QUAIS DU POLAR 2017

Perles Pépites Polars

- temps de lecture approximatif de 6 minutes 6 min - Modifié le 30/03/2017 par AudreyB

Ils nous ont emballés, ils nous ont vampirisés, ils nous ont chamboulés, ils nous ont empêchés de manger, de dormir, de dîner en ville, ils nous ont fait froid dans le dos, ils nous ont fait monter la tension, ils nous ont rendus addictifs, ils nous ont rendus sauvages, eh bien les voici : nos polars fétiches de cette année, un tour du monde noir et très en forme !

 

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Père, fils, primates / Jon Bilbao (Mirobole)

Joanes est un entrepreneur en difficulté : son affaire de climatisation ne va pas fort et s’il ne signe pas ce contrat qu’il attend, il devra mettre la clé sous la porte. Alors qu’il célèbre le second mariage de son beau-père, il croise son ancien professeur d’université mais aussi un chimpanzé très spécial… Un ouragan frappe alors les îles mexicaines : Joanes plonge rapidement dans le burn-out et l’obsession de la vengeance.

Un très bon roman noir sur fond de tornade et de descente aux enfers, qui évoque aussi bien Le Couperet de Donald Westlake que le terrifiant Shining de Stephen King.

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La fille dans le brouillard / Donato Carrisi (Calmann-Lévy)

Un thriller sur le pouvoir des médias. Dans un petit village des Alpes, une jeune fille disparaît. Le commissaire Vogel, véritable star de la police est envoyé sur place. Pourtant ce dernier se révèle un commissaire aux pratiques douteuses : n’arrivant pas au bout de son enquête et sous la pression des médias omniprésents, il n’hésite pas à fabriquer un coupable, en falsifiant les preuves. Tenir en haleine,  bouleverser l’opinion, importent plus que la vérité des faits… L’enquête avance au gré des interventions médiatiques, de l’information au jour le jour, avec des scoops et des rebondissements de situation.

Un rythme soutenu, pour ce roman habilement mené, à l’intrigue finale surprenante.

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L’été du commissaire Ricciardi / Maurizio De Giovanni (Payot & Rivages)

La faim et l’amour, immersion dans le Naples de 1931.

Le troisième volume des aventures de Luigi Alfredo Ricciardi et de ses acolytes se situe au cœur du mois d’aout 1931. Cette fois-ci, il s’agit du meurtre d’une duchesse volage. Derrière la structure récurrente et sans surprise de cette enquête, l’auteur donne une nouvelle force à son récit en développant le don maudit, la violence, la brutalité, la fatalité, et bien entendu la joie de vivre des napolitains. Le meurtre et sa résolution n’est que l’occasion de raconter Naples au temps du fascisme triomphant.

Ce portrait de Naples est une restitution tout en finesse et en profondeur du contexte historique et social du début des années 1930.

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Zero / Marc Elsberg (Piranha)

Qui surveille ceux qui surveillent ? Et qui surveille ceux qui surveillent ceux qui surveillent ?

Souriez ! Vous êtes indexés, inventoriés, étiquetés, classés, analysés, non seulement avec votre accord mais également avec votre aide. Car vous êtes rémunérés pour fournir toutes vos informations personnelles. Et puis arrive un fâcheux incident : un décès brutal qui dévoile quelques milliers de morts… Que se passe-t-il ? Suicides ? Meurtres ?  Marc Elsberg interpelle sur cette réalité dérangeante de notre société 2.0 : que peuvent devenir nos données personnelles fournies par nos diverses connections, par les informations que nous donnons pour quelques avantages ? Comment peuvent-elles être utilisées ? Par qui ? Pourquoi ? Quel est le sens du mot gratuit dans cette société ?

Zero est (était) un thriller d’anticipation (?) captivant, avec une écriture énergique, qui interroge avec acuité notre société contemporaine.

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Les justiciers de Glasgow / Gordon Ferris (Seuil)

Glasgow, quelque part au début des années 1950. La guerre est encore présente partout même si la reconstruction pointe à l’horizon. Douglas Brodie, ancien major d’élite devenu journaliste, est chargé de sa première affaire importante pour la Gazette : il couvre le procès d’un militaire qui meurt de faim depuis son retour des champs de bataille. Lorsque la condamnation tombe, une bande de vengeurs improvisés se met à rendre la justice à sa façon à travers toute la ville en punissant les « vrais coupables ».

Une histoire palpitante, diablement efficace et dans un contexte historique qui sort des sentiers battus. On adore ce genre de polars qui ne vous lâche pas !

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Rester groupés / Sophie Hénaff (Albin Michel)

La commissaire Anne Capestan et sa brigade du Quai des Orfèvres sont face à une affaire de meurtres en série. Anne est d’autant plus concernée que l’une des victimes est un caïd de l’Antigang et le père de Paul, son ex-mari qu’elle a du mal à oublier. Entre Lyon, Paris et l’Isle sur la Sorgue, c’est une enquête qui va mobiliser tous les talents de l’équipe de « mis au placard ». Si l’intrigue est classique, l’auteur a su créer des personnages colorés, à la marge mais attachants. On les aime aussitôt. Les dialogues sont émaillés d’humour au second degré et flirtent parfois avec l’absurde. On a envie de retrouver bien vite cette équipe pour laquelle « solidarité » n’est pas un vain mot.

Sophie Hénaff a reçu le Prix Polars en séries et le Prix Arsène Lupin pour Poulets grillés, la première aventure des décalés du 36.

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Les doutes d’Avraham / Dror Mishani (Seuil)

A l’aéroport de Tel-Aviv, l’inspecteur chef Avraham accueille sa compagne Marienka en provenance de Bruxelles. Ils ont décidé de tenter l’aventure de la vie commune. La jeune femme parviendra-t-elle à se faire au mode de vie et aux horaires si particuliers du policier ? Nommé chef de la section des homicides, Avraham travaille à sa première enquête de meurtre : une femme retrouvée étranglée à son domicile. En parallèle, Mishani observe à la loupe la vie d’une jeune mère de famille qui s’explique de moins en moins le comportement étrange de son mari. Rapidement le lecteur en sait  d’avantage que l’enquêteur, personnage attachant qui se débat avec ses doutes et ses erreurs.

Un roman policier qui ne se veut pas une étude de la société israélienne mais la dévoile avec finesse par petites touches offrant un réel plaisir de lecture.

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Seules les bêtes / Colin Niel (Rouergue)

Prix Quais du polar 2016 pour Obia, Colin Niel revient avec un nouveau roman délaissant la moiteur guyanaise de ses trois précédents polars. L’auteur plante le décor dans l’aridité des Causses, dans une nature belle mais souvent hostile, où la solitude règne, et où se croisent Alice l’assistante sociale, Michel l’éleveur, Joseph le berger, Maribé la paumée, Armand l’africain, tous liés par la disparition d’Evelyne Ducat, épouse de Guillaume, revenu au pays après avoir fait fortune.

Colin Niel progresse encore dans son écriture, travaille au plus juste ses personnages et peaufine son enquête, avec une parfaite maîtrise pour brouiller les pistes. Un coup de maître !

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Evangile pour un gueux / Alexis Ragougneau (V. Hamy)

Au printemps, Mouss, SDF, est retrouvé noyé dans la Seine. L’autopsie de son corps montre des stigmates christiques. Le lieutenant Gombrowicz et le commandant Landard, assistés de la jeune juge d’instruction Claire Kauffmann, mènent l’enquête. Mouss est très rapidement identifié : il avait été le porte-parole médiatisé des sans-abris lors de l’occupation de Notre-Dame par les SDF, la veille de Noël. L’Eglise et les politiques avaient alors hésité entre l’accueil des miséreux et le rappel à l’ordre. La mort du clochard semble liée à cet événement …

L’auteur nous balade avec délectation dans le décor de l’île de la Cité et ses alentours qu’il connaît parfaitement : Notre Dame, Quai des Orfèvres, Hôtel-Dieu, Sainte-Chapelle, palais de Justice, Jardin Tino Rossi, Quai des Tournelles… Ce roman séduit également pour l’humanité et l’épaisseur de ses personnages.

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Oranges amères / Liad Shoham (Les Escales)

Plongée dans la vie d’une ville de province sans histoire

Liad Shoham nous raconte une histoire qui se passe dans une ville paisible proche de Tel Aviv. A Petah Tikva, le crime n’existe pas. La disparition opportune du journaliste d’investigation va faire apparaître pour quelques instants des réalités pas si paisibles ! Un duo d’enquêteur improbable mais séduisant nous fait rencontrer les protagonistes de ce roman drôle, sarcastique, sans compromis avec les réalités.

Une belle immersion dans la vie cachée de la société israélienne contemporaine : manipulations, intimidation, corruption, amour, déception, résistance, sexe, argent, frustrations, ambivalence, chantage, pots de vin, papis flingueurs, malfaiteur et orangers ! A dévorer sans attendre.

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Treize marches / Kazuaki Takano (Presses de la Cité)

Ryô Kihara, trente-deux ans, est condamné à la peine capitale. Il a déjà passé sept ans dans le couloir de la mort sans connaître la date de son exécution, comme le veut la loi japonaise. Bien qu’amnésique au moment du procès, il a reconnu sa culpabilité. Un matin, il entend les gardes venir chercher son voisin de cellule pour l’exécuter. Traumatisé par les hurlements, Kihara a soudain des flashes, comme si son amnésie se dissipait : il se revoit en train de gravir un escalier, dix ans plus tôt. Il décide d’écrire à son avocat.

Un roman noir social qui flirte avec subtilité du côté du thriller psychologique. Plongée angoissante dans le système judiciaire japonais, ce roman distille un suspens savamment dosé !

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