Poésie, un mode de vie
Publié le 18/01/2022 à 07:30 - Modifié le 12/01/2022 Léa G
Il est intéressant de relire les Lettres à un jeune poète dans sa version intégrale parue chez Seuil en 2020 ; la première édition française où l’on peut lire les dix lettres de Rainer Maria Rilke à Franz Xaver Kappus (le fameux jeune poète) avec les réponses de ce dernier.
Ainsi, au sein d’un même ouvrage, les deux interlocuteurs se font écho, ce qui donne encore plus de profondeur à ce classique incontournable, et permet par ailleurs de considérer différemment les conseils de l’éminent poète allemand, qui demeure humble et sensible face à son correspondant, aussi novice dans l’écriture que dans la vie.
C’est cela qui frappe à la relecture d’ailleurs, combien Rainer Maria Rilke ne s’appesantie pas sur les conseils d’écriture et en va de sa vision du monde et de la vie dans son ensemble, rappelant à Kappus qu’il faut « essayer d’aimer les questions mêmes », car « il s’agit de tout vivre ».
Un point, aussi, n’a peut-être pas été assez souligné au sujet du poète Rainer Maria Rilke, c’est sa vision de la femme, moderne pour son époque, allant jusqu’à dire : « Cette humanité de la femme, portée à terme dans les douleurs et les rabaissements, viendra au jour quand les métamorphoses de son état extérieur l’auront peu à peu dépouillée des conventions qui la réduisent à n’être que femme, et les hommes, qui ne voient encore rien venir, seront alors surpris et vaincus ».
Est-ce de ce paragraphe précisément qu’est née l’idée du bel ouvrage collectif Lettres aux jeunes poétesses, publié en 2021 par L’Arche éditeur ?
Là encore, nous vous en conseillons la lecture, tant elle est riche plaisante, pleine d’humour et de vigueur : ce brillant recueil se compose d’une quinzaine de lettres écrites par vingt poétesses francophones, et qui allient, à l’instar de Rainer Maria Rilke, conseils d’écriture et visions de la vie, tout cela d’un point de vue de femme dans ce monde encore trop patriarcal qui est le nôtre (et au sein du milieu littéraire encore très masculin, doit-on le préciser).
Parmi ces différentes lettres, Chloé Delaume rappelle que la jeune poétesse « passera souvent pour une folle, parce que les écrivaines sont folles, tandis que leurs collègues masculins sont juste des génies alcooliques ». Liliane Giraudon, elle, revient sur cette « haine de la poésie » qui prend part au « dispositif poétique des poètes », et propose une nouvelle issue à ce sujet, déclarer la poésie « intenable », « et pour cette raison justement, s’y tenir ».
Qu’il s’agisse des Lettres à un jeune poète ou de celles aux jeunes poétesses, il y a beaucoup de conseils à prendre sur comment écrire, mais s’en dégage aussi une belle philosophie de vie, de comment être au monde tout en étant soi-même.
Poster un commentaire