
La mélodie sans les paroles
Catherine Benhamou
lu, vu, entendu par Dominique - le 19/03/2022
Dans l’Amérique puritaine du 19ème siècle, une femme, Elisabeth, consciente de son génie créatif, se cloître chez elle. Elle vit dans le silence et la solitude, afin de se vouer à la pratique de la poésie.
Dans cette société, les femmes appartiennent corps et âme, à leur mari. De plus, elles n’ont le droit d’exprimer aucuns talents créatifs ou intellectuels. C’est dans ce contexte qu’Elisabeth se découvre un talent de poète. Comme elle hérite de son père, elle décide de se retirer de toute vie sociale. Alors elle s’enferme dans sa chambre, qu’elle ne quittera plus : c’est grâce à sa sœur, qu’elle pourra vivre ainsi car cette dernière reconnaît son talent et lui voue son existence.
Cette vie de recluse lui permet de se protéger du jugement cruel de la société des hommes. En effet, son isolement en amortit les chocs. Ainsi, elle peut vivre pleinement sa créativité, dans une société qui ne veut et ne peut reconnaître le talent des femmes.
Avec le personnage d’Elisabeth, Catherine Benhamou, écrit une pièce en forme de portrait de la poétesse Émily Dickinson. Le jeu des points de vue des personnages, autour d’Elisabeth, éclaire le choix profond de cette femme opiniâtre. On y découvre, entre autre, que la poésie est un sacerdoce.
Emily Dickinson, a produit plus de 1800 poèmes qui connurent un immense succès lors de leur publication, à titre posthume. Aucun de ses poèmes ne fut publié de son vivant. La réclusion et l’édition posthume, était sans doute la condition nécessaire à la reconnaissance d’un talent féminin.
Cette pièce est une belle réflexion sur la poésie et l’état de poète. Elle provoque une appétence à cet art et elle donne envie de découvrir les poèmes d’Emily Dickinson.
L’auteure
Extrait
Elisabeth : Plantée là au milieu de l’espace immense – une mer – comment la franchir sans être une algue – Rien à craindre pour ma santé mentale –
Sortir dans le jardin ? N’y pense même pas – insensé – à moins d’être une plante – faire partie du monde végétal – être un brin d’herbe, une pâquerette qui pousse au bord des tombes – dans les interstices – entre les pierres au pied des tombes – une méduse qui n’existe que par l’eau – qui est elle-même – l’eau – Pourquoi suis-je là – comment suis-je venue – qui m’aidera – où sont mes amis – ceux de mon espèce – Les autres méfiez-vous de moi – ne me croyez pas – ils croient que je peux quelque chose – les sauver peut-être ? – empêcher les fleurs de faner – les feuilles de tomber – les oiseaux de partir – le jour de finir – mon père de mourir – Suzy – de m’abandonner – Ils ne savent pas que je ne peux rien –
Je n’ai que des mots que ça – quoi d’autres […]
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