250ème anniversaire de l’Ecole vétérinaire de Lyon

- temps de lecture approximatif de 23 minutes 23 min - Modifié le 29/12/2022 par Shuy

L'année 2011 est déclarée Année Mondiale Vétérinaire par l'Organisation mondiale de la santé animale (OIE) et la Commission européenne, sous l'appellation "Vet 2011". En effet, il y a 250 ans que fut créé à Lyon l'enseignement vétérinaire, instituant, de ce fait, la profession de vétérinaire. D'importants évènements ponctuent cette année. A Lyon, se sont tenues en mai la Conférence Mondiale sur l'Enseignement Vétérinaire et celle internationale de surveillance épidémiologique. Les Musées Gadagne présentent du 22 septembre au 27 novembre 2011 l'exposition-découverte "De Bourgelat à Mérieux : 250 ans de l'Ecole vétérinaire de Lyon".

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Pr. Jean-Baptiste Chauveau examinant un cheval © VetAgro Sup Pôle Comm’


Sommaire

1. Avant 1761

2. Apparition de l’enseignement vétérinaire en France

3. Claude Bourgelat, l’initiateur

4. Une école : trois sites successifs

- La Guillotière : 1762-1796
- Vaise : 1796-1978
- Marcy l’Etoile depuis 1978

5. Evolution du métier de vétérinaire

Avant 17612

Depuis toujours, les chevaux sont des animaux dont on prend grand soin. Utilisés pour se déplacer rapidement sur leurs terres, pour combattre leurs adversaires, les Romains tout comme les Byzantins les considèrent comme de précieux animaux de guerre. Hippocrate et Aristote se penchent sur leurs maladies, ainsi que d’autres dont les textes sont réunis dans le Codex Hippiatricum. L’auteur principal en est Apsyrte, vétérinaire en chef de l’armée de Constantin le Grand dans les années 330, et c’est à cette époque qu’apparaît le terme grec d’hippiatrie.

A l’époque médiévale, l’Occident ne s’intéresse plus guère à cette médecine. Lors de la fondation des grandes universités entre 1100 et 1300, le regain d’intérêt pour la médecine ne concerne pas les maladies animales. Seuls les écuyers chargés de veiller à l’entretien de la cavalerie des grands seigneurs, s’intéressent à l’anatomie et aux pathologies des chevaux.

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Porche, cour intérieure
site de Vaise
Août 2011
S. B-R

Plus tard, durant le 16ème siècle, le développement de l’art de l’équitation entraine celui de la médecine animale. Les maréchaux-ferrants et les hippiâtres soignent les chevaux devenus de précieuses montures mais les soins donnés relèvent plus de la pratique empirique que d’un savoir scientifiquement vérifié. Ils recourent cependant à des ouvrages les instruisant sur l’anatomie et les maladies du cheval comme Le Parfait Maréchal (1713) de Jacques de Solleysel, écuyer de Louis XIV, dans lequel l’auteur tente de débarrasser les maréchaux de leurs anciennes croyances et de substituer à leurs pratiques superstitieuses des connaissances basées sur l’expérience et la raison. En 1772, c’est la parution du Cours d’Hippiatrique de Pierre-Etienne Lafosse.

Au début au 18ème siècle, la société rurale ignore presque tout des maladies du bétail et il n’est pas rare de faire appel à des sorciers, leveurs de sorts mais aussi au clergé pour enrayer des épidémies. En effet, de nombreuses processions ont lieu en l’honneur de saints protecteurs du bétail comme Saint Antoine, Saint Roch, Saint Blaise….

Apparition de l’enseignement vétérinaire en France

Particulièrement au 18 siècle, se fait sentir le besoin d’apporter un enseignement rationnel et méthodique face à l’empirisme et aux superstitions, d’autant plus dans les sciences vétérinaires que les pertes du cheptel français sont considérables. Ainsi, dans un contexte culturel économiquement et socialement préparé, il est relativement facile pour Claude Bourgelat de convaincre Bertin, contrôleur général des finances, de créer une école vétérinaire. Le 4 août 1761, l’arrêt du conseil du roi valide, à Versailles, la création d’une école pour l’enseignement des principes et de la méthode de guérir les bestiaux. Le roi accorde à cet établissement une aide financière sous la forme d’une subvention à durée limitée. A partir de 1764, devenue Ecole Royale Vétérinaire, elle est prise en charge par l’Etat.

Le réglement de cette école, publié sous forme d’affiche est très strict. 58 articles détaillent les obligations des élèves rythmant leur vie au sein de cet établissement ; ils sont souvent très jeunes, doivent être internes et sont chargés à tour de rôle de nombreux services comme nourrir les animaux, nettoyer les salles de dissection et de démonstration.

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Salle de dissection
© VetAgro Sup
Pôle Communication

Le système repose sur un principe d’autodiscipline, ainsi les élèves les plus valeureux sont promus chefs et responsables des autres. Toute consultation effectuée doit faire l’objet d’une correspondance avec l’Ecole. Cette obligation reste aussi valable lorsque les élèves sont établis. Les nouveaux « Règlemens pour les Ecoles Royales vétérinaires de France », rédigés par Bourgelat en 1777, instituent, entre autres, le port d’un uniforme pour les élèves comme pour les professeurs. Bien qu’à partir de 1871 l’externat soit toléré, l’internat reste de règle jusqu’aux environs de 1940.
L’enseignement dure 4 ans, privilégiant l’observation et la réflexion. Il accorde une place importante à l’enseignement pratique afin de développer l’habilité manuelle et de solliciter la mémoire visuelle. Les exercices pratiques concernent particulièrement l’anatomie et la ferrure des chevaux, la connaissance des plantes fourragères et médicinales. La chirurgie, quant à elle, est réservée aux élèves les plus avancés dans le déroulement des études.
Dès 1762, Claude Bourgelat envoie des élèves dans le Dauphiné, puis en Auvergne, pour soigner les animaux : ils doivent décrire très précisément les maladies observées. Les épidémies sont enrayées principalement en raison d’une accalmie de la peste bovine. Suite à ces succès, Louis XV, en 1764, attribue à l’Ecole le titre d’Ecole Royale Vétérinaire, ce qui va être une formidable publicité pour Claude Bourgelat ainsi que pour l’Ecole vétérinaire de Lyon. Sa renommée dépasse alors les frontières. Mais malheureusement, une fois sortis de l’Ecole, les artistes-vétérinaires doivent s’opposer aux charlatans et à leurs méthodes empiriques. En tant qu’élèves, leurs consultations et soins sont gratuits et attirent ainsi les propriétaires d’animaux. Mais une fois à leur compte, le prix de leurs actes étant supérieur à celui des guérisseurs, de nombreux d’artistes-vétérinaires, mal considérés, sont découragés et quittent cette profession.

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Ancien box pour cheval
site de Vaise
Août 2011
S. B-R

Le retour de la peste bovine, dans les années 1770, montre le manque de compétences acquises pour soigner les animaux malades.
Puis entre 1770 et 1780, l’Ecole de Lyon connaît des difficultés notamment en raison du prestige de celle d’Alfort créée en 1766 et dirigée depuis par Claude Bourgelat.
Bien que le budget lyonnais soit 4 fois moins important que celui d’Alfort, Louis Bredin, directeur de l’époque, refuse de céder au découragement et ne réussissant pas à obtenir une aide financière ni de l’Etat ni du département de Rhône-et-Loire, prélève sur ses fonds personnels. Heureusement un crédit exceptionnel voté par l’Assemblée Nationale en 1792, solde la dette de l’Ecole. La loi du 29 germinal An III consacre définitivement la tutelle de l’Etat en instituant dans la République, deux Ecoles d’économie rurale vétérinaire, avec un budget total de 160 000 livres.

Plus tard à l’avènement de Napoléon, elles prennent le nom d’Ecoles Impériales Vétérinaires.
En thermidor An IV, le ministre de l’Intérieur récompense Louis Bredin pour son attitude durant le siège de Lyon par une indemnité. Grâce à sa fermeté, sa ténacité, la sollicitude paternelle qu’il porte aux élèves ainsi qu’à son absence de compromission politique, il a permis le redressement de l’Ecole de Lyon et a préparé son essor au XIXe siècle. Il en assure la direction 34 ans jusqu’à sa mort en 1814.

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Vue panoramique de
Lyon et des rives de la Saône
Jules Sylvestre
Coll. BmL

Malgré des débuts difficiles, les écoles vétérinaires de Lyon et d’Alfort ont cependant le mérite d’être les seuls établissements académiques de l’Ancien Régime à avoir traverser la Révolution.
Cependant, l’enseignement dispensé dans ces écoles, est sujet à de nombreuses polémiques comme celle de Pierre-Joseph Amoreux, médecin, qui propose de rattacher l’enseignement vétérinaire à la médecine. Il y eut même le projet, à Lyon, d’une Ecole Royale de Médecine pratique, de chirurgie et d’art vétérinaire, mais en vain.

Le manque de formation des enseignants est même évoqué par Philippe-Etienne Lafosse dénonçant, devant l’Assemblée Nationale en 1789, les dépenses excessives des Ecoles vétérinaires au regard des maigres résultats pédagogiques obtenus. Puis, après maintes discussions, le Comité d’agriculture propose un décret promulgué en l’An II, mentionnant la réflexion d’un décret relatif à l’organisation définitive des écoles vétérinaires. Les comités d’instruction publique et d’agriculture concluent alors en une non-annexion de la médecine vétérinaire à la médecine humaine, lui laissant ses spécificités ainsi qu’une certaine indépendance.
Par ailleurs, le rattachement des Ecoles Vétérinaires au ministère de l’Agriculture effectif depuis 1881 est plusieurs fois sujet à discussion durant le 20ème siècle. Il est remis en cause notamment en 1934 avec un projet de loi visant à rapprocher les écoles vétérinaires du ministère de l’Education Nationale. Depuis, l’autonomie des écoles vétérinaires n’est plus remise en question, elles sont reliées au monde de l’agriculture par leur ministère de tutelle.

On a parfois reproché à l’enseignement donné au sein des Ecoles vétérinaires d’être trop axé sur l’étude du cheval. Il fut ainsi rappelé aux élèves de ne pas négliger la « connaissance et le traitement de tous les animaux qui peuvent être de quelque utilité à la société et surtout aux travaux et aux besoins de la campagne ».

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Amphithéâtre d’anatomie
pathologique
© VetAgro Sup
Pôle Communication

Dès le début du 19ème siècle, le recrutement des professeurs n’est plus fait par cooptation mais par concours public, et plus tard par concours d’agrégation. Leur nombre augmente, les matières enseignées se diversifient comme en 1813, l’ajout au programme d’un enseignement de jurisprudence vétérinaire. Porté à 8 en 1881, le nombre de chaires atteint 15 en 1965.

Mais en 1813, un décret impérial favorise l’Ecole d’Alfort. En effet, celle-ci délivre en 5 ans des diplômes de médecin-vétérinaire, alors que celle de Lyon ne forme que des maréchaux vétérinaires, en 3 ans. Claude-Julien Bredin, directeur de l’Ecole vétérinaire de Lyon et Jean-Baptiste Huzard, inspecteur général redonne à l’Ecole de Lyon la même valeur que celle d’Alfort.

Le nombre de candidats augmentant, l’accès aux écoles vétérinaires se complexifie, instituant un concours d’entrée par le décret du 18 février 1887 signé par le ministre de l’Agriculture Jules Develle, et nécessitant à partir de 1890 l’obligation d’avoir le baccalauréat.
Les relations entre les directeurs successifs de l’Ecole et les autorités compétentes des différentes époques ont toujours été cordiales. Malgré une discipline très stricte, certains élèves se rebellent participant même à la révolte des canuts en avril 1834.

De la Révolution jusqu’aux environs de 1830, une grande fête a lieu chaque année, lors de la distribution de prix devant des personnalités de la Ville et des corps enseignants. A partir de 1895, un banquet annuel se tient à la rentrée scolaire réunissant professeurs et élèves.
C’est en 1923 qu’est créé le Doctorat-vétérinaire, diplôme permettant dès lors de séparer de façon nette les vétérinaires des empiriques. Puis en 1942, l’Ordre des Vétérinaires est institué, chargé de faire respecter le Code de déontologie et de représenter, en toutes circonstances, la profession vétérinaire.

L’association Amicale des Anciens Elèves de l’Ecole Vétérinaire de Lyon voit le jour en 1902. En janvier 1923 est créé le Cercle Bourgelat dont le but est de réunir, de distraire et de défendre les élèves-vétérinaires. En 1942, le Club Olympique Bourgelat vient compléter l’action du Cercle tout comme à partir de 1945, le journal La Rénette qui souhaite resserrer les liens entres les anciens et nouveaux élèves.

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Statue de S. Arloing
Août 2011
S. B-R

Selon Saturnin Arloing, l’Ecole de Bourgelat est bien « la nourrice de toutes les écoles de médecine vétérinaire ». En effet dès la fin du 18ème siècle, la plupart des nations européennes disposent d’écoles vétérinaires établies sur le modèle français par des élèves directs de Claude Bourgelat et de ses premiers disciples. C’est le cas du Royal Veterinary Collège de Londres fondé en 1791.

Les études, la professionnalisation et la reconnaissance des vétérinaires au cours du XIXème siècle permettent de légitimer cette profession et d’accroître le nombre et la qualité des praticiens. Deux autres écoles vétérinaires sont créées en France : à Toulouse en 1828 et à Nantes (appelée aujourd’hui ONIRIS, Ecole nationale vétérinaire, agroalimentaire et de l’alimentation, Nantes-Atlantique).

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Entrée du campus
de Marcy l’Etoile
Août 2011
S. B-R

La fusion de l’Ecole vétérinaire de Lyon et de l’Enita (Ecole Nationale d’Ingénieurs des Travaux Agricoles) de Clermont-Ferrant en 2010, crée ainsi VetAgro Sup, institut d’enseignement supérieur. Les enseignements vétérinaires et agronomiques sont réunis au sein d’une seule et même entité sur le site de Marcy l’Etoile. Avec pour missions principales l’enseignement supérieur, la recherche et la valorisation, VetAgro Sup forme des docteurs vétérinaires et des ingénieurs agronomes.

Les grands apports de la médecine animale

Grâce à l’obligation de déposer à chaque intervention un compte rendu détaillé, Claude Bourgelat a créé de véritables archives permettant d’avoir des études très complètes sur de nombreuses maladies. La diffusion de ces connaissances donne lieu à la publication de monographies mais aussi de recueils d’observation et de formules thérapeutiques, annuellement remis à jour. C’est le cas de « l’Almanach vétérinaire » datant de 1782, invitant ses lecteurs vétérinaires à compléter le contenu des articles mais aussi celui des « Instructions et observations sur les maladies des animaux domestiques » de Chabert, Flandrin et Huzard.

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Pr. Arloing
dans son laboratoire
© VetAgro Sup
Pôle Communication

Jusqu’en 1877, Lyon ne possède pas de Faculté de Médecine et l’Ecole Vétérinaire de Lyon est donc le seul établissement structuré, à disposer d’installations permanentes et à avoir une longue tradition expérimentale. Elle est donc l’initiatrice et le premier creuset de la recherche médicale appliquée.

Grâce à Jean-Baptiste Chauveau et à Saturnin Arloing qui furent tous deux professeurs et directeurs de l’Ecole vétérinaire mais aussi professeurs à la Faculté de Médecine, l’école vétérinaire a établi les bases de la cardiologie scientifique. Elle a aussi largement participé aux recherches en microbiologie, en immunologie et a œuvré à la prophylaxie de la tuberculose.

Société des Sciences Vétérinaires

Cette société est fondée par les professeurs Cadéac, Arloing et Mathis pour permettre d’exposer et de discuter de sujets se rapportant à la pathologie. Dès 1898, de nombreuses communications ont été présentées concernant les disciplines fondamentales (anatomie, physiologie, chimie) mais traitant aussi de toutes les branches de la médecine (affections chirurgicales, infections microbiennes). Des synthèses sur des problèmes d’actualité préoccupant éleveurs et praticiens sont aussi traités. Elle absorbe, en 1911, la Société de médecine vétérinaire de Lyon et du Sud-Est et prend en 1949, le nom de Société des Sciences Vétérinaires et de Médecine Comparée de Lyon, voulant marquer l’importance des maladies communes à l’homme et aux animaux.

Pour en savoir plus :

- Lyon, berceau des sciences vétérinaires de Jack Bost,
- Le berceau de l’enseignement vétérinaire : création et évolution de l’Ecole nationale vétérinaire de Lyon : 1761-1889 par M. S. Arloing,
- Le Tout Lyon en Rhône-Alpes n°4944, 14 mai 2011,
- Sciences vétérinaires médecine comparée,
- Bicentenaire de l’Ecole nationale vétérinaire de Lyon : 1762-1962,
- Histoire de la médecine vétérinaire d ‘André Senet,
- L’école nationale vétérinaire de Lyon à Vaise de 1900 à 1975 de Olivier Mallet,
- Apports de l’Ecole vétérinaire de Lyon à la Médecine expérimentale in Rive Gauche n° 139, décembre 1996.

Claude Bourgelat, l’initiateur

Fils d’un échevin lyonnais, Claude Bourgelat nait à Lyon le 11 novembre 1712. Avocat de 1733 à 1740, il s’oriente par la suite vers une carrière d’écuyer. En 1740, il obtient la direction de l’Académie d’équitation de Lyon, installée rue du Manège, dans le quartier d’Ainay, qu’il conserve jusqu’en 1765. La publication en 1744 du traité d’équitation « Nouveau Newcastel » lui permet d’acquérir une réputation considérable. En 1750, il publie les « Eléments d’hippiatrique ou nouveaux principes sur la connaissance et sur la médecine des chevaux ». Grâce à sa démarche scientifique, il est nommé, en 1752, correspondant de l’Académie des sciences et rédige dès 1755 près de 250 articles pour l’Encyclopédie de Diderot et d’Alembert. Constatant des erreurs lors de descriptions précédentes sur la biomécanique du cheval et pensant qu’il existe une analogie entre les machines humaine et animale, il décide de solliciter la collaboration de chirurgiens humains exerçant à l’Hôtel-Dieu notamment Claude Pouteau. Grâce à cette fructueuse collaboration, il est le premier scientifique à oser dire que l’étude de la biologie et de la pathologie de l’animal permet de mieux comprendre celles de l’homme.

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Claude Bourgelat
Fresque des Lyonnais/CitéCréation
S. B-R

Il est écuyer du Roi et chef de l’Académie du Roi à Lyon, lorsqu’en 1761, son projet de créer une école vétérinaire est validé. En créant les premiers établissements de formation, il invente en même temps le métier de vétérinaire.
En 1765, Claude Bourgelat quitte Lyon pour établir l’Ecole d’Alfort.
Rationaliste, il fonde la médecine sur l’observation et l’expérimentation et rejette violemment toutes les superstitions qui encombrent la pharmacopée vétérinaire de l’époque.

Il publie ensuite de nombreuses études qui sont le fruit de ses réflexions à partir de notes effectuées lors de missions ou envoyées par les artistes-vétérinaires. En France, tout vétérinaire entrant en fonction doit faire le Serment de Bourgelat.
Claude Bourgelat meurt à Paris le 3 janvier 1779.
Il fait partie des 30 personnalités apparaissant sur la Fresque des Lyonnais, visible à Lyon angle quai Saint Vincent et rue de la Martinière. Il se trouve au 3ème étage sur le même balcon que Pauline Jaricot et Claudine Thévenet (Mère Marie Saint-Ignace).

Pour en savoir plus :

- Claude Bourgelat : un lyonnais fondateur des deux premières écoles vétérinaires du monde,1712-1779 de Philippe Cottereau et Janine Weber-Godde,
- Lyon et ses murs peints réalisés par Cité de la création de Corinne Poirieux,
- Lyon, berceau des sciences vétérinaires de Jack Bost.

Une école : trois sites successifs

La Guillotière : 1762-1796 

Une ancienne auberge située Grande rue du faubourg de la Guillotière (aujourd’hui à l’intersection avenue Félix-Faure / Grande rue de la Guillotière) est, durant 35 ans, l’emplacement de la première école vétérinaire.

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Plaque commémorative
site de La Guillotière
D.R.

Un bail de six ans est signé le 10 janvier 1762 entre Claude Bourgelat et les recteurs du grand Hôtel-Dieu pour la location du logis de l’Abondance. Accueillant rapidement les premiers élèves, les cours débutent en février 1762. L’édifice comprend deux corps de bâtiments, une grande écurie pour 28 chevaux surmontée d’un fenil ainsi que deux petites écuries permettant d’isoler les chevaux morveux, des remises dans lesquelles s’alignent de nombreuses forges, le tout entourant une grande cour fermée par un porche donnant sur la rue. Un jardin botanique, destiné tout aussi bien à l’instruction des élèves qu’à fournir à moindre frais la pharmacie de l’Ecole, complète cet ensemble. Entretenu dès 1763 par l’abbé Rozier remarquable botaniste, ce jardin fait l’admiration de tous. Les chevaux sont les premiers animaux à être amenés à l’Ecole pour consultation et soins puis en raison de l’arrivée en nombre des chiens, il est rapidement nécessaire de construire un chenil.
Très vite, les locaux sont trop petits, mal aérés, le dortoir manque de lits pour les élèves internes, la grande écurie est régulièrement inondée par les crues du Rhône. Après réflexions, le Monastère des Deux-Amants est finalement choisi, le 17 thermidor An III, pour être le prochain emplacement de l’Ecole Vétérinaire de Lyon.

Vaise : 1796-1978

L’Ecole est transférée en frimaire de l’An V en bordure du faubourg de Vaise, dans l’ancien cloître des religieuses de Sainte Elisabeth dit des « Deux Amants », situé au nord du couvent des Cordeliers de l’Observance. Il ouvre sur l’étroite rue de l’Observance que remplace aujourd’hui le quai Chauveau.

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Ecole Vétérinaire
de Vaise
© VetAgro Sup
Pôle Communication

Dès lors, la politique constante des directeurs vise l’extension du terrain de l’Ecole, l’agrandissement et la restructuration des locaux. Très rapidement certains bâtiments nécessitent de nombreuses restaurations. Face à la lenteur des opérations et à leur coût, l’Etat veut faire transférer l’Ecole de Lyon à Toulouse. Mais grâce à un crédit exceptionnel voté par la Ville de Lyon, des travaux sont effectués de 1822 à 1824. Une seconde fois, la Chambre des députés envisage de supprimer l’Ecole de Lyon. Arago, scientifique et grand orateur, soutient haut et fort la nécessité de conserver cette école évoquant les retombées agricoles, commerciales et militaires mais aussi les répercussions sur les progrès de la médecine humaine. De grands architectes comme Louis Flacheron, Antoine-Marie Chenavard, Pierre-Prosper Chabrol, Louis Sainte-Marie-Perrin, Tony Garnier et Pierre Bourdeix se succédent pour restaurer, agrandir cette école : la façade sur la Saône est démolie, un amphithéâtre en retonde est construit, un jardin en terrasse à l’arrière du terrain est créé, de nouveaux pavillons sont élevés, d’autres changent d’affectation au fur et à mesure des acquisitions des terrains avoisinants. La décoration n’est pas oubliée au sein de cet établissement : trois peintures ornent l’amphithéâtre, dont deux représentent le professeur Arloing.

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Statue de Bourgelat
site de Vaise
© VetAgro Sup
Pôle Communication

La cour est ornée par la première statue de Claude Bourgelat faite par Fabisch en 1876, réquisitionnée durant l’occupation allemande et remplacée en 1956 par une seconde en pierre faite par Georges Salendre, transférée en 1978 sur le site de Marcy l’Etoile. Six bustes en bronze, effigies de professeurs entourent le cloître.
Faute d’élèves, l’Ecole de Vaise ferme ses portes durant la Première Guerre mondiale. Jusqu’en mars 1919, elle est réquisitionnée par le ministère des Armées et devient hôpital militaire auxiliaire. De nouveau, durant la Seconde Guerre mondiale, l’Ecole se retrouve sans élèves et certains laboratoires servent à des recherches sur les gaz de combat. Elle sert d’infirmerie lors du bombardement de la gare de Vaise le 26 mai 1944 et subit d’importants dégâts lors de l’explosion du pont de Serin, début septembre de cette même année.
Dès la fin de la Seconde Guerre mondiale, le nombre d’étudiants augmente considérablement : l’Ecole se trouve à l’étroit entre la Saône et la colline et souhaite disposer de locaux plus fonctionnels et plus spacieux. Le choix du nouvel emplacement se porte sur un terrain d’environ 44 hectares situé sur la commune de Marcy l’Etoile.

Aujourd’hui, c’est le Conservatoire National Supérieur de Musique et de Danse qui occupe les bâtiments situés quai Chauveau.

Marcy-l’Etoile à partir de 1978

La nouvelle école vétérinaire ouvre ses portes en 1978 à Marcy l’Etoile. L’architecte est Eugène-Elie Beaudouin (1898-1983). Le terrain sur lequel elle est construite, jouxte le vaste domaine de Lacroix-Laval acquis en prévision de l’installation d’une nouvelle université. Mais le projet universitaire n’est pas réalisé, isolant ainsi l’Ecole vétérinaire.

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VetAgro Sup
Marcy l’Etoile
© VetAgro Sup
Pôle Communication

Devenue VetAgro Sup en janvier 2010, elle est aujourd’hui l’un des deux campus de cet institut d’enseignement supérieur et de recherche en alimentation, santé animale, sciences agronomiques et de l’environnement, campus spécialisé dans les sciences de l’animal de laboratoire, la biologie appliquée à la santé publique, la médecine et l’élevage des grands animaux.
Cette entité forme les étudiants aux métiers de vétérinaires, d’ingénieurs agronomes et d’inspecteurs de santé publique vétérinaire.

L’Ecole Nationale des Services Vétérinaires (ENSV) créée en 1973 est aussi installée sur le campus de Marcy l’Etoile depuis 1992. Elle forme les inspecteurs de la santé publique vétérinaires, recrutés sur concours en quatrième année de cursus vétérinaire et en fin d’études d’ingénieur agronome. Elle contribue à une meilleure gouvernance sanitaire mondiale, prônée par l’Organisation mondiale de la santé animale (OIE) lui donnant le statut de centre collaborateur de l’OIE pour la formation des vétérinaires.

Au cœur du campus vétérinaire de Marcy l’Etoile, se trouve également le Centre Hospitalier d’Enseignement Vétérinaire (CHEV). En plus de la vocation pédagogique pour la formation des élèves vétérinaires, ce centre propose des soins allant de la médecine préventive jusqu’à l’hospitalisation d’animaux malades. Ainsi on y trouve une clinique pour les animaux d’élevage, une pour les animaux de compagnie mais aussi la clinéquine spécialement dédiée aux équidés.

Marcy l’Etoile abrite aussi un Centre équestre depuis 2004, et depuis plusieurs années, l’hippodrome de Parilly met à l’honneur l’Ecole vétérinaire de Lyon, avec le Prix du campus vétérinaire, lors d’une journée de courses nationales.

Pour en savoir plus :

- Lyon, berceau des sciences vétérinaires de Jack Bost,
- Les errances du souvenir de Claude Bourgelat in Rive gauche n°146, septembre 1998,
- Base Europresse : articles du Progrès depuis 1997, base accessible dans les bibliothèques du réseau de la Bibliothèque municipale de Lyon.

Evolution du métier de vétérinaire

Initialement formés pour soigner les animaux de rente en milieu rural dans un but économique, les vétérinaires se mettent à soigner de plus en plus d’animaux de compagnie en milieu urbain. Leur rôle d’acteur de la santé publique est de plus en plus important, ils maîtrisent les maladies transmissibles à l’homme directement ou indirectement, assurent le contrôle sanitaire des produits animaux qui entrent dans l’alimentation humaine devenant ainsi les garants de la sécurité alimentaire. Ils participent aussi à la protection de l’environnement et de la biodiversité.

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Timbre commémoratif
© La Poste
S. B-R

Depuis une trentaine d’années, les motivations du choix de ce métier ainsi que sa féminisation ont contribué à donner de nouvelles orientations pour les vétérinaires nouvellement diplômés. Actuellement, ceux-ci semblent se porter majoritairement vers l’installation en milieu urbain, ainsi que vers le salariat dans l’industrie pharmaceutique très présente en région Rhône-Alpes. Selon Jean-Louis Crosia, président de Mérial France, être vétérinaire en 2011, c’est aussi être capable de fournir les protéines animales indispensables à la population de demain en quantité et en qualité.

Pour en savoir plus :

- Vet 2011,
- VetAgro Sup,
- Ecole Nationale Vétérinaire d’Alfort,
- Ecole Nationale Vétérinaire de Toulouse,
- Ecole Nationale Vétérinaire, agroalimentaire et de l’alimentation, Nantes-Atlantique
- Le Tout Lyon en Rhône-Alpes n°4962, 17 septembre 2011,
- Essor. Edition du Rhône n°3359, 11 mars 2011,
- Le Tout Lyon en Rhône-Alpes n°4936, 19 mars 2011,
- Base Europresse : articles du Progrès depuis 1997, base accessible dans les bibliothèques du réseau de la Bibliothèque municipale de Lyon.

Documentation régionale, 2011

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