La Traversée
Pajtim Statovci
lu, vu, entendu par Maëlle - le 23/07/2024
« Je ne comprendrais pas encore non plus que le mieux, pour moi, serait de rester ici, suspendu au bord de mon désir, ardent, aspirant stupidement à obtenir ce qui m'échappera toujours. »
Bujar est un adolescent albanais. Peu de temps après la chute du régime de Hoxha, son père meurt et sa mère sombre dans une terrible dépression. Il décide alors de prendre le large avec Agim, son ami de toujours, rejeté par sa famille parce qu’il aime se travestir.
La Traversée est un roman foudroyant. Piqués au cœur, on suit avec effroi et fascination les deux personnages voyager de galère en galère. A l’aide d’une plume prenante et travaillée, Pajtim Statovci brouille les frontières des pays et du genre. Les chapitres ne suivent pas toujours un ordre chronologique. Et parfois, on finit par ne plus savoir qui est le narrateur, qui est celui qui nous parle. Les mensonges que le narrateur raconte à ceux qu’il rencontre nous mettent la poudre aux yeux à nous aussi.
Et c’est là toute la force de Statovci : l’écriture est explosive et il nous hypnotise à travers une construction originale et percutante. La forme en dit long sur le fond, et on comprend aisément que cette narration si déroutante est un symbole à la fois de l’éclatement des Balkans, du manque d’ancrage des personnages vis-à-vis de leur nationalité, et de leur difficulté à dessiner les contours de leur orientation sexuelle et de leur identité de genre.
Pour en savoir plus sur le contexte historique dont il est question, vous pouvez au passage emprunter cet essai de vulgarisation, très complet et très accessible.
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