Morts pour la science

- temps de lecture approximatif de 7 minutes 7 min - Modifié le 30/09/2022 par Admin linflux

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Depuis l’origine des temps, les sciences sont jonchées de cadavres. Assassinats de rivaux, suicides de génies s’estimant incompris, querelles de paternité tournant au drame, vengeances de collaborateurs spoliés, expériences qui ont mal tourné … L’histoire des sciences est peuplée de scènes de crimes comparables à celles imaginées par les meilleurs auteurs de romans policiers… En maths, ce sont les suicides qui abondent. La physique et la chimie, évidemment, ont leur lot d’accidents du travail.

1 – Les mathématiques nuisent gravement à la santé

2 – La science au péril de sa vie

1 – Les mathématiques nuisent gravement à la santé



Connaissez-vous Hypathie d’Alexandrie ? La fille de Théon, le directeur de l’université de l’antique métropole et directeur de sa célèbre bibliothèque, était la seule mathématicienne de l’Antiquité. Géométrie, algèbre, astronomie, rien n’arrêtait son intelligence. Pourtant, cet esprit brillant, qui dirigeait aussi une école de philosophie, sera assassinée en 415. Ce crime aurait été commandité par une autorité ecclésiastique pour qui une femme ne devait pas se mêler de sciences.

Alejandro Amenabar retracera la vie de ce personnage hors du commun dans son prochain film Agora (sortie prévue en 2009).

Brillant théoricien, Archimède était aussi un ingénieur qui inventa la vis sans fin, ou des machines pour la défense de Syracuse comme la catapulte. Grâce aux créations d’Archimède, Syracuse résista pendant 3 ans aux Romains lors de la Seconde Guerre Punique. Mais la ville finit par être prise, et Archimède décède lors de l’invasion. La fin de sa vie est décrite ainsi par Plutarque :

Comme le destin le voulait Archimède était en train de résoudre un problème par un diagramme, et avait les yeux et l’esprit fixés sur l’objet de sa réflexion ; il ne remarqua pas l’entrée des Romains, ni le fait que la villa a été prise. Inopinément, un soldat survint et lui demanda de l’accompagner. Comme il refusait d’obtempérer tant que son problème n’était pas résolu, le soldat fou de rage brandit son sabre et le transperça …

Tous les mathématiciens ne meurent pas assassinés, certains (Yukata Taniyama, Renato Cacciopoli et Alan Turing, …) se suicident ou deviennent fous (Kurt Gödel).

Pendant plus de trois siècles, le dernier théorème d’un mathématicien toulousain de génie a défié l’entendement et même poussé certains chercheurs au suicide. Le problème avait été posé en 1637 par le juriste et mathématicien toulousain Pierre de Fermat. Avec ce commentaire, à côté de l’équation diabolique : « J’ai une démonstration véritablement merveilleuse, que cette marge est trop étroite pour contenir. » Tous ses théorèmes furent redémontrés, à la seule exception du « dernier », qui devait donc résister jusqu’à l’aube du IIIe millénaire. Et devenir la plus formidable énigme mathématique de tous les temps, avant qu’elle ne soit enfin résolue par Wiles après dix ans de travail acharné.





Simon Singh dans le dernier théorème de Fermat met en scène la cohorte des allumés qui, au cours des âges, devaient taquiner la formule avec des succès limités, le plus souvent sans succès du tout.

La formule de Fermat peut tuer : en 1958, le mathématicien japonais Yutaka Taniyama se suicida, par désespoir de ne pas avoir trouvé.


Les démons de Gödel

Gödel, qui craignait d’être empoisonné, mourra quasiment d’inanition (il ne pesait plus alors que 29 kg). Il croyait aux anges comme au diable – parmi bien d’autres étrangetés – et tente au cours des années de constituer ses idées bizarres en un système logiquement cohérent, dont l’analyse éclaire d’un jour nouveau ses découvertes mathématiques. Un livre aussi inquiétant que stimulant.

2 – La science au péril de sa vie


Les pratiques expérimentales, dangereuses jusqu’à l’inconscience, s’étaient répandues chez les physiciens du XVIIIème siècle, ou tout du moins parmi ceux qui se donnaient pour mission d’étudier la foudre, l’un des principaux thèmes de recherche du moment. Nombre d’entre eux frôlèrent la mort, sauf …Georg Wilhelm Richmann qui y succomba.




A Saint-Pétersbourg, afin d’étudier confortablement la foudre, le physicien Georg-Wilhelm Richmann avait installé un long conducteur métallique capable de la guider jusque sur son bureau. Son dispositif – très au point il faut croire – fonctionna au-delà de toute espérance. Le 6 août 1753, Georg-Wilhelm – le premier savant à avoir reniflé un éclair d’un peu trop près – mourut en martyr de la science, foudroyé dans son fauteuil de bureau avec une forte odeur de viande brûlée.




La science au péril de sa vie

Comment a-t-on calculé la distance de la Terre du soleil ?
Depuis quand savons-nous que notre planète est aplatie aux pôles ?
Pour effectuer les mesures de la Terre et du ciel, des savants ont entrepris des expéditions aussi périlleuses qu’incertaines et sont allés jusqu’au bout du monde, poussés par la seule soif de connaître. Ce sont les fabuleuses aventures de La Condamine au Pérou, de Maupertuis en Laponie, de Chappe d’Auteroche en Sibérie, de Méchain en Espagne et de bien d’autres astronomes souvent restés dans l’ombre que retrace ici Arkan Simaan.

Morts pour la science




A lire cet ouvrage très original, la science n’est pas une sinécure. L’auteur a recensé vingt-trois suicides, vingt-et-un meurtres, huit accidents mortels et quatre cas de décès d’origine douteuse en deux mille ans d’histoire des sciences. Il ajoute même quelques cas litigieux où la mort ne peut pas être rattachée clairement à l’activité scientifique de la victime (chagrin d’amour d’Evariste Galois, accident de Pierre Curie …). Patiemment, il a classé ses cas par discipline.


Difficile voire impossible d’énumérer les génies morts incompris dans la misère la plus totale et ignorés de tous (Denis Papin), ceux qui dérangeaient (Giordano Bruno ou Diane Fossey) ou encore ceux dont la maladie est due à leurs travaux (Marie Curie) …

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