BEAU LABEL

L’Eglise de la Petite Folie, temple de l’indie

Un labyrinthe d'expérimentations et de pop en marge, au bon goût de cuisine lo-fi

- temps de lecture approximatif de 3 minutes 3 min - Modifié le 30/09/2020 par GLITCH

Voici 15 ans que l’Eglise de la Petite Folie pratique le culte de l’indépendance, du Do It Yourself, du rêve bizarre et des rencontres expérimentales... Cette bande de bretons irréductibles n’est pas seulement le label discret d’une pop de traverse cousue main, mais une véritable coopérative artistique.

"L’Eglise de la Petite Folie parle aux gens réveillés"
"L’Eglise de la Petite Folie parle aux gens réveillés"

A la manœuvre de l’engin, on trouve Maëlle et Arnaud le Gouëfflec. Lui est bédéaste, romancier, chanteur, musicien polymorphe. Elle tire les ficelles de cette organisation aux multiples facettes. Ensemble ils animent cet archipel musical et créatif où se croisent entités fantômes, collectifs éphémères, objets pop excitants et bizarres.

Au catalogue de l’EDPF, on trouve quelques piliers et compagnons de route qui donnent à l’Eglise son (petit) lustre de notoriété, et constituent sa Face A. Il y a Valier, dandy sombre quelque part entre Miossec et Daniel Darc, qui fait de temps en temps le bonheur de Télérama. C’est aussi le CentreduMonde avec sa cold-pop douce amère qui a séduit Magic ou Les Inrocks… Il y a encore John Trap, dont la science immédiate de l’arrangement éclate dans ses albums rock lo-fi et des musiques de films, réels ou imaginaires.

Reconnaissance artistique et outil pratique : le label La Souterraine a édité une anthologie de ces fondamentaux de l’EDPF :

 

John Trap et Le Gouëfflec sont à l’origine d’une somme impressionnante de projets obliques, jam-sessions, remixes, dubs et alias expérimentaux, où sont parfois conviés des musiciens amis lors de Sessions fantômes.

Ils alimentent la Face B du label, malle aux trésors et dédale de productions en série. On y trouve du rock garage (Jorge Bernstein & Pioupioufuckers), à côté de collages et paysages sonores, entre dada et avant-garde planante (Mes plus belles musiques de régiment, Folklore des Indes bavaroises). Pas loin, des vieilles chansons rejouées à neuf, démos remixées, cassettes exhumées et retravaillées (Le bon temps de la guillotine, 18 volumes !). Un peu après, les tribulations autour du Moog de L’orchestre préhistorique
Frayages divers et bricolages heureux sont au rendez-vous de ces objets musicaux à tiroirs. Le homerecording imprime sa patte chaleureuse, et l’expérimentation garde toujours une fraîcheur buissonnière, parfois ironique.

C’est aussi  l’occasion pour Le Gouëfflec, à l’origine de beaucoup d’entre eux, de changer de masque et de nom, d’assouvir sa soif d’identités graphiques et sonores, son obsession du recyclage et de l’expérimentation.

Pressés en vinyle ou disponibles uniquement en numérique, les enregistrements sont toujours accompagnés d’un artwork fait maison, soigné et original.

 

Pochette de "Chansons pour les soeurs André"

Le Gouëfflec

Pochette d'un disque de Studio Préhistorique

Studio préhistorique

Pochette du disque de Käpuch

Käpuch

Pochette du disque de Crustacés

Crustacés

 

 

 

 

 

Toute cette tribu se retrouve et s’élargit à l’occasion du Festival Invisible, à la programmation éclectique. Aussi international que breton, l’évènement creuse les marges expérimentales et indies de la chanson, de la pop et du trad. Magma, Père Ubu, Gang of Four ou Beak y côtoient le poète breton Manu Lann Huel ou l’accordéoniste Meriadec Gouriou… Le décloisonnement et la découverte y sont la règle, et le festival perdure avec bonheur depuis maintenant 11 ans.

 

Le Festival et le label convergent enfin autour d’une couveuse de musiciens et graphistes : Le Studio fantôme. Ce labo pluridisciplinaire a pour objet de “défendre le collectif de musiciens formé dans le sillage des ces deux aventures, de diffuser leur musique, de les aider dans leurs projets de création”. Le Studio propose aussi des lectures-concerts, spectacles jeune public, ateliers pour ados…l’EDPF ne néglige aucune terre de mission.

Car c’est un peu cela le credo de l’Eglise et de son pape pop Le Gouëfflec. Une curiosité inlassable, une envie de brasser les musiques, de les recréer sans fin autour d’un vivier local et d’un terroir imaginaire…  Sans s’arrêter sur une formule, un collectif ou un genre. Voilà pourquoi peut-être, ce labyrinthe de bandcamps, ces jeux de pistes et ces séries prodigues… usinés dans des entités aux noms évanescents.

L’Eglie de la Petite Folie oeuvre pour les noces oniriques et artisanales de la chanson, de la pop et du reste, du songwriting et de l’impro. Ambitieuse et invisible, foutraque et patiente, mondiale et locale… longue vie à l’Eglise !

 

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