Plagiocéphalie
Publié le 05/08/2017 à 12:31
- 6 min -
par
Bib4
Pour permettre au bébé de se frayer un passage durant la naissance, puis au cerveau de rapidement se développer, le crâne du nourrisson a la particularité d’être malléable. Il peut donc se « déformer » dans différentes circonstances
En grec, plagiocéphalie veut dire “crâne plat”, on utilise donc ce terme pour décrire une asymétrie crânienne ou le syndrome de la tête plate.
Dr Nathalie Gelbert, pédiatre et présidente de l’AFPA (Association Française de Pédiatrie Ambulatoire) rappelle :
« Pour permettre au bébé de se frayer un passage durant la naissance, puis au cerveau de rapidement se développer, le crâne du nourrisson a la particularité d’être malléable. Il peut donc se « déformer » dans différentes circonstances. En l’occurrence, on distingue deux types de plagiocéphalie, précise la pédiatre. Celle présente dès la naissance du bébé et celle qui s’installe à 2-3 semaines de vie. […] La plagiocéphalie est certes inesthétique, mais prise en charge tôt grâce à des techniques de repositionnement, elle est généralement transitoire et bénigne. A l’examen, le pédiatre écartera toute suspicion de pathologie bien plus sérieuse comme la craniosténose (l’une des sutures du crâne se ferme trop tôt). »
La plagiocéphalie peut se manifester lorsqu’un nourrisson a toujours la tête placée dans la même position quand il dort. En effet, le crâne des bébés est très mou, et les os peuvent s’aplatir sous la pression.
Puisque les muscles du cou des jeunes nourrissons sont faibles, ceux-ci ont tendance à tourner la tête sur le côté lorsqu’ils sont placés sur le dos. S’ils tournent toujours la tête du même côté, leur crâne s’aplatit sur ce côté et à l’arrière. Un léger aplatissement disparaît de lui-même, mais un aplatissement plus prononcé peut être permanent.
En 2011, la société canadienne de pédiatrie citant les chiffres d’une étude réalisée en 2004 estime que
« l’incidence de la plagiocéphalie positionnelle est de 16 % à six semaines, de 19,7 % à quatre mois, de 6,8 % à 12 mois et de 3,3 % à 24 mois ».
Pourquoi on en parle en ce moment ?
Parce que, interpellée en avril 2017, par une association de défense de patients, le Lien, la Haute autorité de santé (HAS) vient de rendre son avis.
Dans une décision du 28 juin dernier, la HAS . Elle reconnait que dans les cas les plus sévères, la plagiocéphalie peut entrainer des complications mécaniques, sur le plan maxillo-facial ou cervico-brachial, voire cognitives et annonce sa décision d’élaborer deux documents portant sur la prévention des risques de plagiocéphalie chez le nourrisson :
– une fiche mémo pour professionnels de santé ;
– un document d’information destiné au public
Certaines associations redoutent que l’information amplement relayée par la presse, et parfois de façon alarmiste remette en cause les préconisations de couchage sur le dos.
Non au retour au couchage sur le ventre
« Parler de la plagiocéphalie n’autorise pas à anéantir 25 ans de prévention de la mort inattendue du nourrisson ! il faut continuer de coucher les bébés sur le dos, c’est vital… ! »
s’alarme l’association Naitre et Vivre.
« Dès que l’on pointe les complications liées aux têtes plates, comme les scolioses, les déformations de la mâchoire, on est accusé de remettre en cause la position sur le dos. On ne veut évidemment pas revenir au couchage sur le ventre ! Nous disons seulement qu’il existe d’autres solutions… »
explique au Parisien Claude Rambaud, vice-présidente de l’association le Lien qui milite pour que la plagiocéphalie soit une pathologie reconnue et prise en charge par la sécurité sociale.
De nombreuses études américaines, canadiennes, françaises ont démontré une baisse significative de mortalité inexpliquée du nourrisson après les recommandations de faire dormir les bébés sur le dos.
Au Canada, on est passé de près de 400 décès par an en 1989 à moins de 150 en 1999.
En France, la recommandation de coucher son enfant sur le dos (1994) a réduit de 75 % le taux de mort subite du nourrisson, entre 1991 et 1997.
Ni même sur le côté !
L’Association nationale des centres référents sur la mort inattendue du nourrisson (Ancremin) s’alarme du fait que les craintes liées aux plagiocéphalies puissent remettre en cause le couchage sur le dos. « Le couchage sur le côté augmente singulièrement le risque de mort inattendue par basculement puis étouffement ».
Selon cette association de professionnels de santé, la plagiocéphalie est avant tout due au fait que “le bébé soit empêché de varier ses postures et ne soit pas libre de sa motricité”. Cela peut être notamment le cas lorsque le nourrisson est installé pendant une longue durée dans un siège destiné au transport en voiture, un transat, etc…
L’association « Plagiocéphalie Infos et soutien » a édité une plaquette sur la prévention des déformations positionnelles dans laquelle elle insiste : « le couchage sur le dos doit être maintenu pendant le sommeil ».
Alors, comment prévenir la plagiocéphalie positionnelle ?
Dès 2001, la Société canadienne de pédiatrie formulait dans un article intitulé la plagiocéphalie positionnelle et la position du sommeil les recommandations pour prévenir le syndrome de la tête plate :
- Quand le bébé est éveillé et surveillé le placer un certain temps et plusieurs fois par jour sur le ventre
Cela lui permet d’acquérir un bon tonus des muscles du cou et du tronc
- Au coucher, varier les positions de la tête du nourrisson couché sur le dos: par exemple en pratiquant le contre-positionnement.
Il s’agit de changer l’orientation du bébé dans sa couchette. Lorsqu’il est couché, le bébé préfère regarder dans la pièce plutôt que vers le mur. En alternant son orientation, il conserve le même champ de vision sans avoir toujours la tête dans la même position. Par exemple, les jours pairs, la tête du nourrisson peut être placée à la tête de la couchette, tandis que les jours impairs, elle l’est au pied.
L’installation d’un mobile du côté de la couchette qui donne vers la chambre permet également au bébé de regarder quelque chose d’intéressant.
Et de conclure :
« Si, malgré ces stratégies, le bébé a une zone plate sur la tête, il serait judicieux d’obtenir une évaluation médicale pour écarter des pathologies plus graves ».
En France, l’assurance maladie propose déjà les mesures suivantes :
- quand vous donnez le biberon, tenez votre enfant alternativement dans votre bras droit ou gauche ;
- alternez si possible les positions de sa tête pendant ses périodes d’éveil, en le mettant à plat ventre ou sur le côté. Pensez-y lors du change, quand vous portez votre bébé, quand il est dans son lit ou son transat ; veillez à ce qu’il ne s’endorme pas dans cette position ;
- installez souvent votre enfant sur un tapis d’éveil, à plat ventre et sous surveillance, pour qu’il apprenne à relever la tête. Cela renforce aussi le tonus des muscles du cou ;
- parlez-lui en vous plaçant du côté opposé à celui sur lequel il préfère tourner sa tête, pour l’inviter à vous regarder ;
- quand il est dans son lit ou son transat, proposez-lui des jouets sonores et colorés, placés de façon à attirer son regard sur le côté.
Il y a fort à parier que les documents qui seront produits par la HAS auront, à peu de chose près la même teneur…
A lire également : Mon bébé n’aura pas la tête plate : prévenir et traiter la plagiocéphalie, Thierry Marck et Bernadette Gasquet.
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