Doctor Nerve – Beta 14 OK (1991)

- temps de lecture approximatif de 2 minutes 2 min - Modifié le 30/09/2022 par Admin linflux

Bien avant que les givrés du math-rock ne fasse florès (Hella, Don Caballero…), il y avait déjà quelques grands malades pour pousser la technicité et la bizarrerie dans ses retranchements non-euclidiens. Doctor Nerve était de ceux-là. Issu de la fertile scène « downtown » de New York, et visiblement inspirés par le courant « rock in opposition », ils usinent une musique faite de staccatos, de changements de rythmes improbables, de « mélodies » atonales et de virages à angle droit. Leur virtuosité fait bien vite tourner la tête, décollant parfois dans des sphères oscillant entre musique classique baroque et piano jazz monomaniaque (Fast Fourier Fugue). De Jazz, il est bien question ici, puisqu’on est à New York, et que Dave Douglas deviendra le batteur quasi-attiré de John Zorn dans ses aventures.

En attendant, Doctor Nerve peut se targuer d’être le premier groupe à créer un cd interactif, puisque les 44 dernières plages, de quelques secondes chacune, sont à programmer par l’auditeur sur sa chaîne, soit via la touche « program » soit en aléatoire via la touche « shuffle », afin de créer un morceau différent à chaque fois ! Forcément bancal et fou, comme toute la musique du groupe. Cet ancêtre involontaire de la « randomisation » chère à nos lecteurs MP3, paraît aujourd’hui bien désuet à l’heure où le média cd connaît des heures bien hasardeuses (sans jeu de mots).

Autre innovation à l’actif du groupe, la création d’un programme de composition « automatique », appelé DrNerve.hmsl, qui a permis à un ordinateur de générer 3 pièces du groupe, ici interprétées sous les titres « Nervware » numéros 1, 2 et 3. Le but était-il de créer une musique la plus invraisemblable possible, ou bien de tomber sur des signatures rythmiques qu’aucun compositeur humain n’aurait pu concevoir ? On pense aux expérimentations pour Synclavier de Frank Zappa à la même époque, et la volonté de s’extraire des limitations de la main humaine. Pourtant, tout est joué par de « vrais instruments » ici, et surtout les très punk Trash et Splinter, évoquant une version plus raide de Nomeansno auquel on aurait ajouté xylophones et cuivres dissonants.

Une question, au sortir de ce sac de nœuds instrumental, demeure et subsiste : pourquoi ? Le titre peut apporter un maigre élément de réponse : les ondes Beta sont des ondes cérébrales émettant quatorze pulsations ou plus par seconde, et apparaissent lorsque le cerveau est dans un état de nervosité critique. Psycho Killer, qu’ils chantaient…

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