Néoténie

- temps de lecture approximatif de 3 minutes 3 min - par Sabine Bachut

Néoténie, un joli mot pour désigner, en biologie humaine, la conservation de caractéristiques juvéniles chez l'adulte. Des caractéristiques qui influent fortement notre comportement social.

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Ce terme de néoténie humaine a été proposé par un biologiste, Louis Bolk, en 1926 lors d’un congrès d’anatomie. Il cherchait l’existence d’une caractéristique unique dans laquelle résiderait l’essence de l’homme. Cette caractéristique était la présence et la persistance de traits juvéniles chez les humains adultes.

Avec cette hypothèse, Bolk identifie plusieurs caractéristiques corporelles liées à la néoténie : le retrait de la mâchoire inférieure par rapport au visage, l’absence de pilosité, un poids élevé du cerveau par rapport au corps, une fontanelle qui perdure, l’orientation ventrale de l’orifice génital chez la femme, des structures de dents et de boîte crânienne… Ces caractéristiques correspondraient à une persistance d’états fœtaux.

Depuis Bolk, la thèse de la néoténie humaine a été reprise a de nombreuses occasions par des biologistes réputés, des philosophes et des éthologues.

On ne peut pas nier que l’homme conserve des caractéristiques juvéniles : grands yeux, grosse tête, pilosité qui se réduit. Les “singes nus” décrit par l’éthologiste Desmond Morris dans son livre, montre que nous ressemblons à des gros foetus de primate. Cependant, un caractère immatériel est aussi significatif de cet aspect néoténique, notre plasticité cérébrale et comportementale, l’individu est capable d’apprendre, d’acquérir des compétences quand on le change de situation.

On constate donc que les humains ont une capacité d’adaptation phénoménale. Et cette dernière ne résulte pas seulement de la puissance de notre gros cerveau, c’est aussi la capacité d’adaptation de notre cerveau, où les neurones et les connexions neuronales peuvent se modifier tout au long de la vie.

La néoténie concerne aussi des aspects de notre comportement, que nous aurions hérité de nos jeunes âges. Par exemple, le jeu, qui permet au départ à des jeunes enfants d’apprendre, d’interagir, de communiquer… et qui perdure aussi à l’âge adulte où nous continuons à pratiquer et aimer le jeu. De plus, l’humain, dans sa recherche scientifique, artistique, conserve une bonne part d’aspect ludique dans ses activités.

Un article de Pourlascience.fr : La néoténie humaine, une idée à relancer

Des explications à retrouver aussi autour de la néoténie appliquée aux traits du visage dans un article de Cerveau & psycho : Que révèle le visage ?

Concrètement, les expériences montrent qu’un visage adulte aux traits matures est jugé plus compétent qu’un visage adulte aux traits néoténiques. À l’inverse, le visage adulte à caractéristiques néoténiques est implicitement jugé plus sympathique et sincère. Ainsi, le visage adulte aux traits matures est doté de caractéristiques qui favorisent l’attirance et donnent l’impression de compétence. Le visage néoténique, quant à lui, est doté de caractéristiques juvéniles qui le font paraître moins compétent, mais plus sympathique, honnête et sincère.

En conséquence, l’attirance ne favorise l’impression de compétence qu’à la condition d’être associée à des caractéristiques matures. Elle favorise au contraire l’impression de sympathie si elle est associée à des caractéristiques néoténiques.

A retrouver aussi dans le livre : Psychologie des beaux et des moches sous la direction de Jean-François Marmion, dans nos rayons !

Et, pour finir, sur l’excellent site lecerveau.mcgill.ca : L’amour comme ciment social

Il y a au moins 5 ou 6 millions d’années, la lignée des primates qui allait donner naissance à Homo sapiens, c’est-à-dire nous, a commencé à maintenir de plus en plus longtemps des caractéristiques de l’enfance jusqu’à l’âge adulte. Ce phénomène, connu sous le nom de néoténie, a été observé au cours de l’évolution de plusieurs lignées animales. Mais dans la nôtre, il a pris une telle ampleur que ces caractéristiques nous accompagnent durant toute notre vie d’adulte. On pense par exemple à la grande plasticité cérébrale de notre cerveau ou encore aux traits infantiles du visage humain (surtout féminin).

Maturana et Verden-Zoller soulignent pour leur part à quel point la relation affective mère enfant revêt un caractère néoténique chez l’humain comparativement aux autres primates. Comment, en d’autres termes, la relation d’acceptation du corps de l’autre et de confiance mutuelle totale demeure chez l’humain toute la vie. Et c’est cette émotion amoureuse, au sens où l’entendent ces auteurs, qui aurait été un phénomène crucial ayant permis l’émergence des communautés humaines. L’agression et la compétition, qui jouent un grand rôle chez d’autres primates comme les chimpanzés, sont bien entendu présents dans les sociétés humaines mais ne seraient pas ce qui nous a permis de nous distinguer, justement, de nos plus proches cousins actuels.”

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