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Pour comprendre l’origine de la crise des opioïdes, il faut remonter jusqu’à la fin des années 90, dans les locaux du laboratoire Purdue Pharma, propriété de la famille Sackler. A l’époque, à l’approche de l’expiration du brevet de son médicament MScontin, un opioïde prescrit pour les patients souffrant de cancers, Purdue se lance dans un projet ambitieux : élargir considérablement sa clientèle en proposant un opioïde pour le traitement des douleurs chroniques : l’Oxycontin. La prescription d’opioïdes était jusqu’alors réservée aux patients en fin de vie en raison de leur caractère addictif.

Pour mener à bien ce projet, Purdue réalise un coup de force : renverser l’opinion des praticiens au sujet des opioïdes. Les représentants commerciaux de Purdue assurent que leur nouveau médicament ne cause pas de dépendance. Ils introduisent de nouveaux concepts tels que la « pseudo-addiction », terme désignant des symptômes similaires à ceux de la dépendance, mais attribués à une douleur non traitée (qui doit être apaisée, selon eux, par le biais d’une augmentation de la dose administrée au patient).

Parallèlement, l’entreprise nourrit un mouvement en faveur d’une meilleure prise en charge de la douleur, communiquant massivement autour d’une « épidémie de la douleur » qui ravagerait les Etats-Unis et aurait pour cause la stigmatisation des opioïdes. Au cœur de cette lutte contre la douleur, des associations prétendument indépendantes, secrètement financées par Purdue.

La commercialisation de l’Oxycontin est un succès colossal, mais un désastre pour la santé publique, car les risques d’addiction liés au médicament sont bien réels, et, pour de nombreux patients, l’Oxycontin conduit à une surconsommation de médicaments parfois létale, voire à une transition vers d’autres opioïdes vendus illégalement.

Impulsée par la prescription croissante d’opioïdes, l’épidémie se poursuit et entre aujourd’hui dans sa quatrième vague, qui se distingue par une augmentation des overdoses causées par un opioïde couplé à un stimulant (cocaïne, amphétamines…).