Lyon-Tech La Doua, un campus pour demain

- temps de lecture approximatif de 9 minutes 9 min - Modifié le 31/05/2018 par Tarteàlacrème

Jusqu’au 16 septembre 2018, l’exposition « Du Grand-Camp au Campus La Doua : lieux communs ? » au Rize se penche sur l’histoire du campus universitaire. Si loin des études soit-on, cette rénovation n’en est pas moins importante pour tous les citoyens. La rénovation est lancée depuis 2016, mais lorsqu’on ne fréquente pas le campus, que sait-on de cette transformation ?

LyonTech la Doua perspective du campus
LyonTech la Doua perspective du campus

Concevoir un campus, penser les études supérieures

Le campus scientifique de la Doua, pensé pour être le plus grand de France est entrepris en 1957. Il est d’abord imaginé comme un « groupement autonome » par son architecte, Jacques Perrin-Fayolle. L’idée est que les étudiants doivent trouver tout ce qui leur est nécessaire sur place : enseignement, logement, restaurant, bibliothèque, sport et activités culturelles. Le campus est voulu à part du tissu urbain, ce qui développe un sentiment d’appartenance assez important chez les étudiants. Il restera entièrement grillagé pendant plusieurs décennies.

Les barrières du campus ne tombent qu’en 2001, avec l’arrivée du tramway. Le partage de ce vaste espace par la population riveraine avec les usagers étudiants et chercheurs se met en place depuis lors. L’ouverture du parc de la Feyssine en 2002 rend une partie de l’espace aux habitants qui sont amenés à traverser le campus, à pied ou en tramway. Mais pour les citadins qui n’ont pas étudié sur ce campus, il est difficile de se représenter ce qu’il contient. C’est donc également l’approche des études supérieures, l’accès à la recherche et sa vulgarisation qui sont en jeu avec la rénovation.

Parc de la Feyssine, Dominique Barrier

En février 2017, l’Université de Lyon (UdL) a été labellisée Idex « Initiative d’Excellence ». L’objectif est de fusionner les Universités de la région lyonnaise et les établissements d’enseignement supérieur pour mieux rayonner au niveau international. Ces rapprochements ne se font pas sans difficultés. Fin 2017, l’« Université cible » rassemble cinq membres : l’université Claude-Bernard-Lyon 1, l’université Jean-Monnet-Saint-Étienne, l’université Jean-Moulin-Lyon 3, l’ENS et l’Insa Lyon, sans l’Université Lyon 2.

Les universités et écoles lyonnaises ont entamé leur regroupement depuis 1995. Le Pôle universitaire de Lyon (PUL) est alors créé : il s’agit d’un Groupement d’Intérêt Public. Le 10 août 2007, la loi LRU (« loi relative aux libertés et responsabilités des universités » souvent appelée « loi d’autonomie des universités ») change son statut pour celui d’Etablissement public de coopération scientifique, sous le nom Université de Lyon (UdL). La loi liée à l’enseignement supérieur et à la recherche du 22 juillet 2013 a considérablement modifié le statut des Universités. Désormais, l’Université de Lyon devient une COMUE (Communauté d’universités et établissements), dont le statut est celui d’un Etablissement public à caractère scientifique, culturel et professionnel. 

A lire à la Bibliothèque municipale de Lyon :

– L’avènement de l’Institut national des sciences appliquées, René Boirel, 1983

Louis Pradel, maire de Lyon. Voyage au coeur du pouvoir municipal, Laurent Sauzay, 1998

–  Equation : 40 ans d’innovation à l’Université Claude Bernard Lyon 1, Nathaly Mermet, 2011

– Bâtir l’université : gouverner les implantations universitaires à Lyon (1958-2004), Jérôme Aust, 2013

Ces projets qui vont booster Villeurbanne, 2016

Schéma de Développement Universitaire 2010-2020

– The Conversation : Accès à l’université et financement de l’enseignement supérieur et de la recherche : que faire ? (épisode 1)

23 fiches pour mieux comprendre la construction de l’espace européen de l’enseignement supérieur

–  L’Insatiable, Fusion INSA – Université de Lyon : décryptage 2018

La longue marche de l’Université de Lyon, Influx

 

 

La construction du campus de la Doua

Construction de la Doua, G. Vermard / BmL

Jacques Perrin-Fayolle a beaucoup construit dans le contexte d’après-guerre mais est aujourd’hui peu reconnu. Il est l’architecte de nombreux hôpitaux en France mais également de plusieurs établissements d’enseignement. A Lyon, il construit non seulement la Doua mais également l’Ecole Centrale (1965), l’Ecole Nationale Supérieure de Bibliothèques (qui deviendra l’ENSSIB) et l’Ecole Nationale des Ingénieurs des Travaux Publics de l’Etat (devenue E.N.T.P.E., 1976). Sur le campus de la Doua, il collabore avec Jean Prouvé pour la conception des façades. Celui-ci travaille sur des modules répétables de murs-rideaux en alliage légers.

La construction d’établissements d’enseignement s’est échelonnée pendant vingt ans. L’INSA est d’abord installé en 1957 dans cette zone utilisée par les militaires. Puis l’Université Claude Bernard Lyon 1 doit quitter les quais à partir de 1961, mais les bâtiments ne sont construits qu’à partir de 1963. Des amphithéâtres, des salles de cours, une bibliothèque, des laboratoires de recherches sortent alors de terre. C’est au tour de l’Ecole de Chimie (aujourd’hui CPE Lyon) de venir s’installer à la Doua en 1967. Des logements pour étudiants sont enfin élevés : la résidence Jussieu pour les hommes et Madeleine-Monod pour les femmes. Le transfert de l’université est terminé en 1971 et l’ENSSIB inaugurée en 1974.

 

 

 

 

 

 

 

 

Le dénominateur commun de tous les bâtiments construits à la Doua est l’utilisation massive du béton. Le besoin d’ingénieurs est pressant : le choix constructif est orienté par le contexte d’après-guerre. Le béton précontraint répond à cette condition : il permet une mise en œuvre rapide. La construction de l’INSA est contrainte par le temps. L’architecture est fonctionnaliste : elle ne « vise pas à la séduction ». Jacques Perrin-Fayolle n’a que peu la possibilité de s’exprimer car c’est une de ses premières réalisations.

Les unités de logement et d’enseignement présentent des formes monolithiques. Seuls certains amphithéâtres, séparés des unités d’enseignement ont des formes particulières. Certains ont été surnommés « maison hibou ». Le principe de construction est le toit-terrasse. La suppression des murs et refends porteurs est possible grâce aux poteaux porteurs. Le plan devient libre et ouvert, les ouvertures larges, en bandeaux.

Construction du bâtiment Curien, G. Vermard / BmL

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Jean-Paul Delhummeau dit Denis Morog est le créateur de « gravures monumentales ». Après avoir exploré de nombreux domaines artistiques, ses connaissances des techniques de gravure l’ont conduit à créer des bas-reliefs en béton. Ses murs-sculptures en béton architectonique se retrouvent dans de nombreux bâtiments de Lyon : mur d’entrée de la Bibliothèque de la Part-Dieu, salle des pas perdus du Palais de Justice de Lyon… A la Doua, il conçoit les mur-écrans des sciences de la vie et des sciences de la terre. Mais la fresque de l’Evolution ou fresque Darwin est davantage connue.

Pour fabriquer ces sculptures, il utilise des moules en bois, en métal et en élastomère. Elles sont fabriquées sur place ou en usine puis travaillées sur place en décapage au sable et à l’acide, de manière à faire ressortir la matière.

 

Fresque de l’Evolution, B. Calenge / BmL

A lire à la Bibliothèque municipale de Lyon :

L’architecture à Lyon. 02 : Lyon et le grand Lyon de 1800 à 2000, Jacques Beaufort, 2001

Le brutalisme en architecture : éthique ou esthétique ?, Reyner Banham, 1970

– La Doua, lieux communs ? : du Grand-Camp au campus : journal d’exposition, Le Rize, Villeurbanne, du 9 novembre 2017 au 16 septembre 2018

– Bulletin municipal – Villeurbanne

Le Beau béton, Morog, 1981

– Parcours Architecture Doua CAUE

– Sacré béton ! : fabrique et légende d’un matériau du futur, Philippe Genestier, Pierre Gras, 2015

Jean Zumbrunnen, architecte, 1993

Jacques Perrin Fayolle, 1980

 

Rénover la Doua

Pour penser la réhabilitation de manière globale un schéma directeur a été élaboré par le cabinet d’architecte Lispy+Rollet.

Plusieurs orientations ont été a données : l’objectif est par exemple d’améliorer la qualité de vie étudiante avec la construction de 260 places de logement et la réhabilitation des équipements sportifs. C’est également la géographie du site qui est repensée : regroupement des filières par domaines ; création d’une transversale Nord-Sud en plus du grand mail qui structurait le campus d’Est en Ouest. La perméabilité ville-campus est favorisée, afin que les riverains s’emparent également de cet espace.

Huit nouveaux bâtiments doivent être construits et vingt-deux réhabilités par le maître d’oeuvre choisi, Eiffage. Les activités des laboratoires sont mieux prises en compte par exemple par la construction de soutes de produits et déchets d’activités. Pour répondre aux contraintes de sécurité d’exploitation de l’utilisation du gaz, des coursives viendront couvrir les façades de certains bâtiments. C’est également les mises aux normes relatives aux incendies et à l’accueil des personnes à mobilité réduite qui dicte la rénovation des bâtiments. Les halls d’entrée sont repensés, ainsi que la signalétique.

La rénovation du campus est l’occasion de repenser la conception des études supérieures et de la mise en application de la recherche. Pour créer les conditions favorables de l’innovation, le système de Recherche & Développement est aujourd’hui encouragé. L’objectif est d’améliorer les échanges entre recherches fondamentale, appliquée et la production. La plateforme d’innovation collaborative Axel’One Campus est ainsi destinée à améliorer les partenariats Recherche-Transfert-Industrie. C’est le troisième maillon de la plateforme Axel’One dédiée à l’innovation de la chimie et de l’environnement. Les deux premiers maillons sont à Solaize (procédés innovants) et Saint-Fons (matériaux innovants).

La démarche ecocampus a permis de fixer des objectifs environnementaux. La réduction de la consommation énergétique est une priorité, une baisse de 40% du coût énergétique est visée. L’enveloppe thermique des bâtiments, les systèmes de flux et les activités spécifiques des bâtiments sont pris en compte de manière globale.

La mobilité par modes doux (vélo) permettra également d’améliorer le confort de vie. La Doua est une zone humide et inondable très proche du Rhône. La nappe phréatique et la zone de captage d’eau potable lyonnaise de Miribel font parties des contraintes environnementales. Tout un travail sur la collecte et l’infiltration des eaux pluviales (installation de tranchées drainantes et de noues) permettra de ne plus mélanger eaux pluviales et eaux usées et de réalimenter la nappe phréatique. Enfin des revêtements innovants de zone de stationnement sont destinés à faciliter la perméabilité des eaux pluviales.

 

A lire à la Bibliothèque municipale de Lyon :

– Huit ans après le « Plan Campus », la rénovation de La Doua va enfin démarrer, Rue89Lyon, février 2016

Projet de réhabilitation du campus de la Doua, 2016

Le campus au fil de l’eau, Université de Lyon, 2017

–  Construction 21, Etude de cas LyonTech la Doua

–  La Fabrique de l’Innovation

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