L’Hypertension artérielle : une maladie contemporaine

- temps de lecture approximatif de 12 minutes 12 min - Modifié le 30/09/2022 par Admin linflux

Un point sur l'hypertension artérielle, maladie chronique de plus en plus répandue dans les pays occidentaux. Ayant de multiples origines, la prévention et la prise en charge de ce mal doivent être rapide au risque de sévères complications.

© Pixabay
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Dans les pays occidentaux, l’hypertension artérielle toucherait désormais près d’un tiers des personnes âgées de plus de 50 ans et la moitié des plus de 65-70 ans. Ce “mal silencieux” a des origines multiples et peut occasionner de sévères complications. Mais des traitements et des mesures de prévention existent pour ne pas être démuni face à cette maladie. En France, on compterait environ dix millions d’hypertendus traités…

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L’hypertension répond à une définition stricte, elle est bien différente de ces petites hausses de tension occasionnelles produites par l’effort ou une situation de stress. Elle se caractérise au contraire par une tension artérielle anormalement élevée sur de longues périodes (supérieure à 140 mm Hg pour la pression systolique et supérieur à 90 mm Hg pour la pression diastolique)
Les médecins distinguent ainsi deux types d’hypertension : une hypertension dite primaire qui représente environ 90 % des cas. Elle repose sur une multitude de facteurs, liée à l’âge, à l’hérédité (surtout pour les hommes) ou à des habitudes de vie nuisibles dont les effets s’accumulent avec les années. Et une hypertension secondaire qui peut résulter d’un problème de santé parallèle (un problème rénal ou endocrinien, une déformation congénitale de l’aorte) ou de l’usage fréquent de certains médicaments.
D’autre part, il importe de ne pas confondre hypertension et pré-hypertension. La seconde n’est pas pathogène, elle constitue néanmoins un signal d’alarme, un seuil au-delà duquel les complications deviennent possibles. Le Professeur A.I. Qureshi, directeur du programme cérébro-vasculaire et praticien à la Clinique neurologique de Minneapolis souligne l’existence d’une zone grise qui ne correspond pas à une situation d’hypertension mais pour laquelle il n’est pour autant pas possible de qualifier la tension artérielle de normale. 59 millions de personnes aux Etats-Unis souffriraient de pré-hypertension. Il n’existe pas, à notre connaisance, de données publiques pour l’Europe.

ambrosiPr. Ambrosi, Hypertension artérielle, Paris, Larousse.

Une présentation actuelle et fonctionnelle : ce livre expose, en une centaine de fiches colorées et synthétiques, les informations nécessaires au patient et répond aux questions que ces derniers posent le plus couramment aux médecins. L’ouvrage se compose de deux parties : comprendre et agir. Un livre clair, sans volonté d’alarmer, pour apprendre à connaître sa maladie et se soigner efficacement mais sereinement.

Rare dans les pays en voie de développement, l’hypertension artérielle est l’une des pathologies les plus fréquentes et les plus préoccupantes des pays occidentaux, tant et si bien que l’on parle aujourd’hui d’un fléau. Si l’on estime qu’en 2000, 26.4 % de la population mondiale était hypertendue et malgré des prévisions pour 2025 qui tablent sur 29.2% des humains, ce terme semble quelque peu déraisonnable, à moins qu’il faille entendre que le fléau n’est pas extérieur à l’homme ; qu’il apparaît lorsque ses pratiques, ses comportements sociaux et sociétaux génèrent la maladie, non pas comme une punition mais comme le point extrême d’une chaîne logique de conséquences.

Comment s‘y est-on intéressé ? Pourquoi s’y intéresse-t-on ? Quelles sont les motivations de la recherche ? et ses ressorts ?

La question de la mesure est essentielle en science ; mesurer est la source de toutes les connaissances et de toutes les observations : elle permet d’établir une norme, une échelle de comparaison, bref de maîtriser et « matérialiser » un phénomène abstrait ou que nous n’avons pas en main. Le savoir accumulé sur l’hypertension trouve ainsi son origine, plus encore sa possibilité dans le travail de Scipione Riva Rocchi qui mit au point, en 1896, le premier brassard gonflable permettant de mesurer la pression artérielle. Cette découverte rendit possible une exploration plus poussée de certains symptômes et relança les études cardiologiques alors dans une impasse « technique », comme le feront en 1960 les premières mesures en ambulatoire de Sokolov.

774291513 MLPostel Vinay (Nicolas) s.dir, Impressions artérielles : 100 ans d’hypertension, 1886-1996, Paris, Imothep.

Un historique de 100 ans de recherches et de découvertes, très largement illustré.
Un regard médical mais pas seulement ; les auteurs s’appliquent à mettre en évidence le lien qu’entretient la science avec les évolutions sociales et les différentes sources de motivations des médecins…

La science tributaire de l’outil… et après ? La possession de ces outils techniques certes indispensables n’a jamais été suffisante pour le plein épanouissement d’une discipline, elle ne l’a pas été davantage pour permettre le développement des études sur la pression artérielle, son fonctionnement et ses disfonctionnements – il fallu au début du XXe une prise de conscience bien plus large que celle des seuls chercheurs car l’hypertension, ou tout du moins la vague idée que l’on pouvait en avoir, était devenue entre temps un enjeu humain, politique et social, voire même économique.

Aux alentours de 1905, J.W. Fisher, médecin anglais des Northwestern Mutual Life Insurance Company, spécialisé dans les assurances-vie, proposa une étude approfondie des liens qui peuvent exister entre une pression artérielle élevée et les risques de mortalité. Il contribua à systématiser la prise de mesure régulière de la tension des patients. Bien entendu ces études furent menées dans le but de maximiser les rendements de l’assurance ; pour les assureurs, la positivité de la santé se résout en fin de compte au bénéfice.

De toute évidence, l’étude de l’hypertension se développa d’abord dans les pays anglo-saxons. Ils étaient les premiers touchés par l’expansion de cette pathologie. Ainsi après guerre, les universités américaines lancèrent une grande campagne de mesure à l’échelle d’une ville entière, Framingham, dans le Massachussetts, pour réussir enfin à identifier des facteurs à risque. Il faut rappeler qu’en 1949 les maladies cardio-vasculaires représentaient aux Etats-Unis la moitié des décès et devenaient pour l’Etat et l’ensemble de la société un vrai sujet de préoccupation. Cette étude durera 20 ans. Le résultat : plus de facteurs que prévu : héréditaires, les modes de vie (alimentation, sédentarité, obésité, tabagisme), le taux de lipides sanguins, le niveau de pression artérielle, la glycémie et le fibrinogène. L’hypertension apparaît dès lors comme une maladie multifactorielle.

Depuis un demi-siècle, elle représente un marché fabuleux pour l’industrie pharmaceutique qui y consacre une part substantielle de ses budgets de recherche et développement. Emboitant le pas des praticiens et grâce aux connaissances fondamentales sur la maladie acquises grâce à eux, la pharmacologie des traitements se développe extraordinairement entre 1960 et les années 90. Elle offrit du reste un prix Nobel (J. Black) et un prix Lasker de la recherche médicale clinique (E. Freis), des récompenses aussi représentatives du talent des chercheurs primés que de l’inquiétude provoquée dans les pays riches par cette maladie « occidentale ».

Plus récemment, dans une quête de regroupement des pathologies en un seul ensemble complexe, faisant état d’interdépendances et de collusions entre elles, les chercheurs ont remarqué que les maladies cardio-vasculaires s’accompagnaient souvent d’une série de facteurs qu’ils ont appelés ” syndrome métabolique ” ou ” syndrome X ” dont l’hypertension serait un des symptômes.

rouxRoux (Daniel), Syndrome X : obésité, hypertension, arthrose, diabète… tout vient des hormones !, Bernex, Jouvence.

Précisons-le tout de suite, le traitement de l’hypertension est ici très marginal (en dépit du titre). Il s’agit d’un livre grand public qui s’intéresse à une découverte récente : le Syndrome X dont l’auteur suppose de nombreuses implications sur notre santé. Un livre des Éditions Jouvence, une maison spécialisée dans le développement personnel et les médecines douces.

L’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) a tenu à donner une définition claire de ce syndrome X. Un sujet est porteur du syndrome lorsqu’il présente une diminution de la tolérance au glucose, voire un diabète ou une résistance à l’insuline. Il faut encore que le sujet présente au moins deux des facteurs suivants :

– une obésité centrale

– une hypertension artérielle

– une dyslipidémie, définie comme un taux accru de triglycérides ou trop bas de cholestérol HDL

– une micro-albuminurie.

L’origine du syndrome X dépend d’un côté de facteurs génétiques, de l’autre de facteurs environnementaux (alimentation, hygiène de vie…). Une conception que promeut avec entrain un nouvel hygiénisme, d’aucuns le diront totalitaire.

Des risques élevés. Le rôle du généraliste. Le traitement

Pour diagnostiquer l’hypertension, il faut réaliser des mesures sur une longue période (24 heures par exemple). De la sorte l’auto-mesure de la tension à domicile permet un diagnostic plus aisé ou une évaluation efficace de l’effet d’un traitement. Elle s’effectue à l’aide d’un tensiomètre, une sorte de petit boîtier qui se place au niveau du bras ou du poignet.

Les causes de l’hypertension sont multiples – nous l’avons dit. Il existe, pour les médecins, différents facteurs qui peuvent favoriser cette hypertension artérielle et exiger une surveillance accrue :

– le régime alimentaire : notamment une alimentation contenant trop de sel et de graisses saturées

– l’âge, l’hypertension apparaît après 40 ans

– l’hérédité : un enfant ayant un parent hypertendu a deux fois plus de risques d’être hypertendu que l’enfant de parents sans problèmes de tensions

– le stress

– le tabac

L’hypertension, que les spécialistes ont surnommée le tueur silencieux, est par ailleurs une maladie qu’il faut prendre au sérieux pour ses répercussions sur l’organisme. Elle entraîne en effet de très nombreuses complications à la fois cardiaques (insuffisance cardiaque, infarctus du myocarde…), neurologiques (accident vasculaire cérébral hémorragique ou ischémique…), rénales (insuffisance rénale), vasculaires (anévrisme, athérome ou obstruction des artères) ou des lésions rétiniennes.

On ne soulignera jamais assez le rôle prépondérant que peut jouer le médecin généraliste, dit médecin traitant, dans la prise en charge médicale de cette pathologie. Il surveille, détecte au plus tôt et coordonne. Il s’épuise également à remobiliser les patients car on remarque encore trop couramment un manque d’implication de ces derniers en faveur d’un « régime » de vie, dont on devine toutes les contraintes.

lemaireLemaire (Antoine), Au cœur de l’hypertension, Paris, Ed. Josette Lyon.

Le livre d’un médecin généraliste insistant sur le rôle du médecin généraliste. Quoique juge et partie, Antoine Lemaire se montre sans concession pour sa corporation . Une approche pédagogique, synthétique et complète du problème ; utile aussi bien au médecin qu’au patient.

Le traitement est un pis-aller, un ultime recours. Il intervient au moment où les règles hygiéno-diétététiques ne suffisent plus ou si le risque devient trop important. En fonction de l’âge du patient, d’éventuelles maladies associées et d’intolérances possibles… le médecin en détermine la forme et le contenu en administrant soit un seul antihypertenseur soit une combinaison de deux médicaments à faible dose. Dans tous les cas une adaptation ou du moins un contrôle s’avère nécessaire au bout des premiers mois.

caron-theryCaron (Jacques)-Théry (Claude), Prévenir et soigner les maladies du cœur : hypertension artérielle, infarctus du myocarde, insuffisance cardiaque, Paris, O. Jacob.

Ce travail sur les maladies du cœur consacre un chapitre spécifique à l’hypertension. Dans le contenu, il est principalement axé sur le traitement ; aussi si le titre de l’ouvrage est prévenir et soigner, la part la plus importante en revient au soin. Toute la fin du chapitre se présente comme un guide du médicament (une longue description de l’effet de ces médicaments, des tableaux des molécules accompagnés du nom commercial des médicaments). La partie prévenir se réduit à un examen des complications.

Le traitement de l’hypertension artérielle fait intervenir de nombreux médicaments appelés antihypertenseurs, dont :

– les diurétiques : favorisant l’élimination par voie urinaire. Car si le volume sanguin est diminué, la pression le sera aussi ;

– les bêtabloquants : en se fixant sur leurs récepteurs cardiaques, ils limitent la fréquence cardiaque et la pression artérielle ;

– les vasodilatateurs : en augmentant le diamètre des vaisseaux, ils diminuent la pression artérielle.

– les inhibiteurs calciques : ces molécules permettent de diminuer le transfert de calcium au niveau des cellules musculaires du cœur et des vaisseaux. Cela diminue la résistance des petites artères, d’où une charge de travail moins importante pour le cœur ;

– les inhibiteurs de l’enzyme de conversion : ils inhibent l’enzyme de conversion de l’angiotensine qui augmente la pression artérielle ;

Les traitements les plus couramment utilisés appartiennent aux trois premières catégories.

L’hypertension est-elle une maladie que l’on guérit ou que l’on soigne ? Au retour à la normale, le traitement est rarement arrêté. Il s’agit d’une maladie chronique dont le traitement est de longue durée, hormis dans certains cas spécifiques (hypertension liée à la grossesse, à des médicaments…) Cependant, il sera toujours possible d’envisager une réduction du nombre de cachet.

Un jour, peut-être, pourront-nous éviter l’hypertension : une entreprise suisse, Cytos Biotechnology, expérimente actuellement un vaccin, sous la forme d’un faux virus, capable de provoquer une baisse de tension en stimulant la réaction immunitaire du patient contre l’angiotensine. Les premiers essais sur l’homme sont encourageants.

Pourquoi prévenir ? Comment prévenir ?

Au vues des conséquences pour le patient et beaucoup plus cyniquement du coût non négligeable sur les dépenses médicales, la prévention est devenue un enjeu majeur. A titre indicatif en ce qui concerne la question du coût : une pathologie aussi fréquente que l’hypertension artérielle représente 11,3 % de l’ensemble des visites médicales et 12 % de l’ensemble des prescriptions pharmaceutiques, soit une dépense de 1,37 milliards d’euros environ pour la prescription de médicaments antihypertenseurs. Aussi, dès les années 1980, on perçoit distinctement une volonté de vulgariser, de favoriser la prévention pour inciter les populations concernées ou potentiellement concernées à la vigilance.

meyer2Meyer (Philippe), Hypertension artérielle, Paris, Hermann.

Le but de ce livre est annoncé dès les premières pages : favoriser la prévention et inciter à une grande prudence, bref à la surveillance. Ce livre certes ancien pose un jalon dans l’approche de médicale de l’hypertension : le choix de vulgariser et d’une certaine façon l’entrée de plein pied de la médecine dans une société de l’information. Sans compter que cet ouvrage fait encore référence en ce qui concerne la vulgarisation scientifique sur le sujet.

Parmi les recommandations de base : la mesure de votre tension artérielle devrait être faite une fois par an par le médecin (au moment de votre examen médical périodique). De plus, s’agissant des individus en situation de pré-hypertension, les recommandations classiques consistent en une modification du style de vie à travers le contrôle du poids, l’activité physique régulière et l’amélioration du régime alimentaire. Un régime pauvre en sel et en graisse est ainsi préconisé.
A noter : les considérations de Meyer, sur l’augmentation de la consommation de sel dans l’alimentation comme cause principale de l’hypertension, dans son ouvrage L’Homme et le sel, sont contestées et battues en brèche par de nombreux historiens : il est en effet difficile d’évaluer la consommation de sel aux siècles passés ; la conservation des aliments se faisant par salaison, les résidus devaient êtres quantitativement importants.

sarrazinSarrazin (Gabrielle), La diététique anti-hypertension, Vergèze, Thierry Souccar.

Dans une première partie théorique, on trouvera les règles d’or pour voir baisser son hypertension. Le contenu est somme toute assez classique, les pages les plus intéressantes seraient celles contenant la liste des faux amis, ces aliments à éviter auxquels l’on ne pense pas forcément (céréales, condiments…). La seconde partie se compose d’un cahier de 45 recettes souvent assez simples et rapides à préparer, mais parfois austères…

L’arrêt du tabac est vivement conseillé. Enfin, le cadre de vie doit être adapté pour limiter les situations stressantes. Pire encore… les résultats de certaines études tendent à suggérer qu’il y aurait nécessité d’administrer aux individus en situation de pré-hypertension, des traitements encore plus agressifs. L’ascétisme est-il donc la seule solution ?

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