Qui dort à la rue ? 2/2
La lutte contre le sans-abrisme à Lyon
Publié le 29/09/2023 à 09:01 - 26 min - Modifié le 03/11/2023 par Clairette
Dans quelques mois sera célébré le 70e anniversaire de l’Appel de l’abbé Pierre de l’hiver 1954 qui impulsa un renouveau dans la prise en charge et les lieux d’accueil des sans-abri qui ressemblaient encore à des asiles de nuit de la fin du 19e. La création du Foyer Notre-Dame des Sans Abri (FNDSA) à Lyon arrive à cette charnière. L’aide sociale à l’hébergement est ensuite profondément rénovée avec la loi du 19 novembre 1974 qui reforme le fonctionnement des centres d'hébergement et élargit les catégories de bénéficiaires. Puis avec l’apparition médiatique au début des années 1980 de deux grandes figures sociales, "les nouveaux pauvres" et les "SDF", les centres d’hébergement d’urgence et de réinsertion sociale se multiplient, financés par les pouvoirs publics et gérés par les associations auxquelles l'État a délégué institutionnellement ces missions de logement et hébergement. Aujourd'hui, les lieux du secours et de l’assistance sont à la fois diversifiés, hiérarchisés et dispersés sur le territoire, aux mains d'acteurs multiples.
Au cours des dernières décennies du 20e siècle, les dispositifs ciblant les personnes sans abri (qu’elles soient catégorisées de « sans-asile », « vagabonds », « asociaux », « sans domicile fixe », « grands exclus », etc.) se sont traduits par des formes de plus en plus variées : centres d’hébergement de réinsertion sociale (CHRS), centres d’hébergement d’urgence (CHU), accueils de jour, pensions de famille, plateforme téléphonique 115, maraudes, services intégrés d’accueil et d’orientation (SIAO), hôtels sociaux, Un chez soi d’abord, etc.
Les dispositifs publics mis à disposition des sans-abri
Avec les lois de 1983 relatives à la répartition des compétences entre les communes, les départements, les régions et l’État (dispositif complété et renforcé par la loi no 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales), le département est devenu la collectivité publique détenant une compétence de droit commun en matière d’aide sociale légale (article L. 121-1 du Code de l’action sociale et des familles).
La commune conserve toutefois des attributions dans ce domaine. Elle exerce ses compétences en matière d’aide sociale facultative, grâce au centre communal d’action sociale (CCAS). Il intervient dans le cadre de l’aide sociale facultative (secours d’urgence, prêts sans intérêt, colis alimentaires…).
Ainsi si l’État déconcentré gère la distribution de places d’hébergement, la gestion des espaces publics au sein duquel stationnent ou s’installent parfois les sans-abri est assurée par la municipalité.
Devant l’augmentation du nombre de personnes sans domicile, corrélative de la progression du chômage et des inégalités, le problème social s’est mué en problème politique. Depuis 1982, les pouvoirs publics reconnaissent le logement comme un droit. De nombreuses réformes et lois cherchent à endiguer le phénomène :
- Loi Quillot du 22 juin 1982
- Loir Mermaz du 6 juillet 1989
- Loi Besson du 31 mai 1990
- Loi de lutte contre les exclusions du 29 juillet 1998
- Loi SRU (solidarité et renouvellement urbain) en 2000
- Loi du 5 mars 2007 (loi DALO – droit au logement opposable et droit à hébergement opposable)
Ces lois et leurs applications, en tant que réponses aux problèmes sociaux liés à l’extrême pauvreté et aux phénomènes d’exclusion, montrent une évolution du traitement de la question SDF : passage d’une politique de l’urgence sociale centrée sur la mise à l’abri des personnes sans domicile à l’émergence d’une nouvelle politique tournée vers l’accès au logement et l’hébergement, la politique dite du Logement d’abord. Cette dernière remet en question le processus classique de prise en charge en escalier, c’est à dire de l’hébergement sous ses multiples modalités : urgence, stabilisation, hébergement de réinsertion sociale jusqu’aux différentes.
Début des années 1990 se mettent en place les dispositifs d’urgence sociale destinés aux personnes les plus éloignées de la pris en charge assistantielle. À Paris, le Samu social est créée en 1993 ; suivront les dispositifs similaires dans les plus grandes villes de France. Ainsi de nouveaux dispositifs d’urgence sont venus compléter au sein des « veilles sociales » cette première initiative : hébergement d’urgence, nuits d’hôtel, lits de repos, soins d’urgence.
À LIRE : Les différents acteurs d’aide aux sans-abri. Interview de Maud BIGOT, directrice du Pôle Urgence au sein de l’association ALYNEA comprenant le SAMU Social69, mars 2919 / Millénaire3, Prospective de la métropole de Lyon
En 2008, une stratégie de refondation de la prise en charge des sans-abri a mis en avant la logique dite « logement d’abord ». Ainsi nait en France le droit au logement opposable (DALO) institué par une loi promulguée en 2007 qui permet aux personnes sans domicile de parvenir le plus tôt possible à un logement stable. Cette avancée fait suite à la mobilisation très médiatisée des Enfants de Don Quichotte autour du Canal Saint-Martin en décembre 2006, qui trouvera écho à Lyon place Bellecour.
Pour faire face à la crise migratoire, dans chaque département doit être mis en place à partir de 2010 un service pour gérer l’ensemble des places d’hébergement : le SIAO, Service Intégré de l’Accueil et de l’Orientation. Dans le Rhône, le SIAO est porté par le GIP « Maison de la veille sociale du Rhône » installé dans le 3e arrondissement de Lyon. Il centralise les demandes des personnes privées de domicile personnel et les oriente vers les places d’hébergement ou logement temporaire mises à disposition. Il œuvre pour permettre l’accès au logement personnel adapté le plus directement, et rapidement, possible suivant les principes du logement d’abord.
Le GIP Maison de la Veille Sociale (MVS) régule l’ensemble de l’offre d’hébergement d’insertion et de logement de transition (environ 2400 places) et, depuis septembre 2012, l’offre d’hébergement d’urgence gérée par le 115, nécessitant une coordination spécifique assurée par une référente « urgence ». Cette organisation garantit ainsi garantir une cohésion entre tous les acteurs de la Veille Sociale.
De son côté, Lyon Métropole Habitat travaille avec plus de 25 associations spécialisées dans l’hébergement d’urgence ou d’insertion par le logement sur la Métropole de Lyon.
En 2017, face à la poussée migratoire, le gouvernement Macron relance sa politique du logement d’abord » : plus de places en logement pérenne à bas coût et moins en hébergement d’urgence.
Après Villeurbanne en 2020 , c’est au tour de la Ville de Lyon de signer en octobre 2021 la déclaration des droits des personnes sans-abris portée par la Fondation Abbé Pierre, pour montrer sa volonté à s’engager pour aider les sans-abris, notamment en ouvrant de nouveaux lieux d’hébergement. À l’occasion de cette signature, Sandrine Runel, ajointe aux solidarités et à l’inclusion, affirmait que « Lyon compte 400 personnes qui vivraient dans la rue, et elles sont entre 2500 et 2800 dans la Métropole de Lyon ». Source : La Ville de Lyon s’engage pour les personnes sans-abri, sous l’œil de la fondation Abbé Pierre [article], Lyon Capitale, 12 octobre 2021
Les associations caritatives sur le terrain
L’organisation de l’assistance au sein d’une ville de grande taille offre une complémentarité de services. Outre les grandes associations nationales reconnues comme les Restos du cœur, l’Armée du salut, les Secours populaires et catholiques, Médecins du monde, de nombreuses petites associations caritatives locales liées à telle ou telle organisation religieuse ou laïque impriment leur marque, label déposé du passé culturel de la région.
À Lyon, c’est le Foyer Notre-Dame des Sans-Abri (FNDSA) qui polarise en grande partie l’urgence sociale depuis 1950. Créé par Gabriel Rosset-Boulon à partir d’un petit foyer lyonnais qui accueillait alors pas plus de trente personnes, l’institution assure aujourd’hui l’hébergement de plus de 7700 personnes et met à disposition jusqu’à 1960 places d’hébergement (chiffres 2022). L’organisation compte 1300 bénévoles et 300 salariés dont plus de 130 en insertion.
Ce gros Foyer dont la maison mère est installée depuis ses origines rue du père Chevrier dans le 7e arrondissement est une de principales œuvres caritatives lyonnaises avec de nombreux centres d’hébergement complémentaires, qui a une double facette sociale et religieuse.
À LIRE : Rapport d’activité 2022
Sa création en 1950 répond aux besoins de l’aide sociale (qui remplacera à partir de 1953 l’assistance publique) envers les plus démunis. C’est également à cette période que sera créé ATD Quart Monde dont les actions ne cessent de faire reconnaitre la cause du sous-prolétariat qui pour une grande majorité vit en bidonville, ceux que l’on nomme à l’époque, le « Quart monde ». L’association investit rapidement le secteur du logement social. Ce n’est que dans un second temps que les pouvoirs publics prendront le relais avec le développement à grand échelle des foyers pour migrants, des logements de transit et des HLM.
Le Foyer Notre-Dame des Sans-abri est créé par le père Rosset sur les bases d’un asile de nuit pour hommes seuls qui évoluera vers l’accueil des Nord-Africains, des femmes et des familles ; par la suite seront également construits des logements d’urgence et sociaux. À la mort de son fondateur en 1974, le Foyer proposait 1500 logements.
À VOIR : Gabriel Rosset [D.V.D.] : le coeur et l’ouvrage / réal. de Pierre Vella, 2018
Début des années 1990, suite à une crise structurelle, fonctionnelle et identitaire, l’association a dû trouver de nouveaux modes d’aide aux familles en grande urgence sociale, rénover l’asile de nuit, s’insérer dans les dispositifs de veille sociale, assurer la gestion du 115, faire face à un nombre croissant de sans-abri et inventer de nouvelles solutions au fil des besoins. Le caractère confessionnel a fait l’objet de débat au sein de la structure début 2000 mais pour autant aujourd’hui encore l’association se veut inspirée par l’esprit de charité et entretient des relations structurelles avec le Diocèse, sans être mouvement d’Église.
À LIRE : Le Foyer Notre-Dame des Sans-Abri fête ses 60 ans ! / article publié sur L’influx en mars 2010
Face à la crise du logement fin des années 1980 (ralentissement de la construction des grands ensembles, gentrification des centre-ville) , les associations tentent d’apporter des réponses : à Lyon, c’est la création d’Habitat et Humanisme en 1985 et au niveau national l’association Abbé Pierre pour le logement des défavorisés en 1987 qui deviendra en 1992 la Fondation Abbé Pierre, qui expérimentent de nouvelles formes de logement pour les plus démunis. L’année 1987 est d’ailleurs déclarée par l’ONU « année internationale du logement des sans-abris ».
À partir des années 1990, les associations caritatives ont aussi diversifié leurs modes d’intervention en allant davantage au devant des victimes de la pauvreté pour mieux les aider. C’est ainsi que se sont développées les maraudes avec des équipes qui quadrillent des points névralgiques de la ville et font un premier travail de veille, de tri, de régulation jusqu’à l’acheminement des personnes dans les centres d’hébergement et d’aide.
À Lyon, l’ensemble des dispositifs et des structures mises à disposition des personnes en grande précarité sur le territoire est répertorié et actualisé chaque année dans le guide de l’Urgence sociale édité par le CCAS de la ville.
Toutes les données du Guide de l’Urgence Sociale (GUS) sont également consultables en ligne sur la cartographie solidaire proposée par l’association Entourage.
Parmi les espaces d’hébergement ponctuel (à la nuitée) existant sur Lyon, on trouve, entre autres :
- Le Train de nuit structure d’hébergement d’urgence ouvert par Habitat et Humanisme Rhône dans le quartier de Perrache à partir de 1993
- la halte de nuit L’Escale créée par le FNDSA en 2018, propose une chambre individuelle et fermée accessible une nuit sur quatre pour des majeurs seuls ou en couple.
Parmi les espaces d’hébergement transitoire, on trouve :
- les studios d’hébergement Alynea
- les tiny houses comme Les Amazones du FNDSA à Lyon et Villeurbanne
- les tiny houses de La Base pour Le Mas à Villeurbanne.
À Francheville, un nouveau type de centre d’hébergement pour personnes en grande précarité s’est ouvert en 2021 dans l’ancien hôpital Antoine-Charial : « Les Grandes Voisines ». Les occupants du site sont aujourd’hui 475 à être hébergés dans 5 centres d’hébergement d’urgence qui accueillent des publics différents. Chaque service est composé d’un.e chef.fe de service et de plusieurs travailleurs sociaux qui accompagnent les résidents quotidiennement afin de favoriser l’intégration, la réinsertion sociale et professionnelle des personnes accueillies. Trois centres sont gérés par la Fondation de l’Armée Du Salut, tandis que deux le sont par le FNDSA. C’est ce qu’on appelle un tiers-lieu social et solidaire et les Grandes Voisines sont devenues le plus grand en France.
Tous ces réseaux institutionnels et caritatifs sont complétés par des réseaux individualisés de la survie : compagnons de galère et de route, membres de la famille, anciens copains de travail ou de bistrot.
Les actions spécifiques à destination des enfants
“Il n’y a jamais eu autant d’enfants dans la rue en France : fin août, le collectif des associations unies (fondation Abbé Pierre – Unicef et collectif Jamais sans toit) dénombrait 2323 enfants dont 568 de moins de 3 ans. Ce collectif demande aujourd’hui encore une vraie politique pluriannuelle de d’hébergement d’urgence et non plus des politiques à court terme qui s’avèrent souvent plus onéreuses. Les préfets ont appliqué les consignes (fermetures des logements d’urgence, destruction des bidonvilles, multiplication des expulsions locatives) dans un cadre de pénurie de places et de coupes budgétaires importantes“. Source : Journal du 30 août 2023 de 18h sur France Culture
À Lyon à la fin de l’été, le collectif Jamais sans Toit comptait 395 enfants à la rue, soit 3 fois plus que l’an dernier à la même date. Pour ce collectif, la solution d’urgence reste d’occuper les établissements scolaires et les gymnases pour mettre les enfants à l’abri la nuit et pour faire pression auprès des pouvoirs publics pour trouver des logements décents aux familles. Source : France TV Info, juillet 2023, “Il faut agir vite” : des dizaines de familles sans-abri logées dans un gymnase“
Et pourtant en arrivant à la tête de la mairie de Lyon en 2020, Grégory Doucet s’est engagé à ne laisser aucun enfant dormir à la rue en présentant dès l’hiver 2021 un plan Zéro enfant à la rue. Non-compétente directement sur le sujet, la Ville tente bon an mal an de proposer des solutions, comme la Métropole et l’Etat. Elles restent cependant insuffisantes pour reloger l’ensemble des familles précaires de Lyon et de l’agglomération.
À LIRE : Zéro enfant à la rue : le défi est-il tenable à Lyon ? / Rue89 Lyon, fevrier 2022
Ce problème des enfants à la rue mobilise sur l’agglomération lyonnaise depuis plusieurs années de nombreux habitants, enseignants, parents, qui sont venus en aide à des enfants scolarisés dans leurs écoles. C’est le cas de l’école Gilbert Dru au cœur du quartier de la Guillotière dont les actions ont été relatées dans le mensuel de bande dessinée Les rues de Lyon ° 12, décembre 2015 : Gilbert Dru, école en résistance [témoignage] / par Anne-Claire Thibaut-Jouvray & Jérôme Jouvray ; directeur de la publication Olivier Jouvray ; rédactrice en chef Morgane Velten, 2015
S’inspirant du travail du collectif Jamais sans Toit à Lyon, un réseau national de soutien aux élèves sans abris intitulé Elèves sans toit a vu le jour en 2022 avec la FCPE et le Collectif des Associations Unies.
Les actions spécifiques à destination des femmes
Bien que la première association dédiée aux femmes SDF soit née à Grenoble à la fin de l’année 2000, les accueils dédiés aux femmes sont majoritairement ancrés en région parisienne. Même si des initiatives ont fleuri dans d’autres métropoles, suite notamment aux résultats de l’enquête de l’INSEE en 2012 qui annonçait que près de 40% des personnes SDF étaient des femmes, très peu sont des hébergements spécifiquement féminins, ou alors cela concerne les femmes victimes de violence, ce qui est une problématique différente. Pour multiplier ces initiatives, l’association Femmes SDF travaille sur un projet de mise en réseau afin de permettre un «échange des pratiques, des fonctionnements, faire remonter le vécu des femmes, les besoins non couverts et soutenir la création d’autres lieux».
Cette association constate que la majorité des femmes à la rue ne sont aujourd’hui plus demandeuses au 115, du fait de «mauvaises expériences vécues précédemment» dans les centres mixtes. En octobre 2019, un rapport de la Fondation des femmes avait étudié la situation des femmes dans les Centres d’Hébergement d’urgence mixtes et formulé des propositions pour leur amélioration. Parmi celles-ci : «développer des espaces et des temps collectifs non-mixtes» et une meilleure «sécurisation des accès extérieurs des CHU».
À Lyon depuis quelques années, plusieurs lieux d’accueil dédié aux femmes SDF ont été créés tels que Les petites pierres, premier lieu non mixte de la métropole de Lyon dédié au bien-être des femmes victimes de précarité, de violences ou d’isolement, non accompagnés d’enfants, qui a ouvert ses portes en juillet 2020 dans le 6e arrondissement grâce à l’association Au Tambour.
Pour les femmes SDF accompagnées d’enfants, davantage de lieux d’accueil existent comme L’effet Mères dans le 2e arrondissement.
À LIRE : Les femmes sans logement / Compte-rendu de la 7e plateforme Logement d’abord réalisée sur le territoire du Grand Lyon en 2020
Les actions spécifiques à destination des migrants
La question des SDF et celle des sans-papiers sont davantage liées dans notre monde contemporain et dans l’espace européen.
Dans la région lyonnaise, c’est l’association Forum réfugiés qui gère un nombre important de centres d’hébergement tous intégrés au schéma national d’accueil des demandeurs d’asile et d’intégration des réfugiés. Elle propose également un accompagnement social et médical et le suivi juridique et administratif aux candidats à l’asile dans ses Centres d’Accueil de Demandeurs d’Asile (CADA).
Les actions spécifiques à destination des seniors
L’association Alynea qui porte le Samu social 69 projette de créer d’ici 2025 “Le refuge des Aînés”, un habitat groupé de 20 places pour ces personnes en grande précarité. Une première sur le territoire de la Métropole de Lyon qui s’inspire du Patio de Grézieu-la-Varenne géré par les Petits Frères des Pauvres. Il sera installé à la place d’un Ehpad du quartier villeurbannais de Grandclément. Source : Un refuge pour les SDF vieillissants / Tribune de Lyon n°934, 2 novembre 2023
Au printemps 2023, la ville de Lyon annonçait un plan d’action hospitalité 2022-2026 visant à faciliter l’accueil et l’intégration des migrants à Lyon en prévoyant la mise en place de moyens structurels, administratifs, sanitaires et culturels.
Le plan comprend une cinquantaine d’initiatives, dont dès cette année, du 4 au 10 novembre, l’organisation d’une biennale de l’hospitalité pour promouvoir les associations d’accueil et surtout l’ouverture d’une maison de l’hospitalité en 2024 avec une programmation d’ateliers culturels et des cours de français pour les migrants.
Les organismes qui étudient la grande pauvreté
Dans notre région existe un observatoire sans équivalent en France, installé dans le 5e arrondissement de Lyon :
la mission régionale d’information sur l’exclusion en AURA (MRIE), association qui produit des connaissances sur les sujets liés à la grande pauvreté. Les personnes directement concernées sont intégrées à la recherche. À ce jour la MRIE a produit 170 rapports en accès gratuit sur son site. Cette diffusion de la connaissance est essentielle pour lutter collectivement contre l’exclusion.
Plus connue par le grand public, la Fondation Abbé Pierre mène de nombreuses études et présente chaque année son éclairage régional sur l’état du mal-logement : voir celui de 2022 pour la région Auvergne-Rhône-Alpes.
À Lyon, la Fondation Abbé Pierre Auvergne-Rhône-Alpes mène depuis 2019, avec le Collectif de photographes ITEM, le projet HAB[R]ITER : il s’agit d’une série de reportages photographiques et documentaires qui visent à rendre visibles les situations et conditions de vie des mal-logés sur les différents territoires.
À DÉCOUVRIR : un troisième reportage-photographique vient d’être publié ” «Loger les plus exclus, quand les citoyens s’en mêlent ». Il présente 6 collectifs de citoyens rencontrés à Valence (Sorosa), Saint-Étienne (La Maison solidaire), Lyon (Jamais sans Toit), Bourg-en-Bresse (Cent pour un Toit) , Grenoble (L’ouvre-porte) et Lans-en-Vercors (Les Vertaccueillants).
Conclusion
Bien que la politique d’urgence sociale se soit institutionnalisée, elle reste en partie une politique du thermomètre. L’inconditionnalité de l’accueil demeure un principe intangible dans la pratique ; toutefois elle est souvent difficile à tenir faute de places, en raison du comportement très violent désocialisé de certains hôtes et à cause de la chasse faite aux sans–papiers.
RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES
- Crise du logement, crise de l’accueil : défis sociaux de l’habitat dans la France des années 2020 / sous la direction de Camille Gardesse et Jean-Claude Driant, 2023
- Séniors de la rue : ethnographie du monde de la grande exclusion / Lionel Saporiti ; préface de David Le Breton, 2019
- L’hébergement social des SDF : ethnographie de l’expérience vécue des hébergés / David Grand , 2016
- Au temps du sans-abrisme. Enquêtes de terrain et problème public, Saint-Étienne, Presses Universitaires de Saint-Étienne / coordonné par Pascale Pichon, Claudia Girola, Élodie Jouve, 2016
- La question SDF / Julien Damon, 2012
- Vivre dans la rue : sociologie des sans domicile fixe / Pascale Pichon, 2010
- Les naufragés : avec les clochards de Paris / Patrick Declerck, 2005
- Vivre dans la rue : sociologie des sans domicile fixe / Pascale Pichon, 2007
- Mémoires de rue : portraits de personnes de la rue à Lyon, au gré des aléas du temps et de la vie / Association Partenariat et citoyenneté, 2020
- Géographie urbaine de l’exclusion dans les grandes métropoles régionales françaises / Gérard-François Dumont ; avec la collaboration de Laurent Chalard, Julien Nespola et Population & Avenir, 2011
- Le principe de réalité : dans le labyrinthe de l’aide sociale / Sophie Chabanel, 2007
- Sur les traces des sans-abri. Le cas exemplaire de Joan [dossier] / Sophie Rouay-Lambert, Espaces et sociétés 2004/1-2 (n° 116-117), pages 29 à 45
Des témoignages et des œuvres littéraires, cinématographiques, photographiques qui s’inspirent d’histoires de SDF et parlent de leurs conditions de vie :
- Le peuple de l’abîme / Jack London, Paris UGE, 1975 : c’est au terme de son expérience durant laquelle il partage pendant deux mois la vie des sans-abris dans les bas-fonds de Londres au début du XXe siècle que Jack London écrit ce récit- témoignage
- Dans la dèche à Paris et à Londres / George Orwell ; traduit de l’anglais par Michel Pétris, Paris : 10-18, 200 : c’est le récit des années de débine de l’auteur dans les années 30 à Paris puis à Londres où il côtoie la misère
- Môôôsieur Philippe : fragments de vie avant le sans-abrisme [suivi de] Sociologie de l’exclusion / [Philippe Le Cloerec, Marie Loison-Leruste] ; [illustrations, Berk Sent], 2021
- Maraudes littéraires / Sophie Chabanel, 2021
- Ceux des quais / Nathalie Bianco, 2022
- A la pointe / Pierric Bailly, Musée des Confluences-Cambourakis – collection Récits d’objets, 2021
- Morts sans Toi(t) : [exposition, Lyon, Hôtel-de-Ville, 2012] / Julien Adelaere
- Journal d’un SDF : ethnofiction / Marc Augé, 2011
- Sans toit ni loi, 1985 [D.V.D.] (suivi de) Les glaneurs et la glaneuse (suivi de) Deux ans après / réal. & scénario d’Agnes Varda ; mus. de Joanna Bruzdowicz ; disponible en VOD
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- 330 000 personnes sans domicile : un scandale français / Alternatives économiques, fev 2023
- SDF : la politique du « logement d’abord » cherche un second souffle, cinq ans après son lancement / Le Monde, mars 2023
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