme et du postmodernisme, avec Wassyla Tamzali, Geneviève Fraisse, Chahla Chafiq, et Eleni Varikas.
Les « tournantes », le voile, les « qualités essentielles » et la virginité dans le mariage, la mixité dans les piscines publiques, la libre disposition de son corps… et plus globalement la place de la laïcité, de l’universalisme, du discours des Lumières, autant de sujets de vives polémiques dans la société française mais aussi entre les différents courants féministes. Les paradoxes se multiplient pour les féministes : comment concilier luttes contre le racisme, luttes sociales et économiques, luttes contre le sexisme ? Comment la remise en cause des « repères des Lumières » par le postmodernisme fragilise, complexifie le combat féministe ? Si les féministes dans leur ensemble se sentent remises en cause par ces transformations profondes, qu’en est-il plus particulièrement pour les Françaises de la deuxième et troisième génération ? Ces débats traversent bien sûr aussi les pays dits du sud, les courants féministes et altermondialistes.

A écouter

  • Conférence retransmise sur France Culture et consacrée aux rôles tenus par les femmes dans les sociétés arabes et pendant les révolutions, principalement en Tunisie, en Egypte et au Maroc : que seront leurs avenirs après les bouleversements survenus ? Avec Oumhani Alaoui, directrice de recherche, fondation OCP ; Sophie Bessis, historienne, essayiste, journaliste, secrétaire générale adjointe de la fédération internationale des droits de l’homme ; et Margot Badran, professeure, Georgetown University.

A consulter

  • Femmes sous lois musulmanes : réseau international de solidarité qui fournit des informations, de l’aide et un espace collectif aux femmes dont la vie est modelée, conditionnée ou gouvernée par les lois et les coutumes présentées comme étant islamiques.
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