A la recherche de la mémoire perdue

- temps de lecture approximatif de 9 minutes 9 min - Modifié le 30/09/2022 par Admin linflux

Petit tour d'horizon des différents supports ayant un jour servi à stocker des données : de la carte perforée apparue dans les années 20, en passant par la K7 ou encore l'emblématique disquette des années 80, jusqu'à la clé USB contemporaine. Sauvegardons cette mémoire !

© Pixabay
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Travailler sur son ordinateur, récupérer un fichier, de la musique ou un film, le transférer sur une clé USB pour aller s’en servir sur un portable : quoi de plus banal aujourd’hui ? Pourtant ce ne fut pas toujours le cas et on peut se rappeler l’époque pas si lointaine, pour peu qu’on ait passé le cap de l’adolescence, où récupérer des données, « charger un jeu »…, prenait une partie de la matinée. Les « vieux » (les quadragénaires quoi), pourront même se souvenir du temps où la simple idée de récupérer des données faisaient de vous soit un incorrigible optimiste, soit un employé de la N.A.S.A. Et si on rendait un peu hommage à toutes ces technologies oubliées ?

Il n’est pas question ici de faire l’inventaire de tous les types de mémoires que l’on a pu utiliser : ils sont très nombreux et certains ont connu nombre d’évolutions et dérivés. Attardons-nous sur les plus emblématiques. Petit tour d’horizon très subjectif…


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Sommaire

1) Au commencement était la carte perforée

2) Les bandes magnétiques se déchainent

3) Les cassettes audio et vidéo

4) Mais revenons à l’informatique : la disquette

5) Le Laserdisc, ça vous dit quelque chose ?

6) Que seront les mémoires de demain ?

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1) Au commencement était la carte perforée

Vous en avez peut être vu dans des musées, des brocantes… Si vous en avez utilisé, c’est que vous êtes organiste ou réparateur d’automates. Si vous avez travaillé avec, c’est que vous êtes mort. En effet, les premières datent du XVIIIe siècle et servaient à programmer les métiers à tisser Jacquard.
En 1928 la firme I.B.M met au point la carte dite « à 80 colonnes » qui va servir aux premiers ordinateurs : on invente alors la mécanographie, à mi-chemin entre la mécanique et l’informatique. Les perforations sont standardisées et des machines très précises (pour l’époque) sont chargées de lire le tout. Leur fabrication est elle-même très rigoureuse et confiée à des spécialistes
Il faut savoir que les premiers moniteurs d’ordinateurs comportaient 80 colonnes par ligne afin d’être compatibles avec les cartes perforées. Elles ont survécu aux Etats-Unis jusqu’en 2000 lors d’une élection présidentielle au résultat litigieux…

Une vidéo de présentation de la carte perforée “qui dégage l’homme de ses travaux de plume.”

Evolution de la carte, le ruban perforé permettait de stocker plus d’informations, il fut utilisé jusqu’en bibliothèque…

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2) La bande magnétique

Un peu plus proche, mais ceux qui ont travaillé avec ont des cheveux blancs (ou plus de cheveux), on peut l’apercevoir au cinéma, dans le genre de séquence futuriste ou anxiogène où il s’agit de démontrer que les machines sont au service de l’autorité. En réalité, rien de tout cela : les bandes magnétiques ont vite convaincu pour leurs grandes capacités de stockage. Pour information, elles sont toujours utilisées dans les « fermes » de serveurs sur PC qui sous-tendent les grands sites web. Il n’empêche que dans le format original, il était difficile d’imaginer une utilisation grand public…

On a donc décliné le principe dans d’autres formats plus portatifs. Ainsi apparurent les bandes magnétiques grand public.

Un site très bien fait sur la conservation des bandes magnétiques.

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3) les cassettes audio et vidéo

Ahhhh, on l’a tous connu, ne mentez pas ! Dans la voiture de papa, la compil de Gérard Lenormand ou de Jean-Claude Borelli… La fameuse Musicassette audio, inventée par Philips en 1963 et, mine de rien, la première mémoire de masse que l’on pouvait avoir dans sa poche.
Pour la première fois, on pouvait passer de l’autoradio à la chaine du salon, jusqu’au Walkman.
Elle n’a d’ailleurs pas seulement été le support incontournable des hits des années 70, mais a aussi servi de support informatique pour les premiers ordinateurs portables. Sur son Commodore 64 ou son Amstrad CPC 464 , on pouvait écouter le délicat chuintement du jeu qui chargeait (longtemps …) pour s’éclater avec Donkey Kong ou Zelda… (il fallait souvent une petite dizaine de cassettes pour obtenir un jeu entier).

La K7 (son nom de code) a subsisté durant presque 40 ans, nul ne sait exactement combien il s’en est vendu, on parle de plus d’un milliard.

Elle a essayé d’évoluer dans divers standards : la D.A.T (Digital Audio Tape) de type audionumérique, inventée par Sony qui n’a pas pu l’imposer en tant que support grand public, ou encore la D.C.C (Digital Compact Cassette) de Philips, arrivée trop tard, trop chère et dépassée techniquement.

Son équivalent vidéo a eu aussi son heure de gloire . Mais se souvient-on du choix cornélien au moment de choisir son lecteur (un problème de riche de toutes façons, vu le prix des premiers appareils…), il y avait le Bétamax, de Sony, le V-2000 de Philips et Grundig (on retrouve toujours les mêmes), et leur bourreau : le VHS de JVC, pourtant de moins bonne qualité mais dont la durée d’enregistrement de 4 heures fut un argument crucial, on a dit que cela permettait l’enregistrement du Superbowl, argument décisif pour le consommateur américain.
Citons aussi pour l’anecdote le format U-Matic, bien connu des documentalistes et des bibliothécaires…

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4) Mais revenons à l’informatique : la disquette

Bien qu’inventée par IBM au standard 8 pouces, c’est bien de la disquette 3 pouces ½ dont nous parlons. Au fait vous savez pourquoi ce format s’est imposé ? Et bien parce que c’est le format idéal pour tenir dans la poche d’une chemisette, élément vestimentaire indispensable de tout nerd (le geek des années 80) qui se respecte.
Les avantages de la disquette : peu onéreuse et facile à transporter, l’emportèrent largement sur ses défauts : une certaine fragilité et surtout une capacité en mémoire assez faible : à peine 1,44 MO à son apogée … il était courant, comme pour les K7, d’avoir des jeux entiers de disquettes dans des coffrets pour un seul programme : un des sommets ayant été atteint avec une version de Microsoft Office 97 : 45 disquettes à insérer successivement ! Patience et rigueur exigées.
En mars 2011, Sony annonce qu’il abandonne la fabrication des disquettes. Le grand public avait dans sa grande majorité laissé tomber depuis longtemps.
Notons toutefois qu’elle n’a pas encore tout à fait disparu de nos vies : regardez bien l’icône de sauvegarde de vos ordinateurs, il s’agit toujours d’une disquette…

Si vous ne savez pas quoi faire de vos 45 disquettes d’office 97

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5) le laser disc, ça vous dit quelque chose ?

Aussi appelé compact disc vidéo, on ignore souvent que ce support est antérieur au CD musique puisque commercialisé à la fin des années 70, à peu près en même temps que les cassettes vidéo déjà citées. D’abord appelé Laservision, il devient CD-vidéo (CDV). Pour ce qui est du compact, il faut le dire vite : l’objet a la taille d’un 33 tour, assez joli d’ailleurs, mais cela ne rentre pas tout à fait dans une poche de chemisette…
Le rendu sonore et visuel est sans commune mesure avec la cassette VHS, mais il souffre d’un inconvénient majeur face à celle-ci : on ne peut pas enregistrer ! (Adieu le Superbowl).
Autre inconvénient : le prix des appareils supérieur à celui des magnétoscopes (déjà pas donnés dans les années 80), ce qui l’a cantonné aux amateurs aisés. Sans parler du prix des disques eux-mêmes, même s’ils étaient garantis inusables. Le DVD a eu sa peau.

Pour les fétichistes, voici quelques sites dédié au Laserdisc :

Laserdisc Plaza

Laserdisc planet : en anglais avec des photos d’époque.

Laserdisc Database : recense quasiment tout ce qui a été édité sous ce format et propose à la vente ! (en anglais)

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6) Que seront les mémoires de demain ?

Synthèse du meilleur de tout ce qui a précédé, la clé USB est insensible à la poussière, aux rayures, tient dans une poche encore plus petite que celle d’une chemisette… c’est notre nouvelle amie (qui a d’ailleurs contribué à l’élaboration de ce dossier). On lui a donné toutes les formes possibles afin d’en faire un objet fashion.
Il semblerait que pour le grand public, cette bonne vieille clé USB ne soit pas prête d’être remplacée, certains constructeurs annoncent 256 Go de stockage ! Cela devrait permettre de voir venir… Quand on pense qu’on a tous eu à 256 Mo et qu’on s’est extasié devant les premières de 1Go !
En ce qui concerne les professionnels en revanche les choses ont évolué et de nouveaux supports apparaissent, capables de stocker de très nombreuses données pour un temps quasi-illimité, citons par exemple le disque de saphir. Non, il n’est pas en pierres précieuses, même s’il s’agit d’un bijou technologique. En saphir synthétique, d’un diamètre de 20 cm, il peut contenir l’équivalent de 10 000 pages de format A4. Sa durée de vie est de plus de 2000 ans et il peut résister à des températures de plus de 1000 degrés celsius. Un seul petit défaut : son prix entre 3500 et 10 000 euros selon les modèles (le prix s’oublie, la qualité reste).
Pour en savoir plus sur le disque de saphir

Impossible de finir sans évoquer le fameux Cloud, peut-être la solution miracle, mais qui dans le cadre de ce dossier pose des questions : y aura-t-il des “fans” du Cloud ? Que collectionner ? En un mot : où sont la passion, l’esprit de collection ? En résumé, ce qui contribue aussi à former une culture…

Pour aller plus loin

– le site du Musée de l’informatique très complet, avec des photos de matériel, des expositions, une boutique…

– Un site perso sur les différents types de mémoires

Des objets qui racontent l’histoire : l’informatique (collectif, EMCC,2004)

l’ordinateur et nous. Une histoire de l’informatique par Mark Frauenfelder (Gründ, 2006)

Histoire des instruments et machines à calculer : trois siècles de mécanique pensante : 1642-1942 par Jean Marguin (Hermann, 1994), qui a également fait une conférence sur le même thème

L’âge d’or : histoire des micro-ordinateurs par Philippe Roose (Cépadues, 2005)

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