Le médecin, le patient et l’Internet

- temps de lecture approximatif de 11 minutes 11 min - Modifié le 30/09/2022 par Admin linflux

La généralisation de l'usage d'internet a permis au profane d'accéder de façon illimitée à de nombreux savoirs. Et la médecine est bien entendu concernée par ces nouvelles pratiques. Dans cette océan d'informations, le patient est-il pour autant mieux informé ? Cela change t-il la donne dans les relations soignants-soignés ?

© Pixabay
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Internet est venu révolutionner la façon dont les patients s’informent sur l’état des connaissances médicales et dans le domaine des soins en général. Que ce soit pour une migraine, un mal de dos, à l’annonce d’un diagnostic médical ou encore pour un simple bobo, sept français sur dix se sont déjà renseignés sur Internet. L’essor de cette pratique vient bouleverser les relations soignants-soignés. Les outils mis à la disposition des internautes, comme les forums de discussion ou les pages dédiées des réseaux sociaux, ont fait évoluer la diffusion des savoirs, et surtout les expériences de santé. De nombreux patients se présentent désormais comme de véritables experts de leur maladie face une profession médicale quelque peu circonspecte. Certains acteurs s’inquiètent de la façon dont internet a des repercussions sur le comportement des malades. Ce nouvel accès à une information, jusqu’alors réservée aux professionnels, va-t-il donner le pouvoir aux patients ?

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1 – Le vécu du patient internaute

Une révolution ? Surtout pour les patients…

Les patients internautes refusent désormais de se fier à une seule source d’information – le corps médical. Ils fouillent le net, postent des messages sur des forums, discutent entre eux de leurs traitements.
Selon un sondage de l’IPSOS pour la HAS (Haute Autorité de Santé) intitulé Le patient internaute,
sept français sur dix utilisent aujourd’hui Internet pour avoir des informations en matière de santé : 65% l’ont déjà consulté pour en savoir plus concernant une maladie ou ses symptômes et 37% pour rechercher des témoignages d’autres patients.
Les thèmes de recherche les plus fréquents concernent une maladie ou une situation clinique ; un traitement ; la nutrition et la forme physique ; des alternatives thérapeutiques…
Le développement des sites communautaires marque également une nouvelle étape : les patients peuvent échanger leurs informations, en parler et ainsi élaborer leur propre base de connaissances, certains prétendant devenir de véritables experts de leur maladie. L’exemple de Carenity, créé récemment en France, est celui d’un site web communautaire dédié aux patients et à leurs proches concernés par une pathologie chronique et leur permet de trouver des réponses à leurs interrogations, des témoignages, de l’aide mais aussi la possibilité de ne plus être seuls face à la maladie.
Globalement les patients pensent que cette évolution de l’accès aux informations sur la santé est positive. Elle permet de compléter l’information transmise par le médecin et de mieux comprendre la maladie, son traitement et, à un moindre degré, aide à une meilleure prise en charge et à une meilleure participation à la prise de décision, mais aussi à trouver des traitements nouveaux ou des alternatives thérapeutiques. Davantage que le conflit, les patients semblent plutôt rechercher une coopération renforcée avec les médecins,

Le patient a-t-il pris le pouvoir ?

10e journée d’économie de la santé, Paris, le 10 juin 2009.
Editions John Libbey Eurotext, 2010.

Les intervenants questionnent les changements survenus dans la gestion des relations entre médecins et patients au cours des dernières années. Ils évoquent l’émergence des associations de patients, les droits des patients, leurs choix, leur rôle dans la recherche et leur implication dans les choix collectifs de santé, pour proposer ensuite une sociologie des liens entre praticiens et soignés.

Qu’est-ce qu’un bon patient ? Qu’est-ce qu’un bon médecin ?

Coordonné par Claire Crignon-De-Oliveira et Marie Gaille, éditions S. Arslan, 2010.

Comment expliquer les attentes de plus en plus fortes des patients à l’égard de leurs médecins ? Toujours plus informés, exigeants quant à leur traitement, ceux-ci attendent également du médecin un rapport plus personnel, plus humain.
Comment les médecins conçoivent-ils leur métier et le bon exercice de celui-ci ? Comment réagissent-ils de leur côté à l’évolution de la demande qui leur est adressée ?
Cet ouvrage entend contribuer à éclairer, par son approche à la fois empirique et critique, ce questionnement concernant la relation soignant-soigné. II propose ainsi, à travers une série de contributions issues d’un dialogue entre médecins et spécialistes en sciences humaines et sociales, une analyse des attentes normatives énoncées à l’égard du patient et du médecin.

Le malade et le médecin : une commune humanité

Par Hervé Broquet et Jacques Brotchi, éditions Couleur Livres, 2008.

Toute la difficulté et l’ambiguïté actuelle des relations médecin-patient s’articulent autour de cette problématique : jusqu’où la science doit-elle imposer son point de vue à l’homme libre ? Ou en d’autres termes : quelle est la bonne distance à tenir pour chacun dans la relation médecin-patient ? A quel endroit sur l’échelle de la relation doivent se rencontrer celui qui soigne et celui qui se fait soigner ? Voilà le thème principal de ce dialogue qui autour d’une quinzaine de questions à doubles réponses, celles, respectivement, du malade et du médecin, propose non pas l’élaboration de principes pour un système de relation idéal mais l’ouverture d’une brèche qui susciterait sinon l’envie d’un changement au moins celle d’une réflexion.

Etre médecin de soi-même : principes pour que chacun prenne soin de sa santé

Par Bernard Hoerni, éditions Glyphe, 2011.

Cet ouvrage est une réflexion sur les principes qui permettent de s’émanciper de la médecine tout en contribuant à sa santé : s’informer auprès de sources fiables, éviter les facteurs ou habitudes défavorables, se soigner seul pour des maux mineurs, ou consulter opportunément un médecin.

Santé : distinguer croyances et connaissance

Par Alfredo Morabia, éditions O. Jacob, 2011.

Aujourd’hui, on peut facilement se sentir submergé par l’abondance d’informations médicales fournies par les médias et, notamment, par Internet.
Comment faire la part entre ce qui n’est encore qu’une théorie, une hypothèse, une idée, une croyance et ce qui repose sur des données objectives et relève d’une connaissance dont on peut évaluer la qualité ?
En matière de santé, qu’il s’agisse de soins, de prévention ou de dépistage, l’épidémiologie est justement là pour nous permettre de faire la différence et de prendre des décisions plus avisées, pour nous ou nos proches.
Cette présentation de l’épidémiologie propose d’appliquer cette méthode dans la vie quotidienne afin de distinguer, dans la masse d’information disponible en matière de santé, ce qui relève de croyances ou de réelles connaissances médicales.

2 – L’avis du médecin

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Beaucoup de praticiens entendent aujourd’hui leurs patients leur parler de l’information qu’ils ont trouvée sur le Web.
L’importance de la consultation d’Internet en matière de santé suscite commentaires et inquiétudes dans le monde médical car, si le médecin est toujours la référence et la première source d’information en matière de santé, il doit désormais faire face à une concurrence en ligne. Certains médecins pensent que l’utilisation d’internet constitue une menace directe pour leur statut d’expert, mais surtout un danger pour les patients décrits comme « vulnérables », « désespérés » et « incompétents ».
Selon un sondage de l’Ipsos pour le CNOM (Conseil National de l’Ordre des Médecins) intitulé Internet ne remplace pas encore le médecin, le Web semble être plutôt un partenaire du médecin, il est perçu comme une aide qui facilite la discussion avec son patient et qu’il ne nuit pas à la confiance entre les deux parties. Certains vont jusqu’à qualifier Internet de “troisième acteur” de la relation médecin patient.

Selon les médecins, le principal problème d’internet est la qualité de l’information qu’on y trouve. La fiabilité de l’information diffusée est devenue un problème auquel les autorités publiques ont tenté de répondre en créant des labels comme le HON code pour protéger l’usager. La HAS a édité pour les internautes, un document qui les aide à identifier des sites de qualité : Internet santé faites les bons choix.
Pour l’Ordre des médecins, la place des médecins sur Internet passe notamment par un plus grand investissement de leur part sur la Toile, via la création d’un blog ou de leur propre site Internet. L’association des Médecins maîtres-Toile, regroupant des webmestres, pour la plus grande partie composé de Médecins, généralistes ou spécialistes, s’attachent à diffuser des informations fiables et accessibles à tous dans le domaine de la santé à la fois sur leurs sites et leurs blogs, mais également sur les réseaux sociaux, Facebook, Twitter.

Forts de la confiance dont ils bénéficient auprès de leurs patients, les médecins ont donc la responsabilité de les rediriger vers des sites fiables et certifiés, pour leur permettre de naviguer en toute sécurité. A propos de la grippe H1N1, devant leur patientèle perplexe sur l’opportunité du vaccin, plusieurs médecins généralistes ont signé le texte d’un confrère intitulé Faut-il ou non se faire vacciner contre la grippe ?, et ont renvoyé leur patient vers le site qui le diffusait. Il est intéressant de noter que ce texte, loin de fournir une réponse binaire à la question, explore au contraire les bénéfices et inconvénients de la vaccination pour mieux laisser le libre choix aux patients.
La relation médecin patient a progressivement évolué d’une relation paternaliste vers une relation partenariale dans laquelle le patient tient un rôle actif dans la prise de décision.

A quoi sert vraiment un médecin ?

Par Luc Périno, éditions Armand Colin, 2011.

Médecin généraliste, l’auteur propose de faire partager son expérience quotidienne en tant que professionnel de la santé. Il entend montrer l’importance que représente le médecin généraliste dans notre société, les dérives auxquelles certains confrères peuvent être amenés à succomber, et surtout l’utilité véritable qui devrait être celle du médecin, au-delà même de sa sphère de compétence.


Un bon médecin : pour une éthique des soins

Par Michel Geoffroy, éditions La Table ronde, 2007.

Chacun désire confier sa santé – physique et morale – à un ” bon médecin “.
Mais qu’est-ce qu’un bon médecin ?
Cet essai philosophique tente de répondre à cette question. Un ” bon ” médecin est à la fois savant, patient et prudent. La médecine contemporaine use et abuse, au point de devenir scientiste, de la médicalité. Elle décompose le corps, ne le perçoit que dans l’instant, réduit la maladie au biologique, et oublie l’homme. La science est nécessaire, mais elle ne peut suffire au bon médecin. Il faut également la patience, vertu qui laisse advenir le temps de l’autre – le malade – et permet de rétablir la symétrie dans une relation, au départ, totalement asymétrique : celui qui sait face à celui qui ne sait pas, ou peu.

Soigner (aussi) sa communication : la relation médecin-patient

Par Peter Tate, éditions De Beock, 2005.
Le Dr Tate présente dans cet ouvrage les comportements, les appréhensions, les réussites et les échecs du praticien débutant ou expérimenté mais également les peurs, les idées reçues, et les attentes du malade pour aider les médecins à adapter leur communication à leur patient et ainsi améliorer la relation médecin /patient.

Ce que soigner veut dire : repenser le libre choix du patient

Par Annemarie Mol, éditions Presses de l’Ecole des mines, 2009.

A partir de l’exemple des personnes atteintes de diabète, l’auteur propose une nouvelle manière de prendre soin des personnes, qui ne les transforme pas en citoyens ou en consommateurs, mais qui les reconnaît comme corps et âmes souffrants, comme individus investis dans leur propre prise en charge, comme membres de collectifs multiples. Ce livre-manifeste n’est pas une critique de la médecine ou des pratiques de santé mais il en appelle à une transformation radicale de notre regard.
Soigner, c’est prendre en compte la vie des personnes, leurs capacités et leurs incapacités, leurs entourages et leurs modes de vie. Remettant en cause les vertus trop consensuelles du libre choix, s’interrogeant sur les bonnes pratiques. Ce que Soigner veut dire non seulement intéressera les spécialistes de sciences sociales ou les patients actifs, mais il pourra aussi faire réfléchir les professionnels de la santé, les responsables de la politique sanitaire tout comme les militants et membres des associations.

Le consentement : droit nouveau du patient ou imposture ?

Sous la direction de Jean-Paul Caverni et Roland Gori, éditions In press, 2006.

“Consentez-vous à prendre ce traitement” ?
Au coeur de toute démarche médicale, la question du consentement, à la croisée d’une règle juridique et d’une règle éthique, soulève de nombreux enjeux abordés ici de façon transdisciplinaire. De sa définition philosophique à ses applications juridiques, médicales, psychiatriques et psychanalytiques, les auteurs apportent un éclairage sur un principe prépondérant dans la société contemporaine.

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