L’auditorium fête ses 40 ans : une salle pour un orchestre

- temps de lecture approximatif de 21 minutes 21 min - Modifié le 21/06/2016 par ameyer

Véritable "Temple de la musique", l'Auditorium Maurice Ravel a été voulu d'abord pour un public : spacieux, moderne, futuriste et édifié dans un quartier en pleine expansion. Mais il fut aussi conçu dans l'intention de donner une adresse respectable à l'un des orchestres les plus remarquables d'Europe. Un lieu, un orchestre, et deux Points d'actu pour rendre hommage à ces quarante années d'émulation musicale. Découvrons ici l'histoire de ce bâtiment emblématique de la Part-Dieu qu'est l'auditorium.

Auditorium de Lyon et tour Incity
Auditorium de Lyon et tour Incity

Sommaire

Un auditorium à la Part-Dieu : genèse du projet

Un écrin en béton pour l’orchestre de Lyon

1975 : une inauguration retentissante

1977 : le point sur l’orgue

1993-2013 : la mue de l’auditorium

Et demain ? Le Projet Lyon Part-Dieu

Pour en savoir plus

Un auditorium à la Part-Dieu : genèse du projet

La décision de créer un auditorium à la Part-Dieu est née de la convergence de deux volontés. Celle de doter le nouvel Orchestre philharmonique Rhône-Alpes (OPRAL) d’une salle digne de ce nom, capable d’accueillir des concerts symphoniques dans les meilleures conditions, et celle de doter la Part-Dieu, quartier en pleine rénovation destiné à devenir le nouveau centre régional de décision, d’un pôle culturel phare. Robert Proton de la Chapelle, alors adjoint aux Beaux-arts du maire de Lyon Louis Pradel, joue un rôle déterminant dans cette genèse.

Adjoint au maire de Lyon délégué aux Beaux-Arts de 1965 à 1977, Robert Proton de la Chapelle est particulièrement investi dans la vie musicale lyonnaise puisqu’il est également président de la Société philarmonique de Lyon depuis 1953. C’est sous son impulsion qu’est fondé le 22 décembre 1968 l’Orchestre philarmonique Rhône-Alpes, premier des orchestres symphoniques de région voulus par Marcel Landowski, qui deviendra ultérieurement l’Orchestre national de Lyon (voir L’auditorium fête ses 40 ans …). Sans domicile fixe, l’orchestre donne des concerts à la salle Rameau et à l’Opéra de Lyon. Proton de la Chapelle profite du projet de centre culturel en perspective à la Part-Dieu pour insuffler à Louis Pradel l’idée d’un bâtiment entièrement dédié à l’auditorium.

Depuis le début des années soixante, l’Atelier d’urbanisme de la Ville de Lyon planche sur le projet d’aménagement de la Part-Dieu sous l’égide de Charles Delfante. Se dessine l’image d’un centre décisionnel au sein d’une « métropole d’équilibre » qui veut s’affirmer dans le paysage national voir international. Ce centre de décision privé et public doit accueillir une gare, des bureaux, un centre commercial, des logements et un centre culturel regroupant divers équipements : bibliothèque municipale, maison de la radio, salles d’exposition, cinémas, un auditorium partagé entre l’orchestre philarmonique et l’ORTF et même un théâtre. André Malraux, alors ministre des Affaires culturelles, appuie la création d’une maison de la culture à La Part-Dieu, où il aimerait voir s’installer Roger Planchon. L’architecte Paul Chemetov est désigné pour concevoir le projet avec Charles Delfante.

Un accord de principe est trouvé en 1966 avec la mairie de Lyon pour la construction d’une maison de la culture contenant une salle polyvalente de 2000 places, mais Louis Pradel refuse finalement de se laisser imposer le projet ministériel. Exit la maison de la culture et sa salle polyvalente, on construira en revanche une salle qui fera une seule chose et la fera bien : de la musique ! Delfante défend ce choix dans la revue Résonance de mai 1972 :
« Peut-on espérer alors qu’une voix aussi compétente que celle de George Solti… fera enfin taire les grincheux qui auraient voulu que l’auditorium de la Part-Dieu soit un théâtre, un théâtre d’essai, une salle de cinéma, de conférences, un opéra, une salle de meeting… que sais-je encore ? Nous avons un magnifique orchestre Rhône-Alpes, ayons donc un bon auditorium. S’il est bon pour la musique, je gage qu’on saura bien l’utiliser à d’autres fins ; mais qu’il soit, avant tout, bon pour la musique. ».

JPEG - 222 koLe pôle culturel de la Part-Dieu se résume de facto à deux équipements éclatés dans le quartier en raison des contraintes budgétaires et de parcelles disponibles : la bibliothèque et l’auditorium. Suite à l’abandon du projet de pôle culturel, l’ORTF (Office de Radiodiffusion-Télévision Française) se désengage et refuse de céder le terrain qui devait accueillir l’auditorium pour y construire des locaux à son seul usage, sans tenir compte du plan d’ensemble (actuels bâtiments de France 3 Rhône-Alpes). L’auditorium s’installe donc sur une parcelle initialement destinée à un parc public.

Le quartier de la Part-Dieu à Lyon : l’invention d’un centre-ville, 1960 – 1980, Stéphane Autran, Millénaire 3, octobre 2008 (consulté le 20/01/2015)
La Part-Dieu : le retour aux sources, Point d’actu, 19-05-2010
La Part-Dieu : le succès d’un échec, Charles Delfante, Libel, 2009
La Part-Dieu a-t-elle une âme ?, Claude Kovatchevitch & Guillaume Tanhia, EMCC, 2011
Cinquante ans de vie culturelle à Lyon 1924-1977, Robert de Fragny (Proton de la Chapelle), 1982
Robert Proton de la Chapelle sur Wikipedia

JPEG - 306.5 ko

Un écrin en béton pour l’orchestre de Lyon

JPEG - 196.2 koJPEG - 175.2 koSuite à une série de visites de salles européennes, Proton de la Chapelle définit comme suit les besoins de la nouvelle salle lyonnaise : 2000 places, 3 salles de répétitions, fosse d’orchestre sur ascenseur, amphithéâtre à la romaine. Possibilité de réduire la salle à 1200 places. Le projet définitif est accepté par délibération municipale du 19 juillet 1971. Henri Pottier, grand prix de Rome, et Charles Delfante établissent les plans du futur auditorium. Le ministère de la Culture et la Ville de Lyon se partagent le financement, et malgré de multiples tensions (choix du nombre de places, des architectes…) les travaux débutent en avril 1972. D’un coût estimé à 31 millions de francs, divers remaniements du plan initial et les aléas du chantier font monter l’addition à 57,5 millions de francs pris en charge à 88% par la Ville de Lyon, la participation de l’Etat restant calculée sur le montant initial.

JPEG - 330 koJPEG - 235 koLa structure monolithique du volume, sans aucun pilier pour gâcher la vue, est obtenue par l’usage de béton précontraint. La gigantesque coquille Saint-Jacques (certains ont parlé d’escargot, de tank, de chien assis ou même de crapaud) est constituée d’une voute à ondes trapézoïdales de 4500 m² en projection (6000 m² en développé), reposant sur des contreforts. Les façades latérales, constituées d’un voile précontraint de 20 centimètres d’épaisseur, sont habillées de panneaux de béton décorés par cinq graphismes différents.

JPEG - 203.7 ko

JPEG - 21.5 ko

D’un volume de 24000 m3, la salle comprend un plateau scénique de 400 m² et 2055 places assises avec des possibilités de cloisonnement pour la réduction du volume dans la salle comme sur le plateau d’orchestre. Le plateau est équipé d’une fosse d’orchestre en vue de pouvoir accueillir des ballets, mais ne dispose d’aucun cintre, et ne permet donc pas l’usage de décors ni de tentures. Les locaux annexes sont logés dans des bâtiments séparés partiellement enterrés. Sous les gradins qui habillent la place Charles de Gaulle (l’esplanade de l’auditorium) sont prévues une salle d’exposition et une salle œcuménique. Une fontaine de Bernard Quiry agrémente l’accès à l’auditorium côté Garibaldi.

Comme l’indique le dossier technique consacré à l’auditorium par le Journal du bâtiment et des travaux publics le vendredi 18 avril 1975, « l’acoustique a donc été au centre des préoccupations des architectes. Il s’agissait d’obtenir une bonne diffusion du son dans toutes ses fréquences, sans écho. » L’étude d’acoustique est confiée à un technicien de l’ORTF, M. Conturie. Des tests aux ultrasons sont réalisés sur une maquette au trentième du volume de la salle. L’option d’un revêtement intérieur en bois, connu pour ses qualités acoustiques, a été recalée par la commission de sécurité, il faut donc chercher d’autres solutions.

JPEG - 146.6 ko

On équipe la voûte en béton d’un plafond de staff, et l’on suspend au dessus de la scène trente-trois sphères en staff de 3,50m, impressionnant dispositif destiné à renvoyer le son vers les spectateurs et contre les murs de la salle. Ces derniers sont recouverts de moquette pour éviter les échos parasites. Une paroi à dents de scie faite de lames de bois est installée au fond du plateau pour diffuser le son sur l’ensemble de la salle. La climatisation elle-même est étudiée pour ne pas dépasser les 20 décibels : le soufflage à très faible vitesse se fait par le pied central des fauteuils. Pour le confort des spectateurs, on a pourvu la salle de sièges profonds et confortables. Mais comme se laisse dire l’architecte Henri Pottier, l’acoustique reste « une notion un peu magique »

JPEG - 406.6 koJPEG - 358.9 koBeauté des formes, audace de de la technique, qualité de l’acoustique : l’auditorium Maurice Ravel, Le Journal du bâtiment et des travaux publics, vendredi 18 avril 1975
L’auditorium de la Part-Dieu. L’acoustique ne relève pas tout à fait de la magie, par Henry Pottier. Descrition technique, par B. Caille., Bâtiment Rhône-Alpes, décembre 1972, p. 12-17

1975 : une inauguration retentissante

Inauguré le 14 février 1975, l’auditorium Maurice Ravel est la première salle de cette dimension à être construite en France à destination du seul usage musical. C’est un évènement médiatique à plus d’un titre. Si la presse présente l’inauguration comme un franc succès, elle se fait également l’écho des doutes et des griefs qui mouvementent les débuts de l’auditorium sur la scène lyonnaise et même française.

Pour Bernard Gavoty, dans Le Figaro :

« Je ne vois pas de salle en France qui puisse rivaliser avec l’Auditorium Maurice Ravel de Lyon (…) Ici se produit le miracle du théâtre d’Epidaure, où le craquement d’une allumette se perçoit jusqu’au plus haut gradin. Conçu par Robert de Frangy, l’auditorium lyonnais est aussi beau que propice à la musique. »

Henry Dumoulin écrit dans Le Progrès, 15 février 1975 :

« L’Inauguration de l’auditorium : épreuve de vérité réussie
L’épreuve de vérité, c’est-à-dire l’audition d’un grand orchestre symphonique devant un hémicycle comble, a été réussie. En comparaison avec la salle Rameau, sourde et ouatée, avec l’Opéra, net et direct, où les sons montent dans leur intégrale pureté jusqu’au « paradis », c’est-à-dire à ces « quatrièmes » chères au cœur de tant de Lyonnais, l’Auditorium Maurice-Ravel vient d’affirmer son originale personnalité. Si tous les plans sonores sont parfaitement distincts et individuellement perceptibles dans leur relief et leur nuance, une sélectivité d’ailleurs redoutable, l’équilibre, la cohésion, la fusion se réalisant entre les cordes, les bois et l’harmonie pour donner un ensemble parfaitement harmonieux, sans phénomènes importuns d’interférences. »

On y lit également l’anecdote suivante : « Berlioz a rempli hier soir l’Auditorium Maurice Ravel. Les 2055 fauteuils du temple de la musique étant occupés, il n’en est pas resté un seul pour M. Pradel, maire de Lyon, qui a dû entendre la Symphonie fantastique assis sur une marche d’escalier, le menton dans la main. »

D’autres journalistes sont déjà plus critiques à propos de l’acoustique de la salle, comme Jacques Lonchampt dans Le Monde du 16-17 février 1975 :

L’Orchestre de Lyon inaugure l’auditorium de la Part-Dieu
« De ce concert, qui a mis en valeur la belle qualité de l’Orchestre de Lyon et de l’excellence de la plupart de ses solistes, on retire donc l’impression d’une acoustique encore trop dure et sèche, manquant de souplesse et de mystère, qui s’apparente à celle du studio 104 de la Maison de la radio à Paris. Il faudra trouver le moyen de lui donner plus de réverbération, de fondu, de moelleux surtout ; mais tout cela dépend également des artistes et des chefs qui peu à peu découvriront les possibilités musicales, et enfin du public qui doit s’apprivoiser, s’accoutumer à de nouvelles habitudes sonores. »
.

Mais l’on s’interroge également sur le bienfondé et l’usage de ce nouvel équipement, qui suscite dans le milieu culturel lyonnais des réactions contrastées. Jean Aster, alors directeur de l’Opéra, s’exprime dans L’Essentiel n°1 de 1974 : « Alors, une salle pour le seul Orchestre de Lyon ? Et les Ballets ? Cela valait-il la peine pour ce seul objectif ? » Il faut dire que l’opéra de Lyon est à cette époque dans un état de vétusté peu réjouissant. Qui sera responsable de la politique musicale de l’auditorium ? « On ne peut, dans ces conditions, que conclure que l’auditorium est une opération de prestige pour « Lyon capitale bis » et non une pièce d’un édifice culturel, et musical. ».

L’opération Auditorium s’inscrit effectivement dans des enjeux politiques, et apparait comme le symbole des ambitions internationales lyonnaises, vantées par Jérôme Monod, délégué à l’aménagement du territoire, qui profite de l’inauguration pour faire part des ambitions gouvernementales à l’égard de la « capitale » lyonnaise, dont Le Figaro du 14 février 1975 se fait l’écho.

Libération écrit un article très dur dans son journal du 7 février 1975, invitant même les lyonnais à sortir les tambourins pour réaliser un concert d’inauguration concurrent.
On apprend dans Le Progrès du 14 février 1975 que certaines personnalités, dont le ministre de l’Intérieur et le Secrétaire d’Etat à la culture, ont préféré annuler leur venue en raison de la manifestation organisée par le PCF à l’occasion de l’inauguration. Ce dernier a adressé un manifeste au Secrétaire d’Etat : « L’auditorium conçu sans consultation préalable des créateurs, des musiciens, des responsables de spectacles lyriques, d’organisations culturelles attachées à la diffusion de la musique, sans nulle structure d’animation intégrée, ne contribuera que très médiocrement à élargir le cercle des connaisseurs. » Le PS conteste également le coût de construction de l’auditorium et de la faiblesse de la participation de l’Etat, alors qu’ « au même moment des théâtres locaux qui sont l’expression d’une décentralisation nécessaire disparaissent, l’Opéra se trouve en difficulté, des musiciens de l’ex ORTF sont licenciés. »

Michel Derenbourg clôt la polémique dans son article du 17 juillet 1975 paru dans L’Echo : « Aujourd’hui, les rumeurs se sont tues. Face aux témoignages des « autorités » : Miguel Angelli, de Kempf, de Menuhin, et des autres, la critique de l’Ecole des femmes fait école. Et on ne dit plus rien. (…) Les premiers à critiquer le projet ont été les premiers à demander un droit d’utilisation. (…) Si l’on veut bien admettre que les plus grands musiciens mondiaux passeront aussi par l’auditorium, on voit facilement ce que ce programme musical donnera dans dix ans : à défaut d’être déjà la « capitale régionale », Lyon sera sûrement la capitale musicale. Avec « un grand public d’initiés ». De jeunes talents en réserve. Et une reconnaissance émue pour le promoteur de l’opération… Il n’est jamais trop tard pour bien faire… »

Au vu des sommes investies, tout nouvel équipement culturel d’envergure doit faire face aux critiques et prouver sa légitimité, on l’a vu encore récemment avec le musée des Confluences. On accuse l’Auditorium d’élitisme. Celui-ci s’attelle d’emblée à lutter contre ce cliché, en adaptant sa politique tarifaire et en développant son action culturelle avec un objectif : la musique pour tous. Une démarche encore d’actualité, sensible dans la programmation de ce quarantenaire.

La Part-Dieu : articles de presse. T. 2 : L’auditorium, 1974-1975, dossier de presse de la Bibliothèque municipale de Lyon

1977 : le point sur l’orgue

Lors de l’inauguration en 1975, un élément manque encore pour parfaire l’ensemble : le grand orgue de l’auditorium. La municipalité est en pourparlers avec la Ville de Paris, qui se propose de faire don à Lyon des tuyaux de l’orgue du Palais de Chaillot. Inutilisé depuis quelques années, il est démonté à l’occasion de la reconstruction de la salle qui abrite désormais le Théâtre national de Chaillot.

JPEG - 71.6 ko

L’orgue est un Cavaillé-Coll construit pour le Palais du Trocadéro lors de l’exposition universelle de 1878, il a donc déjà subi un déménagement et diverses modifications. La Ville de Lyon envisage avec intérêt le don de ce qui fut un orgue prestigieux mais une nouvelle polémique se développe par le biais des médias : les partisans d’un orgue neuf déplorent l’état de l’orgue laissé à l’abandon et les défauts de sa transmission électrique, s’inquiètent du coût d’une remise à neuf, et d’aucuns voient dans l’orgue parisien « un laissé pour compte de la capitale, qui trouve ainsi l’occasion de se débarrasser d’un instrument que beaucoup d’organistes actuels contestent, tant pour son acoustique sonore que pour son système de transmission électrique. La Ville de Lyon, première métropole régionale, peut difficilement accepter une telle manœuvre. » (Le Progrès, 21 juin 1975. Les orgues de l’auditorium : dispute d’esthètes ou affaire de gros sous ?).

JPEG - 65.9 koOn voit combien la méfiance à l’égard de Paris était forte dans l’esprit de certains lyonnais. Après la réalisation d’un nouvel appel d’offres et l’envoi d’une lettre ouverte aux journaux pour apaiser les esprits, la Ville de Lyon retient la proposition de la maison Gonzalez pour la construction d’un orgue électrique avec utilisation de la tuyauterie du Palais de Chaillot, pour une somme de 1,4 million de francs (Bulletin municipal officiel, 9 novembre 1975).

L’instrument compte 82 jeux et 6500 tuyaux, dont le plus grand mesure 5 mètres. Il s’agit actuellement du seul grand orgue de salle de concert en France. Au départ orgue romantique, il a été transformé en orgue néoclassique. Diversement utilisé au cours des décennies passées à l’auditorium, la nouvelle direction musicale souhaite le remettre à l’honneur et lui rendre tout son lustre. Les remaniements successifs avaient profondément dénaturé le son de l’instrument. Un chantier de six mois engagé en 2013 a permis au facteur d’orgue Michel Gaillard et à son équipe de le restaurer intégralement : « A l’époque du transfert à Lyon, Georges Danion, le facteur de l’époque, voulait faire des sonorités trop brillantes, verdâtres, agressives, avec un son qui ne dépassait pas le fond de scène. J’ai voulu ressusciter l’esprit de Cavaillé-Coll qui sommeillait dans cette matière. »

Gaillard, le sauveur d’orgues, dans Exit n°18, décembre 2013
L’orgue : histoire, composition et restauration sur le site de l’Auditorium
Orgue de l’Auditorium Maurice-Ravel sur Wikipedia

JPEG - 48.5 ko

1993-2013 : la mue de l’auditorium

L’auditorium soigne son acoustique

L’orgue n’est pas le seul à bénéficier d’un coup de jeune. Si lors de l’inauguration les critiques sur l’acoustique de l’auditorium restent modérées, deux décennies plus tard, le chef d’orchestre Emmanuel Krivine ne mâche pas ses mots (Les Imaginaires, France Musique, 11 octobre 1997) : il accorde à l’auditorium le titre de « plus mauvaise salle de France ».
« Une éponge, un éteignoir, médiocre, sourde, mate cotonneuse… ces aimables qualificatifs et bien d’autres reviennent immanquablement, depuis des lustres, sous la plume des critiques (pas forcément lyonnais !) pour évoquer l’acoustique de l’auditorium Maurice-Ravel. », telles sont les premières lignes de l’article de Gérard Corneloup dans Lyon Figaro du 26 août 1993, “L’auditorium en chantier : les travaux que l’on attendait plus”. En 20 ans, les techniques acoustiques ont évolué, de nouvelles salles ont été construites et les défauts acoustiques de l’auditorium sont dénoncés depuis plusieurs années par les chefs d’orchestre : il ternit les sons et les musiciens ne s’entendent pas jouer.

La municipalité lance en 1988 une consultation, qui aboutit à un vaste programme de rénovation échelonné en trois tranches entre 1993 et 1997, après la réouverture de l’Opéra, afin de limiter la fermeture de l’établissement au public. Outre l’amélioration de l’acoustique et le renouvellement des installations techniques, les travaux doivent également permettre à la salle de s’adapter à des spectacles de variété, de danse et d’opéra.

JPEG - 482.7 ko
Une grande part des travaux se concentre sur l’acoustique. Le plafond de scène se voit délesté de ses boules, dont les performances acoustiques se sont révélées désastreuses, un rideau en bois plein prend place en fond de scène et la moquette murale qui avait une fâcheuse tendance à absorber le son est remplacée par un revêtement de bois perforé. On installe en outre un système électro-acoustique (MCR-Philips) qui permet de corriger l’acoustique de façon active. Les amples fauteuils Béraudier, véritables pièges à son, disparaissent au profit de fauteuils de bois et tissus moins encombrants et acoustiquement performants.

La rénovation porte également sur l’éclairage de la salle et l’accessibilité du site aux personnes handicapées, avec la mise en place de places réservées. La capacité d’accueil de la salle est revue à 2087 sièges.

L’auditorium perd la boule : la municipalité décidée à soigner les boules de l’auditorium, Jean Perilhon dans Le Tout Lyon, 18 avril 1988
L’auditorium Ravel fait peau neuve : pour améliorer l’acoustique et accueillir d’avantage de « variétés », Pierre Moulinier, dans Le Monde éd. Rhône-Alpes, 10 octobre 1993
L’auditorium : une salle, un orchestre, C’est 9 à Lyon, 1 mai 1994
Fin des travaux à l’auditorium de Lyon, Jean-Marc Durand dans Le Progrès, 19 octobre 1997
Des fauteuils accessibles à l’Auditorium, Agnès Benoist, Lyon Figaro, 10 cotobre 1997

L’Auditorium se prête à la peinture

Les années 1990 sont aussi celles d’une ouverture vers l’art contemporain, comme en témoigne la série de catalogues d’exposition publiée par l’auditorium, qui offre dans son « artrium » jusqu’à quatre expositions de peinture par an. On trouve parmi les exposants une majorité de peintres lyonnais : Couty, Jabouley, Janoir, Henri-André Martin, Grandjean…

L’Auditorium-Orchestre national de Lyon

C’est également à cette époque que s’effectue une mutation de l’organisation administrative : en 1993, le poste de directeur de l’Auditorium, jusqu’alors totalement dissocié de l’ONL, est supprimé et fondu dans celui de directeur général de l’Orchestre national de Lyon. Les deux structures ne forment plus qu’une entité qui prend le nom d’ « Auditorium-Orchestre national de Lyon » et qui emploie aujourd’hui 154 agents permanents, dont 103 musiciens. Dans les faits, il existe encore un fonctionnement bicéphale, puisque l’Auditorium-Orchestre national de Lyon dispose d’un directeur général et d’un directeur musical. Comme à ses débuts, la structure est gérée en régie municipale, mais dispose depuis janvier 2015 d’un budget annexe, ce qui lui permettra de distinguer ses comptes de ceux de la Ville de Lyon.

L’auditorium en chantier, Lyon Figaro, 26 août 1993
Création du budget annexe Auditorium Orchestre National de Lyon (ONL), Registre des délibérations du Conseil municipal, n°2014/615, séance du 24 novembre 2014

JPEG - 318.8 ko

De nouveaux travaux menés pendant l’été 2001 portent sur la création de structures de scène modulables avec un système de podium motorisé permettant de contrôler la mise en scène à distance et sur la rénovation du système de ventilation.
Une dernière session de travaux entre avril et octobre 2013 porte sur la restauration l’orgue, l’amélioration et l’informatisation du système de chauffage et de ventilation et la rénovation de l’atrium, ainsi que divers travaux de mise aux normes.

Orchestre national de Lyon : Mahler en ouverture. L’auditorium fait peau neuve, Le Progrès, 28 septembre 2001, consultable sur Europresse
En rénovation, l’Auditorium de Lyon s’installe à la Bourse du travail, Le Progrès, 21 avril 2013, Europresse

JPEG - 131.2 ko

Et demain ? Le Projet Lyon Part-Dieu

La Part-Dieu est actuellement au cœur d’un projet d’envergure mené par le Grand Lyon en vue d’impulser une nouvelle dynamique à ce quartier fortement marqué par l’urbanisation des années 70.

« Conçu par une équipe d’urbanistes-architectes et divers experts pilotés par l’agence l’AUC, ce projet se développe autour des questions de mobilités, de développement économique et de la qualité de vie en hyper-centralité métropolitaine. Le projet a pour ambition de faire de Lyon Part-Dieu d’ici 2030 une référence internationale en matière de qualité, d’innovation urbaine et de performance économique tout en rendant le quartier encore plus actif et habité. »

Quel impact pour l’auditorium ? Le projet prévoit un « centre commercial complètement repensé des institutions culturelles plus visibles et mieux reliées entre elles. Des espaces publics requalifiés intégrant lieux de pause et espaces verts et un « sol facile » favoriseront l’orientation, l’information et les déplacements des nombreux piétons.. Plus concrètement, la place Charles de Gaulle aujourd’hui en déshérence devrait être rénovée et repensée. Ouverture sur la rue Garibaldi, aménagement d’une salle de répétition pour l’orchestre sous les gradins, telles sont les perspectives envisagées pour un horizon encore lointain, puisque le réaménagement de la place n’est pas prévu pour le mandat en cours (2014-2020).

Le site du projet Lyon Part-Dieu

JPEG - 268 ko

Des ressources pour suivre l’Auditorium-Orchestre national de Lyon

  • Les Dossiers de presse Rhône-Alpes : articles de presse numérisés de 1993 à 2004 (accessible de la bibliothèque uniquement) et références d’articles jusqu’en 2014 (libre accès)
  • Europresse : les articles du Progrès depuis 1997 et de nombreux titres de presse nationale (accès libre en bibliothèque, à distance avec sa carte de lecteur)
JPEG - 173.1 ko

Partager cet article