Les intermittents du spectacle

Les turbulences ont été provoquées cette même année par la signature le 26 juin d’un protocole visant à réformer leur régime d’assurance-chômage et à en réduire le déficit. Trois ans plus tard, les intermittents reviennent sous les projecteurs de l’actualité alors que de nouvelles négociations ont été lancées pour revoir les dispositifs de ce fameux protocole.

Il convient de rappeler ce que sont les intermittents du spectacle et de connaître les spécificités de leur régime ainsi que les faits de 2003 et les conséquences qui en ont résulté. Cela afin de mieux appréhender la situation d’aujourd’hui alors que les feux du conflit s’apprêtent à être rallumés.

Intermittents : un statut particulier

Il est convenu depuis 1936 qu’il ne peut exister dans le secteur du cinéma une continuité d’emploi et qu’il en en va de même pour d’autres secteurs tels que le spectacle vivant, la radio ou la télévision. La fragilité de ces métiers a tendu vers une gestion spécifique de l’assurance-chômage dans un cadre dérogatoire de la convention Unedic et de ses annexes 8 ( relative aux techniciens) et 10 (relative aux artistes) révélant ainsi une sorte d’exception. Mais qui sont au juste ces travailleurs si particuliers ?

• Paroles intermittentes, Jean-Marc Adolphe, Hors commerce, 2003
  
  Témoignage de 78 artistes du spectacle traduisant la réalité de leur métier dans l’audiovisuel, le cinéma, la danse, le théâtre, la musique, les contes et marionnettes. Chacun exprime l’ampleur de la menace qui pèse aujourd’hui sur le secteur culturel en France,sacrifié sur l’autel de l’argent et de la rentabilité économique

• Les intermittents du spectacle, Vladimit ANT, S.Arslan, 2004
  
  Une trentaine d’artistes et de techniciens du monde du spectacle s’expriment sur leur métier, les difficultés rencontrées et leurs doutes. Ils reviennent sur la réforme de l’été 2003 et livrent des anecdotes. Ce livre peut également se lire comme un guide pour tous ceux qui désirent en savoir plus sur les différents métiers du spectacle.

• Les intermittents du spectacle : sociologie d’une exception, Pierre-Michel MENGER, Ecole de hautes études en sciences sociales , 2005
  
  A partir de données, l’auteur établit les faits, mesure les évolutions, soupèse les avantages et les dérives de l’emploi en contrats courts et chômage long. Il passe au crible le régime des intermittents du spectacle : ses règles, ses comptes, son utilisation, ses subtilités paritaires et politiques.

photogr. Emile Zeizig

Le protocole de 2003 : la réforme contestée

Dès 1992, le CNPF (ancien Medef) s’inquiète du déficit des annexes 8 et 10 du régime de l’Unedic. En effet depuis 1984, le chiffre des bénéficiaires de l’indemnisation chômage des intermittents connait une inflation constante. L’émulation du tout-culturel et l’hyperconsommation culturelle a entraîné des coûts et l’économie du secteur spectacle/évènement culturel se caractérise par une flexibilité de ses travailleurs ; fait consenti autant par les partenaires sociaux, l’Etat et les collectivités, que les employés eux-mêmes. Cela sans réellement se soucier du creusement du déficit de l’assurance-chômage des intermittents devenue très rapidement un élément essentiel de revenu.
Après 10 ans de multiples négociations et autant de prorogation du régime Unedic, c’est le 26 juin 2003 que le Medef et la CFDT signent un nouveau protocole faisant office de réforme qui provoque un tôlé du côté des intermittents. Le protocole prévoit notamment le réhaussement des seuils d’accès à l’assurance-chômage. les personnes doivent réunir un quota d’heures travaillés dans une période plus réduite dans le temps (soit 507 heures en 10 mois pour les techniciens et 10.5 pour les artistes, au lieu de 12 aupararavant). La date anniversaire du réexamen des droits disparait également.

• L’intermittent du spectacle : les nouvelles règles après la réforme de 2003, Frédéric CHHUM, Litec, 2003
  
  Au jour de la réforme du régime d’assurance chômage, présente les différents aspects du statut d’intermittent du spectacle : contrat et durée de travail, rénumération, congés payés, convention collective, cotisations sociales, régime d’assurance chômage, guichet unique des employeurs occasionnels.

• Le guide des intermittents du spectacle, La Scène : Millénaire Presse, 2004
  
  Tout savoir sur le régime 2004-2005, avec les textes officiels.

• La performance des vulnérables, Avignon : des lycéens aux intermittents, Alix DE MONTAIGU, Ed. de l’Amandier, 2004
  
  L’auteure présente les photographies prises lors de l’édition 2003 du festival d’Avignon qui fut marquée par les mouvements de grève et de protestation des intermittents du spectacle après les modifications de leur régime d’indemnités chômage. Elle juxtapose des images et des textes liés au conflit sur le statut des intermittents et leur associe des images de lycéens contre le guerre en Irak.

photogr. Alix de Montaigu

Les intermittents : toujours sous les feux de l’actualité

Presque trois ans après la mise en place du protocole, quel est le bilan de la situation ? Force est de constater que le nouveau régime est toujours contesté et ses effets considérés par certains comme néfastes. Non seulement le deficit des annexes 8 et 10 de l’Unedic n’a pas été renfloué mais il s’est encore accru de plusieurs millions d’euros contrairement aux prévisions du Medef. De même, si le nombre de nouveaux entrants intermittents indemnisés a baissé du fait de critères plus sélectifs, leur nombre total a lui augmenté. Il existe de plus en plus d’intermittents pour moins de travail, donc un recours plus fréquent au chomage et à son indemnisation. Par ailleurs, le nouveau régime a renforcé les inégalités entre indemnisés, car étant basé sur le maintien du niveau de vie, l’allocation profite aux intermittents travaillant beaucoup et ayant des niveaux de salaires réguliers. Certaines voix s’élèvent contre le recours abusif aux intermittents, dénonçant un système qui procure à certains employeurs des bénéfices importants en termes de flexibilité : la souplesse d’embauche et les fins de contrat échappant aux contraintes de l’utilisation des CDD comme dans les autres catégories professionnelles. Selon elles, il est temps de remettre les employeurs au sein du système car nombre d’entre eux dans le secteur culturel et audiovisuel ne sont affiliés à aucune des organisations patronales siégeant à la table des négociations.
Les revendications des intermittents n’ont pas faiblis. Car depuis 2003, les Assedic financent toujours la création culturelle alors qu’ils sont de plus en plus victimes de la précarité. Les négociations ont repris depuis plusieurs mois et chacun des partenaires sociaux campe sur ses positions.D’un côté les intermittents souhaitent en particulier que leurs droits soient ouverts à partir de 507 heures travaillées sur 12 mois avec restauration de la date anniversaire. De l’autre le Medef et la Cfdt réclament un financement plus important des pouvoirs publics.

• Intermittence : où en est-on ?, par Anne QUENTIN, La scène N°38 , Septembre 2005
  Ce dossier spécial de la revue La Scène fait un point très complet sur la situation à la veille des nouvelles négociations sur la situation de l’intermittence.

• L’intermittence est permanente, Télérama n°2919, 21 Décembre 2005
  
  Cet article de la revue Télérama propose une synthèse sur le sujet des intermittents en retraçant les grandes lignes de la problématique.

• Intermittents : la lutte finale, par Anne QUENTIN, La scène N°40, Mars 2006
  
  Cet article de la revue La Scène présente la situation du conflit et des négociations actuelles.

Photogr. Emile Zeizig