Fourvière : des nuits sans fin

- temps de lecture approximatif de 4 minutes 4 min - par docreg

Depuis son inauguration par le maire Edouard Herriot, le 26 juin 1946, le théâtre antique de Fourvière accueille tous les ans ce que nous appelons aujourd’hui les Nuits de Fourvière. Néanmoins, l’histoire de ce festival n’est pas celle d’un long fleuve tranquille.

Représentation musicale au Théâtre Antique Orchestre national de Lyon
Représentation musicale au Théâtre Antique Orchestre national de Lyon

Le lieu, vestige d’un passé romain

Au début des années 1930, des fragments et vestiges gallos romains sont découverts par les sœurs du refuge de la Compassion. Il s’agit d’un théâtre antique romain et de l’Odéon dont l’origine a été datée en 43 avant J.C, date de la fondation de la ville. Ces deux structures ont été au centre de la vie de la cité pendant trois siècles, puis abandonnées au IIIème siècle au profit de la partie basse de la ville et utilisées pendant le Moyen Âge comme carrière de pierre.

Ce n’est qu’en 1933, qu’Edouard Herriot, maire de la ville, décide, sur décision du conseil municipal, d’entamer des fouilles sur le site en créant un chantier appelé chantier chômage le 25 avril 1933. Cependant les fouilles seront ralenties par la Seconde Guerre mondiale mais se poursuivront. C’est le 26 juin 1946, jour de l’inauguration du théâtre,  qu’ Edouard Herriot prononcera son discours nommé La Triple Gloire de Lyon revenant sur l’histoire de Lyon et fera ainsi revivre Lugdunum, capitale des Gaules. Le maire de Lyon souhaitait un retour à l’Antiquité permettant ainsi de révéler à ses concitoyens leur propre grandeur.

Vue d’ensemble des travaux de fouilles du théâtre

Cette volonté du maire de Lyon de conserver le théâtre dans le passé de Lugdunum se retrouve jusqu’à son refus d’utiliser un éclairage électrique jusqu’en 1949 mais des torches comme l’indique une délibération du conseil municipal. Le Festival imaginé par Edouard Herriot a, toutefois, évolué au cours des éditions.

Une histoire mouvementée

Au fur et à mesure les éditions passent mais ne se ressemblent pas. Le festival, imaginé par Herriot, se transforme en Jeux de Lyon Charbonnière grâce au financement de Georges Bassinet, directeur du casino de Charbonnière les Bains. Entre 1949 et 1959, le festival de Lyon Charbonnière se déroulera entre le théâtre antique de Fourvière et les soirées organisées au casino de Charbonnière. Le problème majeur de cette période est la rivalité apparente avec la municipalité de Lyon, froissée, de ne pas avoir été à l’origine du projet.

Après 1959, à la suite de la mort d’Edouard Herriot et de Georges Bassinet, le Festival perd le financement du casino. Louis Pradel, nouveau maire de la ville, associe les institutions culturelles lyonnaises comme l’Opéra et le Théâtre des Célestin qui deviennent membre du Comité artistique. Le Festival de Lyon permet à ces institutions de programmer leurs événements estivaux. Louis Erlo, directeur de l’Opéra de Lyon va devenir un personnage central de la programmation et du déroulement du Festival de Lyon.

A partir de 1978, le Festival de Lyon souhaite une qualification internationale en invitant différents artistes du monde entier. Néanmoins, le Théâtre antique romain se voit délaissé au profit d’autres scènes dans Lyon. Un autre problème apparait : le manque de coordination concernant la direction artistique qui conduit à la perte de la qualification internationale. Le mythique théâtre sera alors occupé en dehors de la période du festival.

Andrea Chénier de Giordano au Théâtre antique de Fourvière en 1989

C’est en 1994 que le Festival est baptisé Nuits de Fourvière par Patrice Armengau qui fut l’intendant coordinateur du festival. Les débuts de ce festival restent des soirées organisées par les institutions lyonnaises. Ce n’est qu’en 2003, à la nomination de Dominique Delorme, que le Festival va se doter d’une programmation propre et en 2006 devient un Etablissement Public Industriel et Commercial lui garantissant une certaine autonomie. Le libre choix de la programmation a permis au Festival de proposer une plus grande diversité de spectacles.

Evolution de la programmation

Sous l’ère d’Edouard Herriot, la programmation était très classique se limitant au théâtre, à l’opéra et à des concerts de musique classique. Le maire de Lyon déclara alors :

« Le théâtre antique de Fourvière sera uniquement réservé à des manifestations artistiques de qualité exceptionnelle »,  

Ce faisant, Herriot décida de faire renaître la ville de Lugdunum à l’aide notamment avec la tragédie d’Eschyle Les Perses en 1946.

La programmation du Festival est restée, pendant les différentes périodes, très classique avec néanmoins l’arrivée de nouveaux arts tels que les arts plastiques, avec des expositions consacrées à des peintres classiques. La danse, toujours classique va également faire son apparition. Dès 1969, les nouvelles compagnies théâtrales lyonnaises se voient mises sur le devant de la scène jouant un répertoire de plus en plus moderne. Une tentative de rénovation fut lancée par Louis Erlo dans les années 1970 n’aboutissant pas à de grands changements.

L’arrivée du jazz, du blues et du rock sur la scène du théâtre antique de Fourvière ne se fera pas pendant la période du Festival mais durant des soirées comme ce fut le cas en 1978 avec la New Wave French Connection marquant l’arrivée du rock à Fourvière. La programmation se modernise au fur et à mesure en se détachant des tragédies classiques.

En 1995, le cinéma fait son apparition aux Nuits de Fourvière renforçant la pluridisciplinarité des arts présentés. Dominique Delorme, directeur des Nuits de Fourvière depuis 2003, a présenté des programmes pluridisciplinaires intégrant une nouveauté qui est le cirque. Néanmoins, quelques critiques transparaissent notamment dans le fait que Fourvière est devenu un lieu obligé pour les artistes permettant d’établir une certaine notoriété comme ce fut le cas pour Muse en 2000.

Lumières, création de Maurice Béjart en 2001 au Théâtre antique de Fourvière

 

Les Nuits de Fourvière 2017 se déroulent en ce moment jusqu’au 5 août avec un programme varié mêlant musique, théâtre, opéra, cirque et danse. Aujourd’hui le festival tend à s’ouvrir à d’autres lieux, sans délaisser les vestiges du grand Lugdunum, de s’ouvrir à différents publics et une pluridisciplinarité croissante offrant un plus grand choix aux spectateurs.

 

pour aller plus loin :

Robert de Fragny, 50 ans de vie culturelle à Lyon

Bataillon Michel, Géraldine Mercier, Richard Robert, 1946-2015 Fourvière une histoire, Archives d’un festival

http://www.nuitsdefourviere.com/

http://www.fourviereunehistoire.fr/

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