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Tableaux d’une révolution

Tino Caspanello

Barricadés à l’intérieur d’un stade de foot, 3 révolutionnaires, tentent désespérément de garder en vie leur désir de révolte.

Les 3 personnages de la pièce sont les derniers résistants d’une révolution dont on ne sait pas grand chose. Ils se nomment respectivement : 137, 584 et 892. Dehors, les autres, les soupçonnent, les surveillent et les attendent. Une femme viendra troubler la vie du clan.

La pièce est composée de 11 tableaux qui font écho à des tableaux de peintres célèbres : Rembrandt, Matisse, Degas, Renoir… Ils ponctuent de leurs univers les dialogues des personnages et soulignent les rapports de force.

Reclus dans ce stade, ils sont ce que la ville refuse de voir, ce qu’elle souhaiterait éliminer. Mais que signifie une révolution totalement déconnectée du monde qui l’entoure ? L’auteur nous parle de l’immobilité et de l’échec, plutôt que la célébration du soulèvement populaire. Cette révolution manquée fait écho à l’histoire de l’Italie.

La langue est très orale et vivante. Les répliques, hormis celle de la femme, sont courtes. Les répliques des hommes sont quasiment monosyllabiques. Beaucoup d’ironie et drôlerie avec ces loosers qui font penser aux personnages des romans policiers de Jean-Patrick Manchette. Mais ce texte interroge aussi. Avons-nous encore une chose pour laquelle lutter ? Aurons-nous encore le courage et la dignité pour le faire ?

Tino Caspanello

Né en 1960 en Sicile, Tino Caspanello est auteur, acteur, scénographe et metteur en scène.

Il est diplômé en scénographie Il fonde la compagnie Teatro Pubblico Incanto en 1993. Depuis, il écrit, interprète et met en scène ses propres textes..

En 2003, il a reçu le prix spécial du jury du Premio Riccione pour Mari, et en 2008 le prix Legambiente de l’engagement civil pour Malastrada, ainsi que le prix de l’ANCT (Association nationale des critiques de théâtre).

En 2014, le texte tableau d’une révolution est arrivé en tête des sélections Eurodram – Réseau européen de traduction théâtrale (Maison d’Europe et d’Orient, Paris).

Extrait

“TABLEAU 1 : Ronde de nuit

584   Une antenne !
892   Tu as volé une antenne !
137   Je ne l’ai pas volée ! Je ne l’ai pas volée ! Je l’ai prélevée !
584   Où ça ?
137   Sur un balcon.
892   Tu es entré dans une maison…
584   Tu es allé sur le balcon…
892   Et tu as… prélevé l’antenne ?
137   Plus ou moins.
584   Et il n’y avait personne ?
137   Où ça ?
892   Dans la maison.
137   Si, ils étaient tous à table.
584   Ils mangeaient ?
137   Tous ensemble ? Mais non ! Ils regardaient la télévision.
892   Et toi tu es entré…
137   Oui, j’ai dit « Bonsoir, il faut que j’aille sur le balcon. »
584   Et eux ?
137   Rien.
892   Rien ?
137   Non, ils n’ont pas dit un mot. Ils avaient l’air effrayés.

[…]

584   Tu as volé une antenne !
137   Je ne l’ai pas volée ! Je ne l’ai pas volée ! Combien de fois faut que je te le dise ? Je l’ai juste prélevée. Je… je n’ai jamais eu d’antenne, tu comprends ?
892   Vous n’aviez pas la télé ?
137   Si.
584   Et comment vous faisiez pour la regarder ?
137   Mon père avait raccordé notre télé à l’antenne des voisins. Ils ne se sont jamais aperçus de rien.
892   Ah, mais c’est un vice de famille, alors !
137   Quoi ?
584   Ton père, lui aussi il avait volé…
137   Prélevé ! Mon père avait prélevé un peu de signal. On était pauvres. On n’avait rien à bouffer. Point barre !
892   D’accord, mais on n’a pas besoin d’une antenne.
137   Non ?
584   Non. On n’aura pas la télé.”

Hélèna du département Arts vivants à la médiathèque de Vaise

Voir dans le catalogue de la BML

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