Une Fabrique de l'innovation : Le poids lourd en Rhône Alpes : ces innovations qui nous transportent

- temps de lecture approximatif de 16 minutes 16 min - Modifié le 30/09/2022 par Admin linflux

Rochet-Schneider-12-HP-1912-s-f4a3f.jpg
Rochet-Schneider-12-HP-1912-s-f4a3f.jpg

La Bibliothèque municipale de Lyon programme du 5 novembre 2013 au 1er mars 2014 une série d’évènements qui parlent des révolutions industrielles en Rhône-Alpes à travers les domaines des pôles de compétitivité : le textile (Techtera), la chimie (Axelera), la plasturgie (Plastipolis), l’automobile et les transports (Lyon Urban Trucks and Bus), les biotechnologies (Lyonbiopôle), et l’image-cinéma (Imaginove). Expositions et rencontres sont regroupées sous le label Une Fabrique de l’innovation.

Le 11 juin 2013, sort le très attendu nouveau camion produit par la firme Renault Trucks, mettant fin à plusieurs mois de suspense. En effet, tout concernant ce véhicule, y compris son nom et son apparence, a été tenu secret. Des festivités sont organisées à l’usine de Bourg en Bresse, dont un défilé de véhicules anciens prêtés par la Fondation Berliet. Le dernier-né de chez Renault, entouré de ses glorieux ancêtres, voilà qui illustre bien l’importance du poids lourd en Rhône-Alpes. Actuellement, c’est Renault Trucks qui symbolise cette activité économique régionale pointue.



Sommaire

1. À toute vapeur !

2. « J’ai raté la bicyclette, je ne raterai pas l’automobile »

3. Berliet, Rochet-Schneider et Luc Court, le tiercé gagnant lyonnais

4. A la Libération : encore et toujours des innovations

5. « A transport donné, matériel approprié »

Pour en savoir plus

La région Rhône-Alpes est historiquement dynamique dans le domaine du poids lourd. En 1921, par exemple, on compte 92 720 camions en France dont 2753 dans le Rhône. C’est le troisième département qui totalise le plus de poids lourds, rendant bien compte du dynamisme historique de la région dans le domaine des véhicules industriels.

21) À toute vapeur !2

Jusqu’au 18ème siècle, la seule force motrice connue est la force animale. Vient ensuite la vapeur. Vers 1769, Joseph Cugnot, un ingénieur militaire parisien construit son premier « chariot de feu », un véhicule à robuste châssis destiné à transporter des canons et autres lourdes charges. Le fardier du Cugnot est un véritable poids lourd à vapeur. Malheureusement, un accident de la route et le désintérêt des pouvoirs politiques de l’époque mettent un terme aux recherches de Joseph Cugnot.

A partir de 1800, de nombreux constructeurs se lancent dans la fabrication d’automobiles à vapeur mais le développement de la voiture est freiné par celui du chemin de fer. Les constructeurs s’orientent donc vers d’autres secteurs tels que l’agriculture, le transport de marchandises ou encore les usages militaires. A cette époque déjà, on remarque le dynamisme de la région Rhône-Alpes dans ce domaine. Ainsi, en 1850, Verpilleux instaure un service de transport routier entre Rive de Gier et Lyon. Aux alentours de 1884, la maison Tapissier de Saint-Etienne utilise des fourgons de déménagement à vapeur. En raison de leur mauvais état, les routes ne peuvent supporter le passage de véhicules lourds, contraignant les premiers camions à être de petits utilitaires.

Léon Serpollet, originaire de Culoz, invente la chaudière à vaporisation instantanée. A partir de 1890, Maurice LeBlant construit des poids lourds à vapeur destinés au transport de marchandises, équipés de générateurs Serpollet. En 1893, la firme Scotte développe des tracteurs routiers à vapeur et fait appel au savoir-faire lyonnais pour la construction des moteurs et chaudières, fabriqués par Buffaud & Robatel, et des châssis construits par les Chantiers de la Buire.

22) « J’ai raté la bicyclette, je ne raterai pas l’automobile » 2

Marius Berliet ne croit pas si bien dire lorsqu’il fait cette déclaration à son cousin Geay. En effet, c’est l’automobile ou plutôt le poids lourd qui fera sa renommée. Les débuts du poids lourd sont confondus avec ceux de l’automobile, mais en ce début de 20ème siècle, le camion tel que nous le connaissons émerge grâce à l’ingéniosité de quelques constructeurs.

A la fin du 19ème siècle, les besoins de l’industrie sont croissants. En 1899, la France totalise 5600 propriétaires de voitures particulières. En 1903, plus de 30 000 véhicules sortent des usines françaises. La production porte essentiellement sur les voitures de tourisme. La crise engendrée par la surproduction de voitures pousse les constructeurs à diversifier leur production. Le début du 20ème siècle voit la généralisation du moteur à pétrole et l’émergence de constructeurs qui redoublent d’inventivité et marquent l’histoire du poids lourd.

Louis Renault, constructeur d’automobiles originaire de la région parisienne, crée l’événement avec un véhicule de 3 chevaux, une charge utile de 250 kg : l’ancêtre des camionnettes d’aujourd’hui. Il construit son premier châssis de camion 6 ans plus tard. A la même époque, le marseillais Georges Latil transforme des charrettes hippomobiles en véhicules automobiles grâce à son révolutionnaire avant-train. Avec cet ingénieux procédé, Latil invente la traction plus tôt qu’André Citroën. Cependant, toutes les innovations qui voient le jour ne sont pas le propre de ces deux constructeurs, les lyonnais ne sont pas en reste !

Marius Berliet construit sa première voiture en 1893 et son premier utilitaire en 1902. Quatre ans plus tard, il met au point son premier camion : le Berliet type L. L’ouvrage Berliet de Lyon rapporte les propos de l’historien Lucien Loreille qui commente les premiers essais du camion : “Le premier camion Berliet est un 2 tonnes à poste de conduite avancé où le chauffeur n’a aucune protection contre les intempéries. Les roues à rayons bois sont cerclées de fer et le freinage s’effectue par deux sabots frottant sur les jantes arrières à la manière des diligences et des wagons de chemin de fer. Il n’est pas rapide, il freine mal et il est aussi laid que bruyant. […] Il faut dire aussi pour sa décharge que cet engin a les qualités qu’on attend de lui. Il est simple, maniable, demande peu d’entretien et sa robustesse est son atout n°1. Il accepte sans faiblir le double de la charge prévue”.

Rochet-Schneider, un autre constructeur d’automobiles lyonnais, développe une large gamme de moteurs de différentes puissances allant de 16 à 70 chevaux, ce qui le destine tout naturellement à développer une gamme étoffée d’utilitaires. En 1906, la société achète le brevet de François Baverey portant sur un système de carburateur révolutionnaire, le carburateur « Zénith », qui équipe tous les véhicules Rochet Schneider et participe à leur renommée.

JPEG - 97.4 ko
Rochet-Schneider-12-HP-1912
Fondation Berliet (Lyon)

Un troisième Lyonnais, brillant ingénieur diplômé de l’Ecole Centrale de Lyon, se distingue. Avant de se lancer dans l’automobile, Luc Court s’intéresse d’abord aux applications de l’électricité et invente divers outils tels que des treuils de levage, monte-charges, palans électriques, etc… En 1903, il crée un carburateur à gicleurs multiples, « brevet Luc Court », puis en 1908 il s’essaie au poids lourd avec un camion à conduite avancée équipé d’un moteur 4 cylindres et de roues à bandages en acier. Luc Court propose également des véhicules pourvus du système Lacoin : un châssis démontable qui permet de transformer une fourgonnette utilisée pour les livraisons en semaine, en voiture de tourisme pour le dimanche. A partir de 1912, le constructeur fabrique une gamme de camionnettes allant de 1000 à 1800 kg de charge utile qui constituent longtemps la spécialité de la maison et sont particulièrement utilisées par l’armée lors de la Première Guerre mondiale.

JPEG - 6.6 ko
Luc Court-camionnette-1919
Fondation Berliet (Lyon)

1909 marque un tournant décisif dans l’histoire du poids lourd. Marius Berliet présente son camion, le 22 HP Type M. C’est un véhicule de 3500 kg de charge utile, équipé d’un moteur de 4,5 L de cylindrée avec un système astucieux de freinage par double pédale agissant sur la boite de vitesse et l’essieu arrière et des roues à bandage en caoutchouc. Il peut atteindre une vitesse de 25 km/h, soit bien plus que les modèles de l’époque. Il est considéré comme l’un des premiers camions modernes de l’histoire du véhicule industriel. En 1988, il est classé monument historique en tant que “représentant de la première génération de camions”.

JPEG - 77.5 ko
berliet-22-hp-1910
Fondation Berliet (Lyon)

Des concours de poids lourds sont organisés par l’Automobile Club de France dès 1897, puis par l’armée à partir de 1906. Les véhicules vainqueurs bénéficient d’une prime de l’Etat lors de leur achat par des particuliers et peuvent être réquisitionnés par l’armée en cas de conflit. En 1913, est organisé un concours militaire réservé aux véhicules industriels : une épreuve d’endurance de 30 jours en circuit fermé attend les concurrents. 74 camions représentant 18 constructeurs différents sont au départ. L’un des grands gagnants est le constructeur lyonnais Marius Berliet (son grand rival Renault ne fait pas partie du palmarès) : 4 camions primés sur 4 présentés. L’un d’eux se détache particulièrement : le « CBA ». Ce camion de 3 tonnes de charge utile dispose d’un moteur puissant et robuste, spécialement construit pour lui et pouvant atteindre une vitesse maximale de 30 km/h. A la veille de la Première Guerre mondiale, Berliet représente 65 % de la production française de poids lourds.

En 1914, la guerre éclate, l’armée réquisitionne les camions achetés grâce aux primes allouées par l’État. Les CBA de Berliet participent à l’un des événements les plus marquants de la Grande guerre : affectés au transport des troupes et de matériel vers le front de Verdun, ils arpentent par centaine la « Voie Sacrée ». La robustesse et l’endurance de ce camion lui vaut son surnom : « l’Increvable ». En 1916, les usines Berliet produisent 40 CBA par jour, une cadence encore jamais atteinte et qui ne sera dépassée qu’en 1918 avec les camions de guerre américains Liberty. Berliet continue à produire des CBA après la guerre et même si le modèle évolue, ce camion est fabriqué jusqu’en 1932. Au total, 49 000 CBA sont sortis des usines en 19 ans de fabrication.

JPEG - 8 ko
CBA-1917
Fondation Berliet (Lyon)

23) Berliet, Rochet Schneider et Luc Court, le tiercé gagnant lyonnais2

Les années qui suivent la guerre ne sont pas particulièrement fastes pour les constructeurs de poids lourds, mais cela ne les empêche pas de continuer à innover et à développer de nouveaux modèles.
Le conflit terminé, l’armée écoule le surplus de véhicules militaires, principalement américains. L’activité des constructeurs de poids lourds français s’en trouve fortement ralentie. Ils orientent donc leur production vers d’autres domaines. On voit notamment circuler à Lyon des fourgons postaux bordeaux et jaunes Luc Court.

La société Rochet-Schneider pallie le manque d’activité en fabricant des bus aux carrosseries élégantes et très soignées qui font sa renommée. Rochet-Schneider croit au potentiel du véhicule utilitaire. Il travaille à l’élaboration d’une nouvelle gamme dont le fleuron est une camionnette de 13 chevaux avec un nouveau moteur. Ce petit camion est très en avance pour l’époque car son moteur se démonte sans enlever la boîte de vitesse, ce qui facilite la maintenance. Autre innovation du véhicule, une série de larges freins à tambours à l’avant permet un freinage énergique. En 1925, Pierre Lemaire ingénieur conseil chez Rochet-Schneider achève la mise au point du moteur « flottant ». La firme Rochet-Schneider, dirigée par des financiers, ne veut pas assumer les frais engendrés par un dépôt de brevet et laisse l’invention tomber dans le domaine public. Elle sera remise au goût du jour par André Citroën qui équipe sa « Rosalie » d’un tel moteur. La firme se spécialise aussi pendant un temps dans les voitures d’incendies.

Dans les années 30, la crise impose aux constructeurs de développer de nouveaux carburants pour remplacer le pétrole. Dès 1923, Marius Berliet choisit la technique du gazogène : il s’agit de faire brûler du bois sec coupé en morceaux sans autre préparation particulière. Berliet teste ses premiers « gazobois » sur des voitures et le CBA. En 1929, un autobus Berliet fonctionnant au « gaz des forêts » circule dans Paris en arborant la publicité « Marche sans essence ». En 1938, des véhicules au gazogène font une traversée du Tanganyka en moins de 10 jours en se ravitaillant avec le bois trouvé sur place. A la veille de la Seconde Guerre mondiale, Marius Berliet est le seul à posséder un système parfaitement au point. Ses concurrents aussi se lancent dans « le carburant national ».
La société Rochet-Schneider qui connaît une belle réussite dans la fabrication des autocars, conçoit quelques châssis-moteurs équipés au gaz comprimé, ce qui donne lieu à la commande d’une vingtaine d’autocars par la compagnie des Omnibus et Tramways de Lyon. La firme poursuit ses études dans le domaine des carburants de remplacement et construit « le 420 », un véritable camion gazogène avec un moteur spécialement conçu pour lui.

Au milieu des années 20, un nouveau type de moteur fait beaucoup parler de lui : le Diesel. Louis Renault fait office de pionnier en commençant la construction de son propre moteur Diesel dès 1925. Marius Berliet n’est pas loin derrière et, en mars 1930, il achète la licence ACRO à la firme Bosch. Les essais du moteur sont enfin concluants en janvier 1931. Le constructeur ne cesse de développer ses véhicules fonctionnant avec un moteur à « huile lourde », si bien qu’en 1933, 90 % des camions Berliet sont équipés d’un moteur Diesel. Cependant, le système Acro utilisé par Berliet atteint ses limites et sera remplacé par le système Ricardo. Un défaut du moteur pousse André Cattin, chef du bureau d’études de la société Berliet, à instaurer la garantie totale des moteurs. A cette époque, Berliet est le seul à proposer une gamme complète de poids lourds de 2 à 20 tonnes à moteur Diesel.
Le Diesel séduit aussi les autres constructeurs lyonnais. Rochet-Schneider achète également une licence étrangère pour développer son propre moteur Diesel. Testé en 1934-1935, le moteur est amélioré puis officiellement présenté sur un nouveau châssis connu sous le nom de « 425 ».
Luc Court met lui aussi au point un moteur et obtient le brevet pour le « perfectionnement aux mélangeurs d’air pour injection de combustible dans un moteur à explosion », le 21 juin 1938. Les moteurs « Luc Court à huile lourde » se font remarquer par leur marche souple, sans odeur, ni fumée ainsi que par leur simplicité de conception et l’accessibilité de leurs organes.

JPEG - 5.6 ko
Luc Court-MC-2-1929
Fondation Berliet (Lyon)

La Seconde Guerre mondiale interrompt cet élan créateur. A la Libération, les constructeurs se retrouvent avec des gammes de véhicules vieillis qui peinent à faire face à la concurrence des véhicules américains. Beaucoup de constructeurs ne s’en relèvent pas comme « La société des Anciens Etablissements Luc Court » qui ferme ses portes en 1950, suivie de près par Rochet-Schneider, absorbé par Berliet en 1951.

24) A la Libération : encore et toujours des innovations2

Dans les années 50, les constructeurs s’engagent sur la voie de la reconstruction. L’entreprise Berliet est passée sous la direction de Paul Berliet, le fils de Marius, et donne naissance à quelques-unes de ses plus mythiques réalisations.
Dès 1949, une nouvelle gamme complète de camions est étudiée. En 1950 sort l’un des camions les plus emblématiques de tous les temps, le « GLR », véritable concentré d’innovations. Tout d’abord son moteur 5 cylindres est une configuration totalement inédite pour l’époque. Sa carrosserie est entièrement métallique alors que jusque-là, les carrosseries étaient des coques de bois recouvertes de métal. Le GLR rencontre un immense succès et est fabriqué de 1950 à 1977, soit pendant 27 ans (un record !). En 1994, un jury réuni par la revue Les Routiers à l’occasion des 60 ans du magazine, l’élit camion du siècle.

JPEG - 5.1 ko
Berliet-GLR-1958
Fondation Berliet (Lyon)

Dans les années 1950, la découverte de riches gisements de pétrole dans le Sahara provoque une intense activité de transport dans la région. Berliet, déjà solidement implanté en Algérie, imagine un véhicule spécialement conçu pour le transport de masses indivisibles ou d’énormes charges sur les pistes du désert. Le T100 6×6 Sahara est présenté en 1957. C’est un monstre au poids total roulant de 110 tonnes animé par un moteur surpuissant de 600 chevaux avec des pneus de 2,20 mètres de diamètre. Seulement 4 exemplaires du T 100 ont été fabriqués. Deux d’entre eux ont servi dans le Sahara sur les gisements de pétrole, un autre a été utilisé dans une mine d’uranium à ciel ouvert en Haute-Vienne et le quatrième a participé à une exposition à Tulsa dans l’Oklahoma (Etats-Unis).


Berliet-T-100-1957

Dans les années 60, Berliet souhaite investir le marché de la livraison urbaine. En 1965, est présenté le Stradair un petit camion de 5 tonnes pourvu de grandes innovations. Il étonne d’abord par sa ligne : son large capot plongeant offre au conducteur une meilleure visibilité et permet de loger le radiateur à côté du moteur (facilitant l’entretien). Mais l’innovation majeure du Stradair réside dans sa suspension pneumatique, un système baptisé « Airlam », une combinaison de ressorts à lames et de coussins d’air. Le Stradair bénéficie d’une campagne de publicité incroyable pour l’époque. Une journée de présentation du camion est même organisée à Miramas, durant laquelle le cascadeur Gilles Delamare réalise des sauts avec le véhicule. Cependant, le Stradair ne connaît pas le succès promis. Une réglementation de police à Paris limite la surface au sol des camionnettes de livraison à 9m². Or, le nez allongé du camion occupant à lui seul une surface de 2,50 m², les transporteurs boudent ce camion. L’autre « défaut » du Stradair vient de sa suspension qui assurait aux conducteurs un tel confort qu’ils avaient l’impression d’être au volant de leur voiture et freinaient insuffisamment à l’approche des obstacles, provoquant des dégâts.

JPEG - 55.3 ko
Berliet-Stradair-1965
Fondation Berliet (Lyon)

Dans le domaine des innovations, on peut également noter la cabine basculante KB 25400 qui équipe les tracteurs TR 300 et facilite ainsi l’entretien.

Dans les années 50 et 70, on assiste à plusieurs concentrations. En 1955, Latil, Somua et les poids lourds Renault fusionnent pour former la Société Anonyme des Véhicules Industriels et d’Équipements Mécaniques, ou Saviem. Puis en 1975, Berliet est racheté par la régie Renault. L’entreprise lyonnaise et la Saviem fusionnent en 1978 pour former Renault Véhicules Industriels (RVI). Les deux marques sont conservées mais cohabitent difficilement avant d’être supprimées en 1980 pour faire place à des camions roulant sous le nom Renault. Les tensions au sein de l’entreprise n’empêchent pas Renault de continuer sa quête d’innovations. Dès 1981, Renault VI travaille sur le brevet Common Rail, ou système d’injection à rampe commune. Les premiers véhicules fabriqués en série disposent d’un moteur équipé du système Common Rail sont les R340.

1990 est l’année d’un nouveau départ, Renault présente son nouveau camion l’AE qui sera bien vite plus connu sous le nom de Magnum. Ce camion est innovant à plus d’un titre. Le Magnum est équipé de la première cabine à plancher plat dans laquelle on peut tenir debout (cabine surélevée). Il dispose également de freins à disques à l’avant, une innovation développée par Renault dès 1988. De plus, le projet Magnum est la première réalisation commune de Berliet et Saviem depuis la fusion.

25) « A transport donné, matériel approprié » 2

C’est ce qu’avait coutume de dire Louis Renault lorsqu’il s’appliquait à satisfaire au mieux les besoins de sa clientèle en proposant des véhicules de toutes puissances, tous tonnages et de toutes carrosseries. En effet, les constructeurs de poids lourds commencent très tôt à fabriquer des châssis aux formes spécifiques en fonction des besoins. Pour le transport de liquides, ils mettent au point les châssis porte fûts, sorte d’ancêtre du camion citerne. Les porte fûts ont été très utiles lors de la bataille de Langres en 1906 pour ravitailler les troupes en eau. Cette manœuvre militaire est en réalité une simulation de bataille destinée à tester la réactivité des troupes françaises en cas d’attaque. Parmi les véhicules utilisés se trouve l’un des premiers camions de Berliet. Ce véhicule est le seul à ne pas manquer une étape et fit même des tournées en plus pour remplacer les camions indisponibles.

La benne basculante voit rapidement le jour. La société Marrel d’abord installée à Saint-Etienne puis à Andrézieux, commercialise la première benne basculante à potence et à câbles. D’autres inventions suit comme le système Ampliroll, un bras articulé hydraulique permettant de fixer une carrosserie amovible sur un porteur, ou le compas, une sorte de bras articulé permettant d’obtenir un mouvement de rotation.

Au début du 20ème siècle, Valentin Purrey construit des camions à carrosserie isolée (isotherme) avec des parois en bois recouvertes de papier isolant ou de briques de liège pour approvisionner Lyon, la vallée du Rhône, Marseille et la Côte d’Azur en glace. En 1906, la société laitière Maggi s’équipe de camions à carrosserie isolée avec un compartiment pouvant contenir 700 kg de glace. Il s’agit là du premier camion réfrigérant, qui permet d’abaisser la température à l’intérieur de la caisse sans l’aide d’un appareil mécanique de production de froid. Bien plus tard, les « camions frigo » s’équipent de groupes électrogènes permettant de générer du froid.
En 2009, l’entreprise de carrosserie Frappa installée à Davézieux en Ardèche, lance la « Silent Green », la première semi-remorque frigorifique équipée d’un système de réfrigération à l’azote liquide. Cette invention a remporté le prix de l’innovation technique 2010.

2Pour en savoir plus :2

- Fondation Berliet

Dans le cadre de sa mission de sauvegarde du patrimoine industriel, la Fondation Berliet dispose d’un centre d’archives et de documentation ouvert à tous les amateurs de poids lourds et d’automobiles. Il peut fournir des reproductions de documents techniques, des publicités, des articles de presse et des photos sur les poids lourds, l’automobile et l’histoire du transport. Les modalités d’accès à ces ressources documentaires ainsi qu’un grand nombre de photos, articles et autres documents sont disponibles sur le site internet de la Fondation.

- Berliet de Lyon de Jacques Borge, 1981.

- Renault Trucks de Patricia Kapferer, 2005

- Camions français : 1880-1980 d’Henry Wailly, 2003
- Camions français d’Henry Wailly, 2003

- Berliet : 1945 – 1950
- Berliet : 1951 – 1953
- Berliet : 1954 – 1957
- Berliet : 1958 – 1960

- Frappa veut développer la carrosserie durable, le Dauphiné Libéré, 13 mars 2013 (consulté en ligne le 03/06/2013)

Partager cet article