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Usine Pernod Solaire à Dardilly

Photographe : Claude Essertel, 5 septembre 1990.

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Fer de lance du célèbre groupe de boissons anisées, l'usine innovante "Pernod Solaire" de Dardilly n'aura existé qu'une douzaine d'années jusqu'à sa fermeture en 1996.

Usine Pernod Solaire / Cl. Essertel, 5 sept. 1990 (BM Lyon, FIGRP02586).

En 1983, la société Pernod, fondée en 1805, est implantée à Bordeaux-Mérignac – sa première usine -, à Paris-Créteil, où elle a son siège social, à Marseille et à Lyon-Monplaisir. Elle produit à cette date quelques 23 millions de litres de Pastis “51”, 15 millions de litres de Suze et 5 millions de litres de Pernod “45” et commercialise au total 43 apéritifs et digestifs. La plus grosse production de la société à cette époque, le Pastis “51” (51 pour 1951, date de la création, et pour 5 volumes d’eau et un volume de Pastis), se différencie des autres boissons anisées par l’apport de réglisse dans sa composition. Malgré ses millions de litres et une bonne exportation, notamment en Angleterre, le Pastis est largement dominé par son concurrent, le Ricard. Le Pernod “51” et la Suze sont des produits anciens puisqu’ils ont été créés respectivement en 1807 et 1850. L’anis – base des produits Pernod – est extrait en partie de la badiane qui est cultivée en Extrême-Orient, et plus récemment du fenouil, une plante moins onéreuse.

Il est loin le temps où les premiers Français qui tentaient l’aventure du solaire en investissant dans un panneau et un chauffe-eau faisaient figure de pionniers. Au milieu des années 1980, l’utilisation du rayonnement solaire pour se chauffer, sans être encore généralisée, était malgré tout passée dans les moeurs, surtout dans les pays du Sud de la Loire. Moyen d’économiser l’énergie pour les familles, l’énergie solaire avait depuis tenté et les pouvoirs publics – témoin le lycée solaire dit de la plaine de l’Ain à Ambérieu-en-Bugey (1983) – et certains industriels toujours à l’affut de “trucs” pour abaisser leurs coûts de production. En 1979, la société Pernod prenait ainsi la décision d’intégrer le solaire dans un nouveau projet et, en mars 1983, elle abandonnait ses locaux de Monplaisir, dans le 8e arrondissement de Lyon, pour rejoindre son usine de Dardilly, nouveau siège de la direction régionale de Pernod à Lyon.

Usine Pernod Solaire / Cl. Essertel, 5 sept. 1990 (BM Lyon, FIGRP02586).

Installée sur cinq hectares, le long de l’autoroute A6, l’usine solaire Pernod offrait alors son plus beau profil aux automobilistes qui, chaque jour, empruntaient l’autoroute pour quitter Lyon ou rentrer dans la ville. Les bâtiments aux lignes contemporaines, avec ses façades en trapèze vitrées noir et ocre, furent conçus pas l’architecte Jean Willerval (1924-1996). L’usine Pernod solaire de Dardilly, inaugurée le 21 juin 1983, symboliquement le premier jour de l’été, par Laurent Fabius, ministre de l’Industrie, est un exemple particulièrement significatif. Il s’agissait en fait pour la Société Pernod de respecter son image de marque de société jeune et dynamique qui avait permis auparavant la construction des unités de Créteil et de Marseille, l’une et l’autre fleurons du patrimoine industriel français, mais aussi de faire baisser de 50% le poste chauffage du budget de la société. Pernod solaire constituait à l’époque la plus importante réalisation solaire européenne.

Au sein de cette société, on se plaisait ainsi à rappeler que d’ores et déjà un certain nombre d’innovations technologiques nées au cours de l’élaboration du projet de Lyon avait pu trouver des applications dans le domaine de l’habitat et du secteur tertiaire. C’était donc aussi un prototype. On retiendra en particulier les 1800 mètres carrés de panneaux solaires, mais surtout le stockage des calories excédentaires par l’intermédiaire d’un lit de parpaings solaires à circulation d’air, disposés en sous-sol et  fabriqués par la société Rey-Aglo de Grenoble. Ils étaient au nombre de 50.000 dans la chambre de stockage. Mais d’autres technologies étaient également utilisées tel que l’apport calorifique de serres, les pompes à chaleur et le stockage à haute température des calories électriques produites la nuit. A noter encore la gestion du système en fonction de la disponibilité du stock de chaleur, de son coût et de paramètres tels que l’occupation des locaux, la météo bien sûr, le tout étant assuré par deux ordinateurs maîtres d’automates programmables conçus spécialement par la société Gasquet de Bordeaux.

Usine Pernod Solaire (après arrêt d’exploitation) / D. Barrier, 15 oct. 1999 (BM Lyon, FIGRP11386).

L’usine Pernod solaire de Dardilly a fonctionné jusqu’au 13 juillet 1996. Fermé à la faveur d’une réorganisation de la production, elle est rachetée en octobre 1999 par le groupe Ikéa qui tente, non sans mal, d’ouvrir un second point de vente dans la région lyonnaise… La fronde des élus locaux de l’Ouest lyonnais aura raison de ce projet qui ne verra jamais le jour.

 

Bibliographie

“Pernod Solaire : l’usine de demain” / E.L. in Techniques de l’energie, no.47, mai 1981, p.51-52.

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