25 ans de radios libres
Publié le 16/11/2006 à 00:00
- 7 min -
Modifié le 30/09/2022
par
Admin linflux
L’ancêtre de la radio libre : la radio pirate
Jusqu’en 1981, les radios étaient contrôlées par l’Etat. Seules sont alors autorisées les radios de service public et quelques stations dites périphériques (Europe 1, RMC, RTL). L’information est partiellement sous le contrôle du gouvernement. Vers la fin des années 70, de nombreuses personnes commencent à souhaiter une alternative à ces programmes officiels. La bande FM inutilisée en France, et qui permet pourtant une bien meilleure qualité d’écoute que les grandes ondes, donne des idées à de nombreux pionniers qui créent des radios assiociatives ou communautaires. Ils émettent sans autorisation avec du matériel à bas coût installé sur les toits d’immeubles.
Les premières radios pirates naissent tôt : Radio Lille Campus en 1969, ou [actu]Radio Active[actu] à Lyon qui lutte en 1976 contre la construction de la centrale nucléaire de Creys Malville. Leur puissance d’émission est ridiculement faible et elles occupent des fréquences laissées libres. Elles sont de temps en temps brouillées pour le principe. La plus célèbre est britannique, Radio Caroline, et émet dès 1964 depuis un bateau circulant dans les eaux autour de l’Angleterre. Au bout de trois semaines d’émission, les sondages lui attribuent 10 millions d’auditeurs. Pour la toute première fois, on peut entendre 100 % de musique populaire sur les ondes.
Un coup médiatique a contribué à une prise de conscience par l’Etat de l’existence des radios pirates. Le 10 mars 1977, Brice Lalonde, candidat écologiste aux élections législatives, présente une vraie fausse radio pirate au journal d’Antenne 2 : [actu]Radio Verte[actu]. Il ne s’agit en fait que d’un trucage avec un magnétophone. Mais le 13 mai 1977, Radio Verte émet sa toute première émission clandestine, à partir de l’appartement de l’écrivain Jean-Edern Hallier à Paris. Brice Lalonde et Antoine Lefébure, leader du mouvement des radios libres
, sont au micro. La courte vie (à peine quelques jours) de Radio Verte fut consacrée au combat pour la liberté d’expression radiophonique, jusque-là accaparée par l’Etat.
Des radios pirates commencent à apparaître dans toute la France pour exprimer des contestations politiques et sociales. On quitte l’époque de la main-mise des radios étatiques pour une nouvelle ère de la radio de proximité aux multiples contenus. L’Etat dénonce le risque d’anarchie, fait brouiller les émissions clandestines et envoie la police saisir les émetteurs. De nombreuses protestations s’élèvent contre cette forme de censure, qui prive les associations de la possibilité de communiquer par leurs propres moyens (alors que la radio publique autorisée leur laisse une place insuffisante voire inexistante).
Ces protestations reçoivent l’appui du Parti Socialiste, notamment à l’approche des élections présidentielles. François Mitterrand, candidat face à Valéry Giscard d’Estaing, promet sur la radio clandestine [actu]Riposte[actu] de mettre fin au monopole d’Etat, ce qui lui vaut une mise en examen. Dès le lendemain de son élection, en 1981, les radios pirates se multiplient. C’est la période de l’essor des radios libres, totalement indépendantes de l’Etat, directement issues des radios pirates.
Des pirates aux commerçants
La loi du 29 juillet 1982, qui autorise les radios libres à émettre, brise définitivement le monopole. Les radios libres changent alors de nom et deviennent des radios locales privées (R.L.P.).
L’histoire de la bande FM connaît un autre tournant décisif en 1984 avec la légalisation de la publicité par la loi n°84-742. Les R.L.P peuvent désormais choisir entre deux statuts : garder une structure associative sans avoir recours à la publicité ou devenir commerciales. Celles qui conservent le statut associatif reçoivent une subvention d’Etat prélevée sur les recettes publicitaires. D’autres peuvent devenir des sociétés commerciales et former un maillon de l’économie. La possibilité de transformer les auditeurs en consommateurs attire les financiers de tous bords. Ces radios cherchent à plaire à leur public, mais surtout aux éventuels annonceurs. L’audience devient une marchandise.
Ces R.L.P entrent directement dans une logique commerciale concurrentielle. A la régulation par le gouvernement succède alors la régulation par le marché.
La plupart des stations FM indépendantes historiques disparaissent. Par exemple, Carbone 14, station parisienne des premières heures, refuse de se doter d’un agencement de programmes structuré et se saborde. Le public change, il veut des émissions plus régulières, plus de professionnalisme dans l’animation. A cause de leurs difficultés financières, de nombreuses R.L.P meurent ou se réunissent sous une bannière, devenant ainsi une maille d’un réseau. NRJ adapte le concept de franchise, connu dans la grande distribution, au monde de la FM.
En 1986, la loi Léotard autorise la constitution de réseaux commerciaux, qui auront le droit (en 1994) de couvrir jusqu’à 150 millions d’auditeurs potentiels avec leurs différentes stations.
Aujourd’hui, trois grands groupes privés se partagent les bénéfices de la FM, avec Radio France. Il reste 25% aux radios associatives.
Pour en savoir plus sur l’univers de la radio :
– L’histoire détaillée des radios locales privées
– Un annuaire de l’histoire passée et présente de la radio
– La Confédération Nationale des Radios Libres (CNRL)
– La Charte nationale des radios libres
– Un recensement détaillé des radios françaises et internationales
– FM : la folle histoire des radios libres / Annick Cojeau, Frank Eskenazi ; Grasset, 1986
– Les radios libres : Des radios pirates aux radios locales privées / François Cazenave ; PUF, 1984 (Que sais-je n°1867)
Quelques pionniers :
– Les débuts de Radio Verte et quelques autres
– Carbone 14, plus provoc’ que jamais
– Radio Zinzine, dans le Sud-Est
– Ici et maintenant à Paris
– Radio Bienvenue Strasbourg (RBS)
L’avenir des radios :
[actu]La radio numérique (DAB) :[actu]
– Association pour la promotion de la radio numérique
– Un article de Wikipédia
[actu]La baladodiffusion (ou podcasting)[actu]
– Le podcasting selon Wikipédia
– Une page de baladoémissions à écouter
– La baladodiffusion, comment ça marche ?
– Le podcast musical des Inrockuptibles
Partager cet article