Port Edouard Herriot : la plaque tournante du trafic de fret en Rhône-Alpes ?

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Le PLEH (Port de Lyon Edouard Herriot) fête ses 70 ans en 2008, la date officielle retenue étant le 8 décembre (1). C’est l’occasion de se pencher sur son activité présente et son futur rôle de plate-forme multimodale s’inscrivant dans une politique de transport régional jouant sur ce mode pour conjuguer dynamisme économique, politique de l’environnement et économies d’énergie.

Sommaire

Historique du port.
Activités actuelles du port.
Les partenariats.
L’augmentation de la capacité d’accueil pour répondre à celle du trafic.
Vers l’intégration de LPEH au cœur d’un réseau local multimodal de transports.
Bibliographie.

Historique du port.

Un historique complet du port Edouard Herriot a déjà été dressé dans un précédent Dossier repère de la Bibliothèque municipale consacré aux berges du Rhône. Il est consultable ici. Nous nous bornerons à lister quelques dates importantes de son histoire.

1938 (mars) : inauguration du port par Edouard Herriot.
1966 : Avec l’aménagement hydroélectrique de Pierre-Bénite, le port atteint une superficie globale de 184 hectares.
1968 : Raccord à l’oléoduc Méditerranée-Rhône.
1987 (juin) : le dépôt d’hydrocarbures de l’entreprise Shell explose, faisant 2 morts et plusieurs blessés graves. Le maire Michel Noir pose la question d’un port en pleine ville.
2005 : une charte partenariale confirme la place du port sur son site et acte sa préservation pour le transit fluvial des marchandises, notamment les conteneurs (2). La question du stockage des produits pétroliers au PLEH est renvoyée à l’échéance de la concession du port à la CNR (Compagnie Nationale du Rhône) en 2023.
2007 : ouverture du 2ème terminal à conteneurs au PLEH.

Seul site lyonnais permettant l’utilisation de tous les modes de transport : voie d’eau, voie ferrée, route, oléoduc, fluviomaritime,

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Vue générale du port
© Crédit photo : Lyon-Terminal

le port de Lyon assure le rôle de plate-forme multimodale de proximité pour tous types de marchandises. Il est sous concession de la CNR. 70 entreprises sont présentes sur le site dans la partie privative, alors que le port public est entièrement dédié au transport de conteneurs, géré par Lyon-Terminal (filiale de la CNR) (3).

Activités actuelles du port.

En 2006, le PLEH (Port de Lyon Edouard-Herriot) a enregistré un trafic global de 10 millions de tonnes dont 2,5 millions par pipeline depuis Fos-sur-Mer (hydrocarbures), 250 000 tonnes par voie ferrée (des conteneurs pour l’essentiel) et 1,4 millions de tonnes par voie fluviale (chiffre à relativiser, le fret constitué souvent de pondéreux, granulats et matériaux de construction étant par essence lourds)(4).

Le PLEH est désormais le premier port intérieur français pour le trafic de conteneurs tous modes confondus.

Le port fluvial voit passer des marchandises à l’import

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Plan du port Edouard Herriot
© :CNR

: notamment des hydrocarbures, des granulats et matériaux de constructions, des produits métallurgiques pour partie transformés sur place et destinés à l’industrie lyonnaise. Il est aussi port d’exportation fluviomaritime de la production céréalière du Nord-Dauphiné à destination de la Grèce et de l’Italie principalement (5).

Le transport fluvial devient un élément important de la stratégie de développement durable. C’est pourquoi la CNR, la Région Rhône-Alpes et l’État ont pour objectif d’augmenter la part du trafic fluvial sur le Rhône notamment en multipliant les partenariats, en augmentant la capacité d’accueil du PLEH, et en projetant d’inscrire le port au centre d’un maillage de réseaux de transports plus ouvert vers le nord et l’Europe.

Les partenariats.

2Le Contrat de progrès fluvial de 2002.2

80 % des marchandises arrivant au PLEH proviennent du complexe portuaire marseillais, comme le souligne Mathieu Duval, directeur du port (6). Aussi, le 18 juillet de 2002, la CNR, gestionnaire du port mais aussi partie prenante de l’aménagement du Rhône, VNF (Voies Navigables de France) et le Port autonome de Marseille signent un Contrat de progrès fluvial.

Un premier bilan en 2004 (7) dresse un constat très positif des actions engagées en termes de progression du trafic sur l’axe Rhône-Saône notamment (+ 14 % en deux ans).

2Charte partenariale de 2005.2

Cette charte entre la CNR, VNF, l’État, la Région, le Grand Lyon et la Ville de Saint-Fons souligne l’importance du PLEH pour le développement économique de la région et celui du transport fluvial. Elle donne aussi les grandes orientations pour l’avenir du port : priorité est donnée aux activités utilisant la voie d’eau.

2Accord de développement du fret fluvial-axe Rhône Saône en 2008.2

Six grandes enseignes (8) de la distribution se sont engagées à développer le fret fluvial sur l’axe Rhône Saône

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Le portique du T2 chargeant une barge
© Crédit photo : Lyon-Terminal

dans le cadre d’un accord avec la CNR et VNF sous l’égide du Préfet de Rhône-Alpes. Le protocole « Utilisation de la voie d’eau » (9) signé le 1er juillet 2008 prévoit de transférer 81 600 t de marchandises par an de la route au fleuve, soit l’équivalent de 5850 poids lourds soit par an soit la consommation annuelle de pétrole d’une ville de 10 000 habitants et un rejet de 1470 t de CO2 dans l’atmosphère. Le gain économique et écologique est appréciable (10).

L’augmentation de la capacité d’accueil pour répondre à celle du trafic.

Le trafic de conteneurs au PLEH a explosé en quelques années, passant de 33 000 conteneurs en 1993 à 337 000 en 2006 dont 60 000 par voie d’eau. A ce rythme, on estime qu’en 2010, le PLEH devra traiter 100 000 conteneurs par an par voie d’eau.

Aussi 20 millions d’euros on été consacrés à la réalisation d’un deuxième terminal à conteneurs, dont 40 % financés par un groupement État-Région et 60 % par la CNR. Ce terminal est opérationnel depuis novembre 2006.

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Le portique du Terminal 2
© Crédit photo : Lyon-Terminal

Il est composé d’une plate-forme de 10 ha pour le stockage, d’un nouveau quai de déchargement de 200 m de long, d’une desserte routière et d’une desserte ferroviaire, et surtout d’un portique mobile pouvant traiter jusqu’à 200 000 conteneurs par an, amenant la capacité totale du PLEH à 400 000 (11).

Depuis l’ouverture du marché du fret ferroviaire, d’autres acteurs que la CNC (Compagnie Nationale des conteneurs) gèrent une part du trafic à Port Edouard-Herriot : CMA Rail et Railport (12). Leurs prestations vont monter en puissance et ce sera une chance supplémentaire d’éviter de reporter sur une autoroute A7 déjà bien chargée l’augmentation prévue du trafic de conteneurs, le transport fluvial ne pouvant lui non plus tout absorber.

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Chargement d’un conteneur sur un wagon
© Crédit photo : Lyon-Terminal

L’alternative du transport par le fleuve ou le rail présente le double avantage d’être plus économique de 7 à 10% – malgré la rupture de charge (13) – et plus écologique (une barge fluviale peut amener 300 conteneurs en un voyage).

Un rapport de 2007 du CESR Rhône-Alpes(Conseil Economique et Social Régional) démontre bien les atouts du transport fluvial par rapport à la route, malgré ce handicap de la rupture de charge (14). Il précise par ailleurs que l’infrastructure fleuve est prête à supporter une augmentation de trafic s’il est mieux régulé et des barges plus lourdes si la réglementation augmente le tirant d’eau maximum autorisé sur le Rhône (50 cm de tirant d’eau en plus représentent 500 t de charge supplémentaire).

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Chargement d’un colis lourd
© Crédit photo : Lyon-Terminal

Ce rapport souligne aussi la nécessité de préserver le port et de l’inscrire dans un réseau local de transports préservant son accessibilité routière tout en renforçant ses connexions vers l’extérieur par le fleuve et le rail.

Vers l’intégration de PLEH au cœur d’un réseau local multimodal de transports.

Au niveau régional, un plan de développement du réseau des transports autour de Lyon et de son port fluvial doit se mettre en place :

  • Un maillage autoroutier avec de nouvelles liaisons est ouest (A45 Lyon-Saint-Etienne, A89 Lyon-Balbigny) s’ajoutant aux liaisons actuelles (A7, A6, A42, A43) mais aussi le bouclage du périphérique de Lyon. De nouvelles entrées sur le port se raccordant à l’A 7 partie nord sont en projet.
  • Un désengorgement du « nœud ferroviaire lyonnais » par un contournement financé en partie par la BEI (Banque Européenne d’Investissement) et sur lequel viendra notamment s’embrancher la future ligne transalpine Lyon-Turin. Un contournement vital pour le trafic de conteneurs du PLEH essentiellement assuré par le rail actuellement. Différentes options de tracés sont encore à définir (15), mais le port sera connecté à la partie sud de ce contournement.
  • Un prolongement du trafic fluvial vers le nord par la construction d’un canal reliant la Saône à la Moselle est à l’étude suite à l’abandon du projet de canal Rhin-Rhône. En effet, lors du « Grenelle de l’environnement » de juin 2008, il a été décidé d’étudier cette possibilité pour créer une liaison fluviale de la Méditerranée à la Mer du Nord afin d’assurer de nouveaux débouchés au transit (point n°4.3 du rapport final)(16). L’essor du trafic fluvial de conteneurs est vu comme une des solutions (avec le ferroviaire) pour diminuer la part du transport routier responsable en France en 2004 de 34 % des émissions de CO2 dans l’atmosphère.
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    Liaison Méditerranée Mer du Nord

    Dans une politique régionale, nationale et européenne volontariste orientée vers l’économie des sources d’énergies et la préservation de l’environnement, le fret fluvial et le fret ferroviaire ont toutes les chances de continuer leur progression. Idéalement placé, le port fluvial Edouard Herriot devrait tirer son épingle du jeu comme plaque tournante multimodale en Rhône-Alpes.

Notes bibliographiques

(1) Le Progrès de Lyon, 18 nov. 2008, p. 8.
(2) Dans le domaine du transport, un conteneur (container en anglais), est un cadre métallique, en forme de parallélépipède, conçu pour le transport de marchandises par différents modes de transport. Ses dimensions ont été normalisées au niveau international.
(3) Mémo 2008, Compagnie Nationale du Rhône, 2008.
(4) Agir et entreprendre , nov-déc 2007.
(5) Port de Lyon Edouard Herriot, Compagnie Nationale du Rhône, 2003.
(6) Jacques R. Lorne. Le port de Lyon, Ambitions sud, n° 51, janv-fév. 2006. En ligne sur le

site du périodique.
(7) Voies navigables infos, n°90, sept 2004. Lien vers le document en ligne
(8) Il s’agit des sociétés Auchan, Casino, Carrefour, Conforama, Ikea et Leroy-Merlin.
(9) Protocole d’intention « Utilisation de la voie d’eau », 1er juillet 2008. Lien vers le document en ligne
(10) Les Echos, n° 20207, 3 juillet 2008, p. 5.
(11) 2e terminal à conteneurs du port de Lyon Edouard Herriot, CNR, 2006, p. 20.
(12) le Moniteur du commerce international, n° 1807, 13 déc. 2007, p. 60.
(13) Une rupture de charge est, dans le domaine des transports, une étape pendant laquelle des marchandises transportées par un premier véhicule sont transférées dans un second véhicule, immédiatement ou après une période de stockage. Cette étape représente un coût qu’un organisateur de transports cherche à réduire.
(14) Développement du fret fluvial en Rhône-Alpes, CESR Rhône-Alpes, 2007, pp. 6-10. Lien vers le document en ligne
(15) Contournement ferroviaire de l’agglomération lyonnaise : [avis de la], Chambre Régionale de Commerce et d’Industrie, 2005. Lien vers le document en ligne
(16) Rapport du Comité opérationnel sur le fret [du Grenelle de l’environnement], juin 2008. Lien vers le document en ligne

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