Aux origines de Mai 68, les avant-gardes américaines (1/3)

- temps de lecture approximatif de 14 minutes 14 min - Modifié le 02/05/2018 par rjosserand

La contre-culture américaine, importée en France à partir des années 1960, est une toile de fond des mouvements politiques qui secouent le pays. Cette culture beatnik, conjuguée à l'héritage surréaliste et situationniste, va considérablement influencer les artistes de l'Hexagone avant d'être elle-même aspirée par la culture hippie transformée progressivement en produit mainstream et commercial.

Le Living Theatre en 1968 à Milan, auteur Francesco Radino, source Wikipédia.

La contre-culture est une réponse à la culture dominante, un contre-courant, « forcément contestataire, la contre-culture combat une culture dominante, qui correspond à la fois à la culture de masse, véhiculée par l’école et l’État, et à la culture de masse, symbole des dérives de la société de consommation »[1] . Le schéma révolutionnaire traditionnel est inversé, la destruction du système n’est plus une condition préalable à l’établissement d’un autre système. L’intérêt réside dans « la confrontation à une utopie concrétisée »[2]. Vivre l’expérience est déjà une révolution en soi. Il en réside un élan créatif sans précédent dans l’histoire des arts américains : une entreprise de destruction par la création.

Force créatrice de la marge, sans unité propre, la contre-culture fait bloc contre les canons artistiques de l’époque. Cette avant-garde c’est la poésie beatnik, le folk du Greenwich Village, la free press subversive, les happenings du Living Theatre, le mouvement psychédélique de la côte ouest … Parce qu’ils usent de la transgression et parce qu’ils s’opposent à la culture académique ils tentent de faire émerger une « autre culture » : la violence de la langue, les thèmes abordés et le goût de la provocation les confrontent à la culture « standardisée ». Consciemment ou non, cette contre-culture est en avance sur son temps. Son pouvoir réformateur conduit au renouvellement des formes artistiques du XXe siècle : du roman traditionnel américain on passe aux expérimentations littéraires de Burroughs, du folk on passe au rock et au règne de l’électricité, du théâtre écrit on passe au happening improvisé. Et de par sa force et sa vivacité, son authenticité et sa soif de changement, elle dépasse le simple cadre américain pour inspirer et influencer l’art européen. C’est cette avant-garde qui va secouer la France à partir de 1960 et qui va influencer les événements de l’année 1968.

Les contestations politiques américaines des années 1950

En 1954 paraît aux États-Unis la traduction de l’Homme Révolté d’Albert Camus, l’idée d’une révolte comme accession à la Conscience et à la Libération est en germe en Amérique. En 1956 est traduit l’Être et le Néant.  Les deux livres connaissent un certain succès dans les milieux intellectuels, notamment au sein de la gauche libérale. Progressivement, le thème de l’aliénation est développé par le monde universitaire : des études sont portées sur les groupes déviants. En 1957, Norman Mailer, publie un article sur les hipsters de Greenwich Village – jeune population blanche imitant le comportement des noirs – dans la revue Dissent. Ils ne sont pas plus de 100 000 individus à la fin des années 1950 et ils précèdent la culture beatniks. Parallèlement, Howard Becker dirige des travaux sur les groupes marginaux. Il publie Outsiders en 1963, un portrait sociologique sur les fumeurs de marijuana et les amateurs de jazz. Le livre est un succès universitaire, les modes de vie parallèles sont progressivement décriminalisés et la question de la relativité des normes sociales se complexifie. Ces marginalités sont également à l’œuvre dans l’industrie cinématographique, avec les films de James Dean qui réfléchissent le mal-être adolescent et la marginalité. En 1953 The Wild One filme une bande de Hell’s Angels ; pour la première fois l’Amérique admet que la société est autant responsable des violences que les « sauvages » qui la commettent. Rebel Without A Cause sort en 1955, c’est le début du « culte de la jeunesse ». Parallèlement, le rock’n’roll fait son entrée dans le hit parade, “Rock Around the Clock” de Bill Haley & His Comets est n°1 du Billboard en juillet 1955.

Progressivement, la question politique gagne du terrain. L’article de Tom Hayden Revolution in Mississippi publié en 1962 enquête sur le mouvement contestataire noir dans le sud des États-Unis. Le contexte politique reste néanmoins dominé par la peur. Peur de la bombe atomique et de la guerre. En 1959, Fidel Castro s’installe à Cuba. L’échec du débarquement de la baie des Cochons en avril 1961 et la crise des missiles en octobre 1962 figent le pays. L’arrivée en 1960 d’un jeune président démocrate à la Maison Blanche fait souffler un vent d’espoir. Devant la menace extérieure, et les changements à l’œuvre, la jeunesse prend position.

Mario Savio, porte-parole du Free Speech Movement, auteur Mjlovas, source Wikipedia

En 1960 est créée la SDS, Students for a Democratic Society, principal organe de contestation étudiante. Elle fédère l’ensemble des syndicats universitaires et devient l’emblème de la Nouvelle Gauche. En 1962, elle adopte le Port Huron Statement en réaction aux anciens syndicats et mouvements marxistes trop focalisés sur le mouvement ouvrier. Le nombre d’adhérents à la SDS ne cesse d’augmenter et passe de 3 000 à 100 000 membres entre 1964 et 1968. L’agitation déjà perceptible au sein du mouvement étudiant devient médiatique avec les événements de Berkeley.

En 1964, l’université se soulève suite à l’arrestation d’un élève ; la révolte prend la forme d’un plaidoyer pour la liberté d’expression. Le Free Speech Movement dépasse les limites du politique, Joan Baez prend la parole sur le campus et la presse relaye abondement les événements.

Les beatniks à Paris : un premier contact avec les avant-gardes       

De 1958 à 1963, Allen Ginsberg, William Burroughs, Brion Gysin , Grégory Corso  et Ian Sommerville, les chefs de file du mouvement beatnik, résident à Paris. Bien que repliés sur un microcosme d’expatriés peu ouvert sur l’extérieur, ils fréquentent la bohème et l’avant-garde littéraire parisienne. Ils y produisent certaines des pièces les plus notables de la Beat Generation et y font publier des œuvres inédites ; ce sont en effet certaines des œuvres les plus mémorables du mouvement qui y sont composées, à l’image des cinquante premiers vers de Kaddish, du poème-champignon Bomb, du Festin Nu, et des esquisses de La Machine Molle et du Ticket qui explosa. Brion Gysin, y développe la technique du cut-up et Ian Sommerville y construit la première Dream Machine, l’ancêtre des lights-shows psychédéliques.

Ces écrivains, éperdus d’auteurs français (Rimbaud en tête), choisissent Paris pour y vivre une vie de bohème. Allen Ginsberg et Gregory Corso arrivent le 15 octobre 1957 et s’installent au Beat Hotel, rue Gît-Le-Coeur. La vie des beats à Paris est rythmée entre allers et venues, à Paris, Londres, Tanger et New York. Si Ginsberg rentre à New York en 1961, Burroughs et Gysin restent à l’hôtel jusqu’à sa fermeture en 1963.

Disponible à la bibliothèque de l’Ecole des Beaux-Arts de Lyon.

Ce sont les artistes français qui sortent le plus enrichis de cet échange. Jean Jacques Lebel, déjà très au fait de la culture underground américaine, voit dans le microcosme beat une avant-garde qui doit être développée en Europe ; cette démarche aboutit à la publication de sa célèbre anthologie en 1965, La poésie de la Beat Generation, la première consacrée aux auteurs.

Si la Beat Geneation intéresse peu le Paris du début des années 1960, ces derniers nouent tout de même de vives relations avec l’avant-garde plasticienne et théâtrale de l’époque. Ces premiers contacts ne semblent concerner qu’une minorité de parisiens membres d’une communauté artistique mais ils vont considérablement influencer la vie culturelle underground de la capitale et font souffler un vent d’audace et de liberté qui permet aux artistes français de poursuivre l’aventure.

Les premières publications des auteurs beatniks en France

La rencontre avec Maurice Girodias, directeur d’Olympia Press, maison d’avant-garde littéraire spécialisée dans la littérature érotique, est déterminante. Publier la Beat Generation c’est s’inscrire dans une tradition familiale et éditoriale, son père Jack Kahane, propriétaire d’Obelisk Press, est le premier à publier Tropique du Cancer d’Henry Miller. Girodias y publie Lolita pour la première fois en France en 1955.

La première édition française en langue originale du Festin Nu, source Wikipedia.

En juillet 1959, paraît le Festin Nu en langue originale. Il s’agit là du premier roman beat publié en France. L’année suivante, Girodias publie The American Express de Corso. En 1962, ce sont The Soft Machine et The Ticket That Explosed qui sont édités. Être publié chez Girodias est synonyme de provocation littéraire, dans la lignée de Sade et de Nabokov ; être publié à Paris c’est braver la censure américaine et s’inscrire dans une tradition d’artistes en exil.

Ces premières publications permettent aux écrivains américains de s’imposer ; elles assurent pour eux une légitimité. En 1960, soit un an après l’arrivée des auteurs beats en France, ces derniers quittent la sphère littéraire underground. Gallimard publie la traduction française du roman phare de la Beat Generation, Sur la Route. La maison d’édition mène alors, et dès sa création, une politique de découverte à l’égard des jeunes auteurs français et étrangers. C’est elle qui publie l’avant-garde des années 1950 : Genet, Céline, Sarraute et Ionesco. En 1959, le fonds américain est déjà constitué des livres de Truman Capote et Saul Bellow ; la collection Série Noire édite des romans policiers anglo-saxons. En 1972 ce sont eux qui rééditent Le Tropique du Cancer.

Allen Ginsberg en Une du Magazine Littéraire en 1966, source photographie de l’auteur.

Onze ouvrages de la Beat Generation paraissent ainsi entre 1959 et 1966. William Burroughs est progressivement intégré dans le catalogue Gallimard avec la réédition du Festin Nu en 1964, preuve du succès du livre. Les écrivains font alors la Une des magazines littéraires.

L’arrivée du folk américain en France

  • Les prémices du folk américain

L’arrivée officielle du folk américain en France est effective en 1965 avec Bob Dylan. Mais les jeunes français ont déjà eu un premier contact avec la musique traditionnelle américaine, et ce dès les années 1940. Ce sont les émissions radiophoniques de Simon Copans, américain résidant à Paris depuis la Seconde Guerre Mondiale, qui permettent aux français de s’éveiller au folk. D’abord universitaire, Copans publie un certain nombre d’ouvrages sur le jazz et la musique américaine avant de prendre la tête de l’Institut d’Etudes Américaines à Paris en 1959, de l’Association Française d’Etudes Américaines à partir de 1967 et de siéger au conseil d’administration du Centre Culturel Américain, boulevard Raspail. Formé au métier de présentateur radio pendant la guerre, ce dernier anime plus de 4 000 émissions radiophoniques sur les ondes publiques entre 1946 et 1975[3]. Parallèlement à son activité de présentateur radio, il publie des ouvrages universitaires sur la question comme Chansons de contestation, reflets de l’histoire américaine[4].

Parallèlement les premiers groupes américains non spécialisés dans le jazz arrivent en France dans la première moitié des années 1960, à l’image des Brothers Four. Ces groupes populaires permettent aux jeunes français de « creuser » le répertoire et de découvrir d’autres standards, moins connus. C’est ainsi qu’est fondé en 1962 l’American Folk Blues Festival, festival itinérant qui passe par la Suisse, l’Autriche, l’Angleterre et l’Olympia parisien. Le festival invite des artistes comme Johnny Lee Hooker en Europe. Un disque retraçant la tournée est édité et c’est un réel succès.

Le rôle des maisons de disques et des labels est également très important dans l’histoire de cette diffusion. Le label Chant du Monde (proche du parti communiste), reprend le Catalogue Folkways[5] et publie en France à partir de 1950 des disques thématiques de traditionnels américains et internationaux. Le label développe ainsi une politique pédagogique de diffusion, privilégiant l’histoire et le contexte américain pour en apprécier la musique, en reproduisant des notices biographiques et contextuelles au sein des pochettes.

Enfin, la présence de jeunes américains (qui jouent ensuite un rôle déterminant dans le développement du folk régional français) sur le territoire favorise le développement de cette musique, à l’image de Roger Mason et Steve Wearing qui résident dans l’Hexagone et qui s’y produisent en adaptant des chansons du répertoire américain.

  • Le rôle décisif d’Hugues Aufray

L’année 1965 voit la folk music quitter la sphère de la culture d’élite pour intégrer le champ de la culture populaire. Hugues Aufray est alors un jeune chanteur habitué des cabarets parisiens où il y interprète des titres de Georges Brassens et des extraits du répertoire folklorique latino-américain. Le chanteur effectue un premier voyage aux Etats-Unis en 1959 sur invitation de Maurice Chevalier. Il effectue deux autres voyages en 1961 et en 1962 et y rencontre les principaux acteurs de la folk music américaine, Peter, Paul & Mary et Bob Dylan avec qui il lie des liens d’amitié. Ce dernier s’importe timidement en France, il faut se rendre chez les disquaires spécialisés parisiens, comme Lido Musique sur les Champs-Élysées pour trouver les exemplaires des premiers albums du protest singer. En 1963 Aufray représente la France à l’Eurovision et fait la première partie de Johnny à l’Olympia. C’est en 1965 avec l’aide du parolier Pierre Delanoë qu’il adapte les chansons de Dylan en français. Sort chez Barclay « Aufray chante Dylan », les titres « La Fille du Nord » et « L’homme orchestre » sont de véritables succès. En 1966, il fait l’Olympia et assure la première partie d’Harry Belafonte  au Palais des Sports. La France, par l’intermédiaire d’un chanteur populaire va découvrir la chanson contestataire et les canons de la contre-culture américaine.

Cet attrait pour les sonorités américaines est néanmoins paradoxal : d’un côté les français se mettent à écouter du folk mais ils adoptent aussi les pratiques culturelles américaines, les chiffres de vente des blue jeans explosent. C’est donc un vaste métissage qui s’opère, la France important la culture américaine mais aussi sa contre-culture. Le pays a néanmoins un temps de retard, alors que les standards de Dylan font un tabac, le folk laisse place au rock’n’roll et à l’électricité : “Blonde On Blonde” sort en 1966. Ce dernier est à l’Olympia le 24 mai 1966, la stupeur fait place à l’incompréhension : qu’est donc devenu le chanteur contestataire qui joue désormais de la guitare électrique ?

Le numéro introductif du magazine Rock & Folk, source Daily Mars.

Mais si le public populaire se familiarise avec Dylan par l’intermédiaire des adaptations d’Hugues Aufray il faut attendre les premiers numéros du magazine Rock & Folk en 1966 (Dylan fait la Une du numéro 0) pour que le public de mélomanes s’intéresse au phénomène.

  • Le happening, une histoire européenne

Les années 1950 et le début des années 1960 voient également se développer le happening, théâtre de performance spontané qui mêle le réel à la fiction, autour de la figure tutélaire de Jean-Jacques Lebel. Fils de Robert Lebel, écrivain et collectionneur d’art, Lebel passe son enfance à New York et y rencontre les acteurs de la contre-culture. Il commence par publier des articles sur la culture underground dans des magazines d’avant-garde. Il côtoie les beats à Paris et organise des séances de poésie à la Galerie 55 rue de Seine. Raillé et contesté, fort de son caractère subversif et contestataire, il reste réservé à une élite, un public d’avant-garde de gauche, influencé par les travaux Dada et le théâtre d’Antonin Artaud. Lebel se pose alors en défenseur de l’art libre, opposé à l’art-marchandise, en rupture avec les canons esthétiques du début des années 1960. Inspiré par le « changer la vie » d’Arthur Rimbaud, il est persuadé du pouvoir opérant de l’art sur la société : faire un happening c’est pouvoir changer les mentalités. Cette constellation du happening qui gravite autour de Lebel (on y retrouve les artistes Ben, Erro, Daniel Pommereulle et Alain Jouffroy), et si elle ne rencontre que de très minces échos dans la presse jusqu’à 1966, constitue une solide avant-garde fertile et créative.

Mais l’aventure n’est pas essentiellement française, en réalité les premières années du happening sont européennes. Puisant une influence dans les artistes d’Europe du nord (Oyvind Fahlström, Claes Oldenburg, Simon Vinkenoog, Bart Huges) et Américains (Carolee Schneeman, Karl Heinz et évidemment Julian Beck et Judith Malina), Lebel et Jouffroy montent le premier happening français en 1960 à la Galerie Fontaine des Quatre Saisons, c’est “L’Anti-Procès“, un assemblage de poésie, de peinture, de théâtre et de jazz. Le Festival de la Libre Expression à l’American Center se tient de 1964 à 1965 (le Centre Américain est, au début des années 1960, le refuge des artistes d’avant-garde et les happenings y sont fréquents, nous y reviendront dans la seconde partie). Lebel n’est évidemment pas le seul français à pratiquer le happening ; on retrouve Allan Kaprov au Théâtre Récamier en juillet 1963, le plasticien Daniel Pommereulle et Marta Minujin à la galerie Cordier la même année, Rita Renoir et Jacques Seiler au Deuxième Festival de la Libre Expression. Mais c’est bel et bien Lebel qui demeure la figure de proue du mouvement.

Le théâtre d’action engagé est rapidement relayé par le Festival de l’Université de Nancy, fondé par Jack Lang en 1963. C’est par son intermédiaire que se diffuse en France l’idée d’un théâtre politique. Premier festival européen à inviter des compagnies non européennes, il propose de remettre au goût du jour les œuvres d’Antonin Artaud. Dans la lignée du Nouveau Théâtre (Ionesco, Adamov et Beckett), le Festival de Nancy devient un laboratoire français d’avant-garde. Dans sa lignée, le Festival Sigma est créé à Bordeaux en 1965 par Roger Lafosse.

La seconde moitié des années 1960 voit également s’imposer le Living Theatre et les happenings français sur la scène médiatique ; c’est aussi le moment où Jean-Jacques Lebel se fait le plus politiquement virulent, et où ses publications sont les plus nombreuses. Dans un climat d’importante imbrication entre théâtre et politique  –Les Paravents de Jean Genet et V comme Vietnam en 1967 et 1968 déclenchent de vives réactions au sein du public et des organisations politiques -, le théâtre engagé se développe. Lebel publie Le Happening en 1966 dans la collection des Lettres Nouvelles : pour lui, l’art est en crise. A partir de 1966, et même si les ouvrages restent réservés à un public de spécialistes, le happening prend une notion d’engagement et c’est dans une tradition « brechtienne » que Lebel investit son théâtre d’une dimension radicalement politique ; c’est aussi le moment ou le Living Theatre se radicalise.

Une performance du Living en Italie, source Fonds d’affiches de la Bibliothèque Franco Serantini, www.bfspisa.com.

Le Living Theatre est une troupe de théâtre expérimental révolutionnaire créée en 1947 par Julian Beck et Judith Malina à New York. Inspiré du « théâtre de la cruauté » d’Antonin Artaud, le Living fait de la provocation sa marque de fabrique (nudité, violence, insultes à l’encontre du public). La troupe exclue toute séparation entre l’art et la vie et prône une forme d’existence anarchiste et communautaire. Expulsé des États-Unis au début des années 1960, le Living s’installe en Europe pour s’y produire pendant dix ans. La troupe trouve refuge en France et assure de nombreux spectacles sur le territoire à partir de 1961, notamment au théâtre du Vieux Colombier à Paris. La consécration française de la troupe a lieu le 13 octobre 1967, Mysteries and Smaller est présenté à la télévision française sur la deuxième chaîne. Médiatisation et avant-garde sont plus que jamais liés.

Parallèlement à l’actualité théâtrale, le monde du cinéma commence à s’intéresser de près à la contre-culture, la Cinémathèque propose des rétrospectives consacrées à « l’avant-garde pop et beatnik » entre fin novembre et début décembre 1967 avec la projection des standards undergrounds américains – Greogory Markopoulos, Bruce Baillie, Stan Brakhage, Bruce Conner et Taylor Mead.

[1] Giovanni DOTOLI, Parole et liberté, langue et écriture de mai 68, Paris, Hermann, 2008.

[2] Ibid, p. 136.

[3]Michel ORIANO, « Play it again, Sim : Sim Copan ambassadeur de la musique américaine en France », Revue Française d’Études Américaines, Paris, Belin, 2001, p. 6.

[4] Simon COPANS, Chansons de contestation, reflets de l’histoire américaine, Volume 1, Paris, Minard, 1964.

[5]Label américain spécialisé dans les musiques traditionnelles depuis 1948.

Bibliographie sélective

Les théoriciens contemporains :

  • Herbert MARCUSE, L’homme unidimensionnel, Paris, Les Éditions de Minuit, 1968.
  • Charles A. REICH, Le regain américain, Paris, Robert Laffont, 1971.
  • Théodore ROSZAK, Vers une contre-culture, Évreux, Stock Plus, 1980.

Sur la contre-culture :

  • Christophe BOURSEILLER, Olivier PENOT-LACASSAGNE, Contre-cultures !, Paris, CNRS Éditions, 2013.
  • Steven JEZO-VANNIER, Contre-culture(s) : des Anonymous à Prométhée, Marseille, Le Mot et le Reste, 2013.

Sur la Beat Generation :

  • Alain DISTER, La Beat Generation, La révolution hallucinée, Paris, Découvertes Gallimard, 1997.
  • Jacqueline STARER, Les écrivains de la Beat Generation, Dol-de-Bretagne, Éditions d’Écarts, 2011.

Sur la musique folk :

  • Eric DESHAYES et Dominique GRIMAUD, L’Underground musical en France, Marseille, Le Mot et le Reste, 2013.
  • Yves DELMAS, Charles GANCEL, Protest Song, la chanson contestataire dans l’Amérique des sixties, Marseille, Le Mot et le Reste, 2005.
  • Jacques VASSAL, Folksong, racines et branches de la musique folk des États-Unis, Paris, Albin Michel, 1984.

Sur le Living Theatre :

  • Pierre BINER, Le Living Theatre : histoire sans légende, Lausanne, La Cité, 1968.
  • Jean-Jacques LEBEL, Entretiens avec le Living Theatre, Paris, Belfond, 1969.
  • Stéphanette VENDEVILLE, Le Living Theatre, de la toile à la scène 1945-1985, Paris, L’Harmattan, 2008.

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2 thoughts on “Aux origines de Mai 68, les avant-gardes américaines (1/3)”

  1. Mallet dit :

    Article fourni, très intéressant, merci

  2. Chris dit :

    Pour ceux qui le désirent je possède les scan de ce Rock ‘n Folk n°0 et puis les partager gracieusement .

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