A l’origine des « cosy crimes »
Publié le 29/01/2025 à 10:00
- 6 min -
Modifié le 28/01/2025
par
MD
Si le style des cosy crimes connaît un nouvel âge d’or avec les livres de M.C. Beaton et son héroïne Agatha Raisin, l’espionne de Rhys Bowen, Mo Malo et sa "Breiz brigade"… ou les séries comme "Downtown Abbey". Ce style littéraire s’est développé avant tout à la fin du XIXe siècle. Ces "crimes à énigmes" ou "romans de détectives" apparaissent parallèlement à la structuration de la police. Auparavant le flagrant délit prévalait. Désormais la police mène des enquêtes, cherche des indices, résout des affaires. Ce nouveau fonctionnement fait naître dans l'imagination des romanciers de nouveaux personnages, les détectives. Voici quelques auteurs du premier âge d’or « des crimes à énigmes » à retrouver dans les collections du silo moderne.
Une base narrative commune
Dans chaque histoire, le lecteur retrouve :
- l’absence de crime sanglant,
- un enquêteur singulier n’appartenant pas à la police (Miss Marple, Sherlock Holmes, Miss Silver, Rouletabille…),
- une action se déroulant au sein d’un groupe restreint de personnages (communauté, village, famille),
- et des récits ponctués d’humour.
Ces principes vont même être fixés en 1929 par Ronald Knox. Il détaille dix règles pour le roman policier qui seront reprises par les auteurs de cosy crimes.
Deux auteurs précurseurs :

Commençons par le détective le plus connu d’entre tous : Sherlock Holmes. Il apparaît comme l’ancêtre des cosy crimes. La première apparition de l’anti-héros d’Arthur Conan Doyle date de 1887. Quatre romans et cinquante-six nouvelles paraîtront permettant l’évolution du personnage. Avec son esprit vif, ses connaissances en médecine et en sciences Sherlock Holmes résout des enquêtes en compagnie de son acolyte, le Docteur Watson. A qui il lance son fameux : Elémentaire mon cher Watson !. Ce personnage cynique et sarcastique, appréciant peu les interactions sociales, a traversé les âges et est devenu un classique des romans policiers. Vous pouvez redécouvrir ses enquêtes dans Les aventures de Sherlock Holmes, l’intégrale des aventures.
Un romancier français va lui aussi créer un enquêteur atypique. C’est Gaston Leroux, en 1907, avec le personnage de Rouletabille. Journaliste logique et rationnel, il commence à enquêter lors de ses reportages. Grâce à ses qualités, il dénoue les mystères dans 8 romans dont les plus célèbres sont Le parfum de la dame en noir et Le mystère de la chambre jaune.
Mais c’est au Royaume-Uni que le « cosy crimes » se développe le plus.
Trois autrices emblématiques du cosy crimes :
Agatha Christie

En 1920, Agatha Christie crée le personnage d’Hercule Poirot. Un policier belge à la retraite installé à Londres suite à l’invasion allemande en Belgique durant la Première guerre mondiale. Reconnaissable à sa moustache parfaitement taillée, son chapeau melon et sa cane. Ses capacités intellectuelles développées lui permettent de résoudre des crimes d’un point de vue psychologique et non pas en recherchant des indices matériels.
Pour se faire, il assemble les indices pour reconstituer la chronologie du crime et les résolutions se déroulent toujours de la même manière. Tous les protagonistes sont réunis dans une même pièce, Hercule Poirot remonte le fil de l’histoire. Il propose différentes hypothèses et termine en dévoilant le nom du coupable. L’enquêteur sera le héros de 33 romans et 51 nouvelles. Une série télévisée a aussi été développée.
En parallèle de cette série, Agatha Christie va développer un autre personnage, Miss Marple. Elle apparaît pour la première fois en 1930, c’est une dame âgée qui vit dans la campagne anglaise. Pour découvrir la vérité, elle bavarde avec les protagonistes de l’affaire. En recoupant les dires des personnages et grâce à sa connaissance de la nature humaine, elle résout des affaires. On peut suivre ses aventures dans 12 romans.

Tous ces romans se trouvent dans les Œuvres complètes d’Agatha Christie.
Patricia Wentworth
Une autre autrice anglaise a déjà créé une enquêtrice singulière quelques années avant Agatha Christie. En 1928, Patricia Wentworth publie la première histoire de Miss Maud Silver, ancienne préceptrice devenue détective. Les codes du « cosy crimes » sont présents avec une enquêtrice observatrice qui fait parler les personnages pour les mettre en confiance et s’assurer leurs confidences.
Miss Silver est toujours accompagnée de son tricot, un point commun de plus avec Miss Marple. D’ailleurs, de nombreux critiques estiment qu’Agatha Christie s’est inspirée de Miss Silver pour créer Miss Marple. Même si la deuxième connaîtra un plus grand succès que la première.
La première enquêtrice tricoteuse est à retrouver ici.
Dorothy Sayers
Elle publie, en 1923, la première aventure de Lord Peter Wimsey, un aristocrate détective. Elle l’utilisera pour critiquer les codes et normes de la société anglaise de l’époque. Son personnage aura, à la différence des autres enquêteurs, une vie amoureuse et deviendra même père. En 1949, Dorothy Sayers deviendra présidente du Detection club qui regroupe les auteurs de romans policiers anglais. Elle fréquentera à cette occasion Agatha Christie qui prendra sa succession à sa mort.
D’autres auteurs ont eux aussi créé leur enquêteur loufoque :
- John Dickson Carr et son Dr Gideon Fell, un universitaire et criminologue réputé, amateur de bière et fumeur de pipe.
- Margery Allingham et le détective Albert Campion, gentleman excentrique.
- Gilbert Keith Chesterton et son détective en soutane, le père Brown.
Tous ces auteurs ont participé à l’institutionnalisation des codes du roman à énigmes. Ces codes ont été repris par de nombreux romanciers durant le XXème siècle puis sont tombés en désuétude face aux romans noirs. Mais ces dernières années, les cosy crimes connaissent un nouvel élan avec des auteurs à découvrir dans cet autre article: Vous reprendrez bien une part de “Cosy Mystery”.
Pour aller plus loin:
- Dorothy Sayers et le roman policier moderne
- “Cosy crimes” : le plaisir désuet des romans à énigmes
- Le roman à énigmes par Yves Reuter
- Le Détection club de Jean Harambat
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