Musique et poésie

Théophile Gautier et la musique

- temps de lecture approximatif de 3 minutes 3 min - par Civodul

Théophile Gautier, que l'on connait comme romancier, poète et critique a toujours entretenu des rapports privilégiés avec le monde musical. Ses poèmes comptent parmi les oeuvres le plus souvent mises en musique.

Théophile Gautier photographié par l
Théophile Gautier photographié par l'Atelier Nadar, circa 1860 - source : Gallica-BnF

Né dans une famille mélomane Théophile Gautier est très tôt sensibilisé à la musique. Dans son enfance il assiste à des représentations d’opéras qui le marqueront. Lui même pianiste amateur, il compte parmi ses amis et relations Meyerbeer, Liszt, Berlioz …  Des liens de parenté lui offrent la proximité de deux familles de musiciens célèbres : les Devriès, d’origine hollandaise d’une part et les Grisi, d’origine italienne d’autre part. Il entretient, sans toutefois l’épouser, une relation suivie avec la contralto Ernesta Grisi, qui lui donnera deux filles, elles mêmes en relation avec le monde musical. Gautier écrit de nombreuses critiques musicales et signe l’argument du ballet Gisèle, l’une des pièces maîtresses du répertoire du XIXème siècle. Quelques uns de ses romans inspireront des livrets d’opéras : ainsi le Capitaine Fracasse, sur un poème de Catulle Mendès et une musique d’Emile Pessard, ou une nuit de Cléopâtre, sur un livret de Jules Barbier et une musique de Victor Massé. Nombreux et même innombrables, enfin,  sont ses poèmes mis en musique par les plus grands compositeurs : Berlioz (les Nuits d’été), Fauré (tristesse, les matelots), Chausson (les papillons), pour n’en citer que quelques uns.  Le remarquable travail de François Henry : Théophile Gautier en musique. Inventaire des musiques composées sur des textes de Théophile Gautier rassemble une somme de références absolument impressionnante, des compositeurs les plus célèbres aux noms les plus obscurs, français et étrangers, de l’époque de Gautier à nos jours.

Voici 4 versions du poème “Barcarolle”, extrait du recueil la Comédie de la Mort.

Dites, la jeune belle !
Où voulez-vous aller ?
La voile ouvre son aile,
La brise va souffler !

L’aviron est d’ivoire,
Le pavillon de moire,
Le gouvernail d’or fin ;
J’ai pour lest une orange,
Pour voile une aile d’ange,
Pour mousse un séraphin.

Dites, la jeune belle !
Où voulez-vous aller ?
La voile ouvre son aile,
La brise va souffler !

Est-ce dans la Baltique,
Sur la mer Pacifique,
Dans l’île de Java ?
Ou bien dans la Norvège,
Cueillir la fleur de neige,
Ou la fleur d’Angsoka ?

Dites, la jeune belle !
Où voulez-vous aller ?
La voile ouvre son aile,
La brise va souffler !

— Menez-moi, dit la belle,
À la rive fidèle
Où l’on aime toujours.
— Cette rive, ma chère,
On ne la connaît guère
Au pays des amours.”

 

  • Les Nuits d’été constituent un ensemble de six mélodies d’Hector Berlioz sur des poèmes de Théophile Gautier du recueil La Comédie de la mort paru en 1838.  Composées vers 1840, publiées en septembre 1841,  ces mélodies sont d’abord destinées à une voix de mezzo-soprano ou de ténor.  Berlioz en livre ensuite une version orchestrée : voici l’ile inconnue (barcarolle) dans cette version, interprétée par la capiteuse mezzo-soprano Bernarda Fink :

 

https://www.youtube.com/watch?v=oc_FmOgnXMY

  • A présent la charmante version de Charles Gounod, pour voix et piano, avec une mezzo sémillante, quoiqu’un peu inattendue et carrément barbue (David Daniels, contre-ténor) :

 

  • Le texte a également inspiré Offenbach.  Version moins raffinée musicalement certes, mais le côté viril-un-peu-bourrin rend la chute (un peu vache) du poème d’autant plus crédible. Ici le baryton canadien Bruno Laplante :

 

  • La version la moins connue, but not least,  est probablement celle d’Alfred Bruneau, musicien et chef d’orchestre français (1857-1934). Ami d’Emile Zola, il fut un des promoteurs du réalisme en musique.  D’un dépouillement et d’une originalité mélodique déconcertants cette version est tout-à-fait séduisante. D’autant qu’elle est servie ici par la voix merveilleusement simple et limpide du ténor Cyrille Dubois :

 

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