Au temps des requins et des sauveurs
Kawai Strong Washburn
lu, vu, entendu par msibers - le 28/01/2022
« Je n'entends pas ta voix, mais je sais que tu écoutes, tu écoutes tout le temps. Donc je peux te le dire : il y a des moments où je suis convaincue que rien de tout cela ne serait arrivé si nous étions restés sur Big Island, où les dieux sont encore vivants. »
Un jour bleu comme l’océan, le petit Nainoa Flores tombe à l’eau. Aussitôt, les requins sont là, autour de lui, dont la tête disparaît peu à peu. Et puis un miracle : délicatement, presque tendrement, un requin saisira l’enfant dans ses crocs pour le ramener à ses parents. Mais on n’est là qu’aux prémices de l’histoire des Flores dans laquelle résonne Hawaï, ses mythes et ses misères.
On est bien loin de la carte postale : chez Washburn, le commerce de la canne à sucre met des familles entières sur la paille, c’est le continent et ses cités qui font rêver. Mais qu’on ne s’y trompe pas, on n’est pas dans un Zola contemporain. Le splendide côtoie le misérable. L’écriture est brève mais vibrante. Rien n’est complètement noir puisque la vie trouve toujours son chemin. Parfois avec rage, parfois avec tendresse.
Tout comme son île, les mots de Washburn sont aussi durs que riches d’une histoire puissante. Le sauvetage magique de « Noa » fait résonner, au cœur de sa famille, les mythes et les croyances des Hawaïens. Le pouvoir dont est investi l’enfant sera pour un eux un don des dieux anciens, mais aussi une malédiction que tous auront à porter au long de leur chemin.
Dans des chapitres dont ils sont narrateurs à tour de rôle, nous suivons Malia et Augie, les parents, Nainoa, Dean et Kaui, la fratrie. Et tous s’inscrivent dans cette symphonie humaine, tremblante et gigantesque.
En quittant ce roman, en tournant la dernière page, on conserve dans les doigts un peu de la vibration qui nous a accompagnés pendant ses 400 pages. Et on espère la retrouver dans son second roman.
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