Cerveau féminin / cerveau masculin

- temps de lecture approximatif de 10 minutes 10 min - Modifié le 30/09/2022 par Admin linflux

Hommes et femmes, avons-nous le même cerveau ? Entre inné et acquis, entre facteurs biologiques et facteurs humains, ce sujet fait encore débat dans les milieux scientifiques. Voici néanmoins quelques pistes de réflexion.

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Hommes, femmes, avons-nous le même cerveau ? La différence des sexes s’expliquerait-elle, dès la naissance, par une différence de structure entre le cerveau des garçons et des filles ? Nos identités d’hommes et de femmes seraient alors irrémédiablement déterminées ? Et si nous quittions Mars et Vénus pour nous intéresser aux recherches les plus récentes ? Ces dernières années, les biologistes se sont basés sur les principes de sélection sexuelle définis par Darwin en 1871 alors que la plupart des chercheurs en sciences humaines ont étudié les différences sexuelles dans une perspective très éloignée, celle des rôles socioculturels assignés à chacun des sexes, lesquels expliqueraient la plupart de ces différences.

1- Des différences biologiques
2- Madame a la migraine, monsieur perd la tête
3- La théorie des deux cerveaux
4- A chacun son histoire, à chacun son cerveau
5- Quand l’enfant devient garçon ou fille ou d’un sexe à l’autre

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Journal du Net


[actu]1- Des différences biologiques[actu]

Posons la question crûment : si l’on place le cerveau d’un être humain entre les mains des chercheurs, sont-ils capables de nous dire s’il s’agit du cerveau d’une femme ou de celui d’un homme ?

La réponse est “oui”, évidemment, puisque toutes les cellules de notre corps sont sexuées : sur les 46 chromosomes contenus dans chaque cellule, il y en a un qui est plus petit dans les cellules mâles. C’est le fameux chromosome “y”, celui qui entraîne des variations dans la production des hormones sexuelles, masculinisant ainsi le foetus qui se développe…

Autre constatation des chercheurs : le volume intracrânien des hommes est un peu plus grand que celui des femmes – ce qui est dû à une plus grande taille des deux hémisphères. La taille du cervelet est comparable entre les deux sexes.

Etablir une corrélation entre la taille du cerveau et l’intelligence était tentant. C’est ce que n’ont pas hésité à faire certains scientifiques au XIXème pour expliquer que les femmes étaient bien moins intelligentes que les hommes.
En 1879, le médecin Gustave le Bon proclamait “…les cerveaux de nombre de femmes sont plus rapprochés en taille de ceux des gorilles que de ceux des cerveaux mâles les plus développés. Cette infériorité est si évidente que nul ne peut la contester pour un moment ; son degré seul vaut la peine d’être discuté… »

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Anatole France et Albert Einstein

Il ne pouvait pas savoir que le cerveau d’Einstein d’où a émergé la théorie de la relativité était un tantinet plus petit que la moyenne ! …

Si aujourd’hui les partisans de cette idée se font rares, l’idée que des divergences anatomiques déterminent la disparité comportementale entre sexe est encore largement répandue.

- A regarder La 3ème partie du documentaire Voyage au centre du cerveau « Une affaire de sexe » diffusé sur Arte

- A écouter ces émissions de radio canadienne « par 4 chemins » du 10 mars 1999 et celle du 11 mars 1999




- A lireHommes-femmes : l’évolution des différences sexuelles humaines par David C. Geary aux éditions De Boeck, 2003.

Les hommes et les femmes sont-ils différents ? La théorie évolutionniste explique la manière dont les humains ont su s’adapter, biologiquement et culturellement, aux contraintes environnementales. Par une revue de la littérature scientifique sur le sujet, il apporte une vision structurée des différences entre les sexes chez les humains, notamment au chapitre 8 “différences sexuelles du cerveau et de la cognition (pp. 305-355)”.


[actu]2- Madame à la migraine, Monsieur a perdu la tête…[actu]

C’est aux hormones et à leurs fluctuations durant le cycle féminin (oestrogènes et progestérones) que les médecins attribuent la fréquence plus élevée des migraines chez les femmes. Elles en souffrent environ trois fois plus que les hommes. Cette inégalité ne vaut que pour les adultes, car, jusqu’à la puberté, il n’y a aucune différence notable entre garçons et filles.
C’est une inégalité relative, car on attribue à ces mêmes hormones un effet réparateur sur le cerveau. Ainsi, les statistiques montrent que les femmes récupèrent mieux leurs facultés en cas de traumatisme crânien ou d’attaque cérébrale. Et leur cerveau vieillit, en général, beaucoup mieux que celui des hommes.

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© Filipandré

A lire :
- Cerveau d’hommes, cerveau de femmes : le point sur les différences

- Ce dossier du journal du net

- Monsieur Cerveau, Madame Cervelle

[actu]3- La théorie des deux cerveaux[actu]

Dans les années soixante-dix, des chercheurs américains lançaient la théorie des deux cerveaux : l’hémisphère gauche serait spécialisé dans le langage et le raisonnement analytique, tandis que l’hémisphère droit serait spécialisé dans la représentation de l’espace et des émotions.
Le pas a été vite franchi pour attribuer les différences psychologiques entre les hommes et les femmes à des différences entre les hémisphères cérébraux.

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theorie des deux cerveaux


Dans certains milieux scientifiques, principalement aux Etats-Unis, il est prétendu que ce sont les différences innées de capacités mentales entre les hommes et les femmes qui déterminent leurs représentations sociale et professionnelle. Ainsi, rien ne sert d’inciter les femmes à suivre des filières scientifiques et mathématiques. Si elles n’y vont pas, c’est que leur tendance naturelle ne les y pousse pas puisqu’elles y réussissent moins bien que les hommes.
Avec les nouvelles techniques d’imagerie cérébrale qui permettent de voir le cerveau vivant en train de fonctionner, nombre de spéculations sur les différences de modes de fonctionnement entre les sexes n’ont plus cours.
Prenons pour exemple, les meilleures compétences des hommes en mathématiques, qui résulteraient d’un plus grand développement de l’hémisphère droit par rapport à la femme. Des expériences utilisant l’IRM fonctionnelle montre précisément le contraire : pour résoudre des problèmes de calcul arithmétique, les régions les plus activées sont le cortex frontal gauche ainsi que les aires pariétales gauche et droite, et ce quel que soit le sexe des sujets.



Hommes, femmes, avons-nous le même cerveau ? / Catherine Vidal aux éditions du Pommier, 2007.

Le cerveau, siège de la pensée, est soumis à une part d’inné et à une part d’acquis et ce sont alors les identités d’hommes et de femmes qui se forgent. L’auteure s’interroge alors sur le sexe du cerveau, notamment en raison des connaissances récentes sur son fonctionnement.
Ce sujet fait encore débat
dans les milieux scientifiques. Il suffit de se rendre sur ceblog.


[actu]4- A chacun son histoire, à chacun son cerveau[actu]

Quand le nouveau-né voit le jour, son cerveau compte cent milliards de neurones – plus que d’étoiles dans la galaxie ! -, qui cessent alors de se multiplier. Mais la fabrication du cerveau est loin alors d’être terminée, car les connexions entre les neurones, ou synapses, commencent à peine à se former : seulement 10% d’entre elles sont présentes à la naissance ; les 90% restantes se construiront plus tard.
Dans les processus éminemment complexes du développement du cerveau, les stimulations de l’environnement sont indispensables pour guider la mise en place de réseaux de neurones permettant d’assurer les grandes fonctions sensorielles, motrices et cognitives. C’est l’environnement dans son ensemble qui participe à la construction du cerveau. Grâce aux nouvelles techniques d’imagerie cérébrale, comme l’IRM, on peut désormais « voir » le cerveau se modifier en fonction de l’apprentissage et de l’expérience vécue.
Par exemple, dans le cerveau de musiciens professionnels, on a pu montrer des modifications du cortex cérébral liées à la pratique intensive de leur instrument. Chez les pianistes, on observe un épaississement des régions spécialisées dans la motricité des doigts ainsi que dans l’audition et la vision. Ces changements sont directement proportionnels au temps consacré à l’apprentissage du piano pendant l’enfance.
Notre histoire individuelle est ainsi sculptée dans notre cerveau tout au long de notre vie. Il en résulte que personne ne possède exactement le même cerveau, y compris les vrais jumeaux.

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Les sciences et la fabrication du masculin et du féminin

/ dir. Delphine Gardey , Ilana Löwy aux éditions des Archives contemporaines

Comprendre ce que sont les hommes et les femmes, penser la différence entre les sexes a constitué et constitue encore un objet d’investigation et un enjeu politique et social de premier ordre. Des sciences d’hier à celles d’aujourd’hui, des discours et des pratiques médicales aux plus récentes sciences humaines, les auteurs de cette ouvrage révèlent la fragilité des évidences dites sur la nature ou le corps des femmes et des hommes, insistent sur la force des arrangements et organisations du social qui ont pu en découler.



[actu]5- Quand l’enfant devient garçon ou fille ou d’un sexe à l’autre[actu]



Nos enfants aussi ont un sexe de Stéphane Clerg aux éditions Laffont, 2001.

Le développement harmonieux de la personnalité des enfants dépend intimement du développement sans heurts de leur identité sexuelle. Ni honte, ni scandale à en parler. A quel âge l’enfant prend-il conscience de son identité sexuelle ? Comment ? Par quels facteurs ? Qu’est-ce que le complexe d’Oedipe ? Pour comprendre la vie intérieure des petits.

« C’est une fille ou un garçon ? ». L’annonce d’une naissance commence en général par le sexe. Mais, dans un cas sur quatre mille, l’exercice se révèle délicat : l’appareil génital est ambigu ou contraire au sexe génétique. Certains nouveau-nés possèdent par exemple un chromosome Y, mais pas de pénis. Dans l’urgence, le médecin doit lui-même assigner à l’enfant un sexe qu’il maintiendra par la chirurgie et le traitement hormonal. Ce faisant, il transforme définitivement l’intersexué en fille ou en garçon … Une telle décision médicale, prise de façon plus ou moins arbitraire, peut avoir des conséquences tragiques quand l’enfant développe une identité sexuelle différente du sexe assigné. De plus, cette notion d’intersexué introduit le concept de sexe comme un continuum et non comme deux sexes opposés. La situation n’est pas sans rappeler celle d’enfants qui malgré des organes reproducteurs normaux, ne parviennent jamais à s’identifier à leur sexe biologique. Ceux-là peuvent décider de changer de sexe à l’âge adulte pour devenir transsexuels. Ces cas hors norme posent d’importantes interrogations en ce qui concerne l’apparition du genre : quand, comment, pourquoi les différences entre sexes se développent-elles ? Si les processus hormonaux produisant des corps mâle ou femelle sont bien compris, la façon dont les différences sexuelles se forgent dans le cerveau reste énigmatique. Trois explications sont avancées : la première, dominante, y voit l’action des hormones ; la deuxième fait appel à la génétique, et la dernière, à l’expérience, au vécu.


A lire cet article de La Recherche n° 388 de juillet-août 2005 : “Grandir : l’enfant et son développement”

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